Grand débat : les volte-face fiscales du gouvernement

Depuis le lancement du Grand débat, le gouvernement tâtonne pour trouver la réponse juste aux revendications des "Gilets jaunes". Et les différentes partitions des ministres peinent à s'accorder, notamment sur la question fiscale, qui a fait se multiplier les déclarations contradictoires ces dernières semaines. Au cœur des débats se tient la question de la justice fiscale, que le gouvernement peine à concilier avec son refus d'augmenter les impôts, dont ceux des plus riches.
Le gouvernement d'Edouard Philippe peine à clarifier sa réponse aux gilets jeunes, notamment sur la question fiscale.
Le gouvernement d'Edouard Philippe peine à clarifier sa réponse aux gilets jeunes, notamment sur la question fiscale. (Crédits : Stephane Mahe)

Comment répondre au mécontentement des gilets jaunes, sans revenir sur sa propre ligne politique ? C'est l'équation délicate à laquelle est confronté le gouvernement d'Édouard Philippe, alors que le mouvement entre dans son quatrième mois de contestation. La question a été tranchée sur le pouvoir d'achat, avec la suspension de la réduction des déficits pour financer les mesures annoncées par Emmanuel Macron le 12 décembre.

Mais en matière de fiscalité, l'autre grand thème au cœur des revendications des "Gilets jaunes", le gouvernement semble autrement plus partagé sur les concessions à accorder. En témoigne la récente succession d'annonces contradictoires de la part de plusieurs ministres, qui a contribué à largement brouiller le message du gouvernement, et commence à faire douter de sa volonté d'infléchir réellement sa ligne.

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Le seul choix clairement affirmé jusqu'ici a été le maintien de la suppression partielle de l'ISF. Alors que les critiques d'une bonne partie des gilets jaunes se cristallisent sur cette mesure, le gouvernement a décidé de préserver ce qu'il considère comme un symbole de son action et de sa capacité à réformer. Mais le procès en injustice et les accusations d'une politique fiscale trop favorable aux plus riches pourraient aussi constituer un coût politique important à terme. D'où la recherche d'autres mesures pouvant contrebalancer l'effet inéquitable de la fin de l'ISF.

Incertitude sur les niches fiscales

Première idée, évoquée par Gérald Darmanin dans un entretien au Parisien le 3 février : réduire les niches fiscales, soit par une baisse globale du plafond des réductions d'impôt, soit par une mise sous condition de ressources. Le coup de rabot sur les niches fiscales, régulièrement préconisé par la Cour des comptes, est d'ailleurs très populaire sur le site du grand débat. Mais la portée générale de l'annonce, qui se gardait bien de cibler une niche fiscale en particulier, n'a pas empêché les bénéficiaires des différents allègements fiscaux de monter rapidement au créneau.

Les tribunes se sont ainsi multipliées, qui pour prendre la défense du crédit d'impôt sur les services à la personne, ou de la niche de l'investissement locatif etc. Dès le 6 février, Gérald Darmanin était ainsi tenu d'indiquer qu'il préserverait le crédit d'impôt sur l'emploi à domicile, avant que Bruno Le Maire ne se déclare "totalement opposé" à toute réduction des niches fiscales, le 19 février.

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La cacophonie du gouvernement s'est étendue à d'autres sujets, révélant l'absence de ligne clairement établie. La remise sur la table de la taxe carbone par 86 députés, dont des marcheurs, par une tribune du 12 février publiée dans Le Figaro en est un exemple. L'idée est rapidement soutenue par Brune Poirson, la secrétaire d'État à la transition écologique et solidaire, et François de Rugy, mais récolte l'hostilité d'autres membres du gouvernement, avant d'être rejetée par Emmanuel Macron en conseil des ministres le 13 février. Et le chef de l'État de déclarer par la même occasion que "ce n'est sans doute pas par une hausse de la fiscalité qu'on répondra à la colère qui s'est exprimée".

Plus de justice fiscale, par des baisses d'impôts ?

Même chronologie pour le gel de la suppression de la taxe d'habitation pour les 20% des Français les plus aisés : proposée par Bercy, la mesure est d'abord considérée comme une piste par Emmanuel Macron, qui indique le 8 janvier qu'elle figurera dans le grand débat. Mais le président finit par revenir sur ses propres déclarations, et annonce le maintien de la suppression de la taxe pour tous les foyers d'ici 2021.

Cette série de revirements révèle bien la difficulté du gouvernement à concilier des objectifs contradictoire : réintroduire une dose de justice fiscale, tout en se refusant à augmenter les impôts. Il est d'ailleurs assez parlant que, dans le questionnaire "fiscalité" du site du grand débat, il ne soit pas possible de proposer que des baisses d'impôts ou de dépenses publiques. Cette manière de "coder" les demandes des gilets jaunes dans une matrice cohérente avec les choix du gouvernement parviendra-t-elle à convaincre au-delà d'En Marche ? La restitution des résultats du grand débat après le 15 mars, et l'interprétation qu'en fera le gouvernement, seront sans nul doute une étape déterminante.

Commentaires 5
à écrit le 22/02/2019 à 19:56
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Le gouvernement ferait mieux de s'occuper des personnes vivant sous le seuil de pauvreté et élargir le RSA aux 18-24 ans qui souffrent beaucoup. Laissez les gens dans la pauvreté est un choix politique. L'urgence n'attend pas.

à écrit le 22/02/2019 à 10:33
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La réponse à apporter non pas aux seuls gilets jaunes mais à toute la classe moyenne, aux retraités et aux indépendants est une BAISSE DRASTIQUE DES PRELEVEMENTS OBLIGATOIRES à plus de 45% en France: champion de l'U.E. Mais ce gouvernement n'a d'aut...

à écrit le 21/02/2019 à 20:06
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Jupiter le banquier et ses serviles soldats playmobil LREM cherchent des éléments de langage pour taxer encore plus ceux qu'ils méprisent et haïssent en les traitant de gueux et de sans dents. Jadis on appelait cela langue de bois, hypocrisie, ou men...

le 22/02/2019 à 3:18
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Tous a la lanterne. Et ressortir la veuve nationale.

à écrit le 21/02/2019 à 17:31
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Semer la confusion a toujours était la politique de Macron, cela permet de dire tout et son contraire ce qui divise ses auditeurs en ayant toujours raison! De plus il se sent "irresponsable" sachant que ses ordres, appelé programme, viennent de Bruxe...

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