Peut-on réduire la volatilité ?

Il faudrait corriger l'horizon d'investissement des investisseurs institutionnels et renforcer la régulation des fonds systémiques.
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Trois facteurs principaux expliquent l'excessive volatilité des marchés financiers. D'abord, l'irrationalité des comportements. De nombreux travaux d'économie expérimentale ont montré que la façon dont les individus forment leurs anticipations et décident en situation d'incertitude diffère beaucoup des hypothèses retenues par la théorie financière. On observe qu'ils extrapolent indûment des séries d'événements trop courtes, leur sentiment est influencé par le contexte ou la présentation qu'on leur en donne, ils évaluent mal les probabilités, ils sont réticents à prendre leurs pertes...

Cette irrationalité ne suffit pas cependant à rendre compte de "l'inefficience" des marchés. Car il existe des arbitragistes et des spéculateurs dont la fonction consiste, en principe, à tirer parti des anomalies observées. Le problème est que leur horizon se trouve limité pour diverses raisons : garanties requises, contrôle des résultats, contraintes de liquidité. De sorte qu'ils sont conduits à se comporter de façon trop court-termiste. Ainsi, ils ont tendance à coller aux évolutions moyennes ou à se réfugier dans des comportements mimétiques. Ou plus encore, ils cherchent à profiter des évolutions de prix à court terme plutôt qu'à parier sur les écarts aux "fondamentaux". Ce faisant, ils alimentent les déséquilibres de prix au lieu de les réduire.

Enfin, la crise a montré que ces déséquilibres temporaires étaient amplifiés par le comportement des intermédiaires de marché (banques de financement et d'investissement, brokers-dealers, hedge funds). Plus précisément, c'est l'évolution procyclique de leur levier, c'est-à-dire le rapport qu'ils établissent entre leurs actifs et leurs fonds propres, qui est à l'origine de ce mécanisme. Un accroissement de leurs capitaux propres, résultant d'une hausse des prix d'actifs, les incite à augmenter leur demande de titres pour employer cet accroissement de leur richesse ainsi que l'endettement supplémentaire qu'implique l'élévation voulue du levier. La hausse des prix nourrit ainsi la hausse, et naturellement le mécanisme s'inverse en cas de choc négatif.

Comment réduire la volatilité ? En ce qui concerne les biais de comportements, l'idée serait de corriger l'horizon des investisseurs institutionnels en renforçant leur gouvernance et en enrichissant les contrôles de leurs performances pour garantir une adéquation entre leur gestion et les objectifs qu'ils se donnent ; notamment pour s'assurer que la rotation du portefeuille s'accorde avec l'horizon de placement déclaré. Par ailleurs, il faut que les fonds systémiques soient soumis à une régulation prenant en compte les externalités, c'est-à-dire les mouvements erratiques de marché, que provoquent certains mouvements de leurs portefeuilles.

Concernant la procyclicité du comportement de levier des intermédiaires de marché, on rejoint une question bien identifiée dans les accords de Bâle III et qui a fait l'objet d'une proposition visant à lisser dans le temps les exigences de fonds propres bancaires. Des suggestions ont aussi été faites pour réduire la variabilité des marges requises et des "haircuts" pratiqués sur certaines transactions. Mais les mesures les plus efficaces consisteraient à fixer un niveau maximal pour le levier des institutions concernées et à limiter leur risque de liquidité.

Dans tous les cas, il s'agit de recourir à des instruments micro ou macroprudentiels. Car, contrairement à certaines idées à la mode, ce n'est pas la politique monétaire qui est en cause. Dans le passé récent, ce sont les mouvements de prix d'actifs qui ont stimulé la création (ou la destruction) de liquidité, et non des erreurs de politique monétaire. Au demeurant, les banques centrales ne disposent pas aujourd'hui des moyens de contrôler les bulles financières. C'est pourquoi leurs instruments doivent rester prioritairement affectés aux objectifs traditionnels de régulation macroéconomique.

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