Caramba, encore raté ! Finalement, ce n'est pas une femme qui présidera l'Assemblée nationale pour devenir ainsi le quatrième personnage de l'Etat dans l'ordre protocolaire. Et pourtant, avec 223 femmes députées, soit près de 39% du total des 577 élus, l'occasion n'avait jamais été aussi belle de corriger cette anomalie : jamais une femme n'a présidé l'Assemblée Nationale ou le Sénat. Certes, il y a eu des vice-présidentes, la première d'entre-elles fût Marcelle Devaud, gaulliste, élue vice-présidente du Sénat en 1948 et la dernière Sandrine Mazetier, socialiste, vice-présidente de l'Assemblée nationale sous la précédente législature. Mais de présidente, donc, jamais. On se souvient que Ségolène Royal envisageait de briguer le poste en 2012. Mais à la suite d'un rocambolesque épisode, elle ne fût même pas élue députée.
Une occasion manquée avec 223 femmes à l'Assemblée
2017 avec son cortège de femmes députées laissait donc espérer la fin de cette « malédiction ». Hélas, la « vieille » politique, malgré ces temps de renouveau affiché, l'a emporté sur toutes les autres considérations au sein du groupe ultra dominant de « La République en marche » (LREM) à qui devait donc revenir le « perchoir ». C'est en effet François de Rugy qui a été élu président avec 353 voix. Il avait été préalablement choisi au sein de son groupe, et élu dès le premier tour de scrutin avec 153 voix, contre 59 pour Sophie Errante, 54 pour Brigitte Bourguignon et 32 pour Philippe Folliot, pour postuler au poste de président de l'Assemblée nationale.
Alors certes, François de Rugy a « de l'expérience » puisqu'il a été élu pour la première fois député en 2007 mais, après tout, les deux candidates qui lui étaient opposées, sont toutes les deux des ex députées socialistes élues en 2012.
Un graphique de notre partenaire Statista
La nomination de de Rugy sévèrement commentée
Oui mais il fallait remercier François de Rugy. Ex Europe Ecologie Les Verts (EELV), il avait quitté son parti pour créer sa propre formation et se rapprocher des socialistes. Il avait concouru a la primaire de la gauche pour la présidentielle. Une fois Benoit Hamon désigné vainqueur, il a refusé de le soutenir pour se tourner vers... Emmanuel Macron. « L'opportunisme en politique et aujourd'hui récompensé » a grincé l'ancien député écologiste Noël Mamère. « Félicitations à François de Rugy, première femme à présider l'Assemblée nationale » a pour sa part ironiquement tweeté la députée socialiste Colombe Brossel. D'une façon générale, de très nombreux députés ont évoqué « une occasion manquée ». Car, in fine, aucune femme n'occupe un poste de présidente d'une haute institution : conseil d'Etat, conseil constitutionnel, Cour de cassation, cour des comptes, Sénat, Assemblée nationale, etc... Et dire que pendant sa campagne, Emmanuel Macron avait évoqué la possibilité de nommer une femme première ministre... Ce qui n'était arrivé qu'une fois avec Edith Cresson choisie par François Mitterrand.
Des soutiens parfois maladroits
Alors, quelques voix sont venues tenter défendre le choix de François de Rugy, parfois d'une façon un peu maladroite. Ainsi, la députée LREM, Barbara Pompili, compagnon de route de François de Rugy depuis EEL, a-t-elle déclaré qu' « aucune femme n'a la compétence de François de Rugy »... Quant au patron du groupe LREM à l'Assemblée, Richard Ferrand, il s'est engagé à « respecter la parité parfaite » à la tête des commissions parlementaires... Certes !. Il a aussi évoqué la possibilité de changements de têtes, y compris au perchoir de l'Assemblée, à mi-mandat... Certes encore. Christophe Castaner, lui, ministre des Relations avec le parlement, a rappelé que « il n'y a pas eu de décision de dire ce poste est réservé à une femme ». Réserver, non, ce serait d'ailleurs anticonstitutionnel, mais tout faire pour y parvenir n'était pas interdit et cela aurait été politiquement et symboliquement plutôt bien joué.