Des milliers de personnes sont toujours à pied d'oeuvre ce lundi matin dans le sud-ouest de la France après la tempête sans équivalent depuis dix ans, qui a fait quatre morts et des dégâts très importants.

La tempête qui s'est abattu vendredi soir sur le sud-ouest de la France est la plus violente que le pays ait connu depuis celle de décembre1999, qui avait fait 88 morts et d'énormes dégâts. Des rafales de vent ont été enregistrées à 184 km/h à Créus (Pyrénées-Orientales), 170 km/h environ au Cap-Ferret, sur le bassin d'Arcachon, 162 km/h à Bordeaux, 159 km/h à Biscarrosse, dans le nord des Landes, et 183 km/h à Cap Creus, à la frontière franco-espagnole.

Le PDG d'EDF Pierre Gadonneix, intervenant ce lundi sur RTL, a annoncé que l'électricité devrait être rétablie d'ici une semaine dans plus de 90% des foyers, à l'exception des habitants des Landes, confirmant une prévision donnée dimanche par Nicolas Sarkozy en Gironde. 680.000 foyers restaient toujours sans électricité dans le sud-ouest, selon ERDF, filiale de distribution d'EDF.

"En 1999, l'ensemble des foyers (...) avait été rétabli en trois semaines. Nous visons de faire beaucoup mieux, a-t-ilsouligné. Les lignes à haute tension ont été moins touchées qu'en 1999, parce que justement notre filiale RTE (réseau de transport d'électricité, ndlr) avait pris des dispositions pour renforcer le dispositif".

Trois morts ont été enregistrés dans les Landes, département particulièrement touché par les événements. Une panne d'électricité a fait une quatrième victime en Gironde, une septuagénaire placée sous assistance respiratoire. Par ailleurs, quatre personnes ont péri, intoxiquées par des émanations de monoxyde de carbone dégagées par des groupes électrogènes, rendus nécessaires par les coupures de courant.

Les vents ont causé de gros dégâts aux habitations et au patrimoine forestier, notamment dans les Landes, où se trouve le plus important massif français. De nombreuses portions de routes sont impraticables, en particulier sur le réseau secondaire ou en zones forestières encombrées par des chutes d'arbres. Dimanche soir, le ministre de l'Agriculture Michel Barnier a proposé la mise en oeuvre d'un plan global permettant "d'assurer la récupération des bois abattus, le stockage et la valorisation de ces bois [comme source d'énergie]" et "d'organiser la reconstitution du patrimoine forestier".

Les axes ferroviaires Toulouse/Montauban/Limoges/Paris et Toulouse/Narbonne/Montpellier, qui avaient été coupés, ont été remis en service dimanche en début d'après-midi, a indiqué la SNCF. En revanche, les axes ferroviaires Hendaye/Dax/Bordeaux et Toulouse/Agen/ Bordeaux étaient toujours fermés au trafic, dimanche. Le trafic des TER dans le sud-ouest connaît également encore des perturbations importantes.

En revanche, le trafic des aéroports de Toulouse-Blagnac et de Perpignan, interrompu, a été rétabli dès dimanche matin, selon les préfectures. Un début de retour à la normale était également constaté dans la nuit de samedi à dimanche sur le réseau routier, la majorité des interdictions de circulation des poids lourds, des véhicules de transports de matières dangereuses et des véhicules de transports en commun ayant été levée.

Quelque 40.000 foyers du Sud-Ouest ont été également privés de ligne de téléphone fixe samedi après-midi, des centraux téléphoniques n'ayant plus d'alimentation électrique. Concernant les communications mobiles, "la couverture est très altérée", 20% à 50% des relais ne fonctionnant pas, surtout dans le Gers, la Gironde et la Haute-Garonne. "En plus des impacts dus aux problèmes d'électricité, de nombreuses lignes terminales sont cassées à cause de chutes d'arbres ou de débris. Ces réparations seront plus longues à effectuer et dureront plusieurs jours", a souligné France Télécom.

Dans les Pyrénées, la plupart des stations de ski ont fermé en raison de risque d'avalanches.

Après avoir fait de gros dégâts dans les départements proches de l'Atlantique, la dépression s'est étendue samedi aux régions Poitou-Charentes et Languedoc-Roussillon avant de perdre en intensité. La tempête s'est achevée durant la nuit de samedi à dimanche et Météo France a indiqué dimanche matin que les vents avaient nettement faibli du sud-ouest au pourtour du golfe du Lion, tout en appelant à la prudence. Le dispositif d'alerte rouge, qui touchait samedi matin neuf départements, a été levé à 22H30 dans les Pyrénées-Orientales, dernier département concerné, qui repasse en "vigilance orange", a annoncé Météo France. Selon le centre météorologique, "Klaus" - prénom utilisé par les services météorologiques allemands pour désigner la tempête - se décale désormais vers l'Italie.

Nicolas Sarkozy a emmené ses principaux ministres sur les lieux de la tempête, à Pian-Médoc d'abord, puis à Bordeaux, ainsi que le PDG d'EDF, Pierre Gadonneix, le président de la SNCF, Guillaume Pépy, et le président de la Fédération française des sociétés d'assurance, Bernard Spitz. Le chef de l'Etat a par ailleurs demandé à l'armée de terre "d'apporter tout son concours au dégagement des voies de communication".

Il a estimé également que la liste des communes susceptibles de bénéficier de la procédure de catastrophe naturelle pourrait être présentée lors du conseil des ministres du 4 février, parlant d'une "affaire de jours". Cette procédure débloque l'accès aux indemnisations des assurances.

L'appel de Christine Lagarde aux assureurs

La ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a appelé dans un communiqué les assureurs à "faire preuve d'une mobilisation exemplaire", "afin de limiter les conséquences de cet événement climatique pour les personnes concernées". La ministre "souhaite la mise en place immédiate de cellules de crise afin d'accélérer les procédures d'indemnisation et de réparation, et l'envoi dès que possible d'experts dans la zone concernée afin d'évaluer les dégâts". Christine Lagarde, qui rappelle que "tous le contrats d'assurance multirisques habitation comprennent obligatoirement une garantie tempête qui couvre les dommages causés par les effets du vent", s'est félicitée samedi "des premières actions déjà engagées par les assureurs".

Le groupe d'assurance Groupama et sa filiale Gan Assurances ont annoncé dimanche qu'"à titre exceptionnel", les "franchises" prévues dans leurs contrats ne seraient par appliquées aux particuliers victimes de la tempête. Les dossiers ne relevant pas du "risque tempête", notamment les inondations, "seront pris en charge sans attendre la publication de l'arrêté Catastrophes naturelles au Journal officiel", a précisé Groupama.

L'Espagne mise à rude épreuve

Cette tempête hivernale a aussi frappé le Nord-Est de l'Espagne où l'on recensait samedi soir onze morts, dont au moins quatre enfants lors de l'effondrement d'un mur à Sant Boi de Llobregat, près de Barcelone, en Catalogne.

Quelque 14.000 habitants de la ville de Nucia, dans la province d'Alicante (sud-est), ont été évacués en raison d'un incendie de forêt déclenché apparemment par la chute d'un pylône électrique à cause des vents violents. Au Pays Basque (nord), plusieurs dizaines de personnes ont dû être évacuées de leurs maisons après que le vent eut arraché les toits.

De multiples coupures d'électricité ont frappé des centaines de milliers d'usagers, selon les médias, dans plusieurs régions d'Espagne, au Pays Basque, en Aragon, en Galice, en Catalogne. Les fortes rafales de vents entraînaient des retards et des annulations de vols dans les aéroports de Bilbao et Saint-Sébastien au Pays Basque, de Pampelune en Navarre, de Santander en Cantabrie, et d'Ibiza dans l'archipel méditerranéen des Baléares. Elles ont aussi affecté la circulation des trains, notamment ceux à grande vitesse reliant Madrid et Barcelone.