Une liberté pour chacun, un "bouclier" pour tous

Le débat sur le bouclier fiscal bat son plein. Sa suppression impliquerait une très importante perte de revenus pour certain, la liberté des mouvements de capitaux et des personnes entraînerait une hémorragie... Plaidoyer pour le maintien d'un bouclier protecteur et "inscrit dans le marbre".

Dans une société libérale, le droit à la propriété privée constitue un des garants de la liberté individuelle.

Selon cette logique, la cour constitutionnelle de Karlsruhe a posé pour principe qu?un prélèvement sur la fortune ne saurait, additionné aux prélèvements directs, porter la ponction subie par un contribuable au-delà de 50% des revenus d?un actif. Ainsi, "toute confiscation rampante des biens" est-elle exclue.

Naturellement, la double expérience totalitaire de l'Allemagne, au cours du XXème siècle, donne à cette protection de la propriété privée une résonance particulière, en matière de défense des libertés publiques.

Le Conseil constitutionnel a fondé le principe de la constitutionnalité du "bouclier fiscal" sur une autre logique : l?égalité.

L'article 13 de la déclaration des droits de l'homme de 1789 dispose : "pour l'entretien de la force publique, ... , une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés". Dès lors, "cette exigence ne serait pas respectée si l'impôt revêtait un caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de contribuables une charge excessive au regard de leur faculté contributive".

Ainsi le "bouclier fiscal", loin de méconnaître l'égalité devant l'impôt, tend-il à éviter "une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques". Les conditions de sa saisine n?ont, simplement, malheureusement pas conduit le Conseil constitutionnel à préciser le taux de prélèvement (50, 60, ?%), dont le dépassement constituerait cette "rupture caractérisée".

Un bouclier pour tous

Pour quelques centaines de "happy few", une suppression du "bouclier fiscal", non assortie d?une disparition de l?ISF, conduirait à la confiscation de 90 à 100% de leurs revenus. La liberté des mouvements de capitaux et des personnes, à la base de la construction européenne, leur offrirait cependant "l?opportunité" du choix d?une résidence plus accueillante.

Les autres contribuables se trouvent dans l?incapacité de s?éloigner physiquement de leur source principale de revenus : leur lieu de travail.

La crise économique et la génération de déficits publics himalayens les conduisent à anticiper une augmentation massive des prélèvements obligatoires, avec ses effets ricardiens (hausse du taux d?épargne des ménages à 17%,?). La suppression du "bouclier fiscal" leur enverrait clairement le signal de la disparition de toute limite à une hausse sans fin des impôts directs.

Nombre d?actifs comprendraient alors que leurs efforts individuels ne leur bénéficieraient plus que de manière minoritaire, voire marginale. La démotivation induite pèserait sur notre croissance future.

Inversement, l?inscription du "bouclier fiscal" dans le marbre contraindrait l'Etat à une révolution copernicienne : avec ? à l?aune du Canada ou de la Suède ? l?idée que la dépense publique puisse cesser sa progression continue pour gagner en efficacité.

A cet égard, un véritable "bouclier fiscal" s?avèrerait plus efficient par ses comportements induits qu?une "promesse" d?équilibre sur la (très) longue durée de nos finances publiques.

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