Accord (très) a minima sur le sauvetage bancaire par le MES

L'Eurogroupe s'est mis d'accord sur les conditions d'intervention directe du Mécanisme européen de stabilité (MES) pour sauver les banques en difficultés. Un accord qui ne coupe pas réellement le lien entre risque bancaire et risque souverain.
Le président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem (à gauche sur la photo), ne s'était donc pas trompé lorsqu'il avait affirmé en avril dernier que le cas chypriote deviendrait un modèle pour les prochains sauvetages bancaires. Copyright Reuters

C'est fait. Les banques de la zone euro pourront à l'avenir demander directement l'aide du Mécanisme européen de Stabilité (MES). Les 17 membres de l'Eurogroupe ont finalement trouvé un accord sur les deux points qui faisait débat : la somme allouée à ces sauvetages bancaires et l'aspect rétroactif ou non de ces sauvetages.

60 milliards d'euros

Les 17 ministres des Finances se sont mis d'accord sur 60 milliards d'euros. Autrement dit, sur une somme extrêmement restreinte. Rappelons que le MES dispose d'une capacité de prêt de 500 milliards d'euros, en excluant les prêts déjà accordés par le FESF, son prédécesseur. Jusqu'ici, 40 milliards ont été accordés à l'Espagne pour sauver ses banques et 2 milliards à Chypre. Cette île devrait recevoir en tout 9 milliards d'euros du MES. Globalement, ceci laisse à disposition de l'organisation environ 450 milliards d'euros.

Une somme suffisante ?

La somme de 60 milliards d'euros alloué aux sauvetages bancaires est donc très faible. Mais le président du MES, Klaus Regling, a martelé que cela était « suffisant. » Sans doute l'est-ce dans des conditions « normales », mais si l'on se souvient de la crise bancaire de 2008, on se rappellera que les sommes en jeu se comptaient en centaines de milliards d'euros. Plus près de nous, l'Espagne a donc réclamé 40 milliards d'euros pour renflouer son système bancaire. Le Royaume aurait donc déjà englouti les deux tiers des moyens mis à disposition du MES...

Faire participer tout le monde au sauvetage avant le MES

Mais l'Eurogroupe a une parade : il suffit de faire participer les Etats, les actionnaires et les créanciers aux sauvetages des banques. L'accord prévoit même de faire participer « les plus gros déposants » à un éventuel sauvetage. Autrement dit, le cas chypriote deviendra bien un modèle pour les prochains sauvetages bancaires. Le président de l'Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, ne s'était donc pas trompé lorsqu'il avait affirmé ce fait dès avril dernier.

Rétroactivité au cas par cas

Le dispositif sera opérationnel à l'automne 2014. En théorie, le MES ne pourra intervenir que lorsque les difficultés des banques interviendront après cette date. Néanmoins, lorsque les difficultés seront apparues avant cette date, le MES pourra examiner « au cas par cas », la possibilité d'intervenir. L'Irlande avait insisté pour qu'on laisse cette porte ouverte. L'Espagne, de son côté, a indiqué qu'elle ne profiterait pas de cette possibilité.

Un accord qui manque sa cible

Que penser de cet accord ? Qu'il manque sa cible. L'union bancaire devait couper le lien entre le risque bancaire et le risque souverain, autrement dit libérer les Etats de la charge de sauver les banques. Ce ne sera pas le cas. La banque devra atteindre un ratio de solvabilité Tier-1 de 4,5 % avant de pouvoir bénéficier de l'aide du MES. C'est donc les Etats qui devront renflouer les banques pour qu'elles retrouvent ce niveau. Ensuite, l'Etat devra apporter au moins 20 % des besoins de recapitalisations des banques pendant deux ans, et 10 % les années suivantes.

Pour des Etats très fragiles avec des secteurs bancaires importants, comme la Slovénie, le poids risque de n'être pas négligeable. Par ailleurs, l'accord scelle dans le marbre la possibilité de contraindre les déposants à participer au sauvetage des banques. C'est une mesure qui fragilise le secteur bancaire, notamment dans les petits pays très dépendants du système financier, comme Malte, par exemple. Enfin, le montant de 60 milliards d'euros ne semble pas en mesure de contenir une véritable crise bancaire. Il ne peut s'agir que de munitions pour contenir des crises ponctuelles.

Comme d'habitude, les dissensions internes dans la zone euro ont débouché sur un compromis très limité. Qui relève plus de la communication que de l'efficacité.


 

Commentaires 5
à écrit le 26/06/2013 à 6:37
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Nouvelle étape dans la construction européenne : l'Union Bancaire http://www.leconomiste.eu/decryptage-economie/50-nouvelle-etape-dans-la-construction-europeenne-l-union-bancaire.html

à écrit le 22/06/2013 à 13:56
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Il n'y a plus de problème au niveau des banques ,la commission des finances à l'assemblée nationale a statué sur le sujet,voir rapport de Karine Berger."ceci laisse à disposition de l'organisation environ 450 milliards d'euros".C'est pour rire j?espè...

à écrit le 21/06/2013 à 17:59
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Mais bien sur, c'est facile comme cela, nous sommes obligés d'avoir l'argent à la banque, alors, pourquoi se priver de voler les déposants . C'est incroyable, révoltant, c'est malhonnete.

le 21/06/2013 à 21:07
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C'est toujours moins malhonnête que de taxer les actifs pour sauver les rentiers. C'est tout l'esprit du basculement du bail out vers le bail in. En fait on peut même être davantage effrayé par les Clauses d'Actions Collectives des OAT comme je l'a...

à écrit le 21/06/2013 à 16:18
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Ce n'est pas aux états ni à leurs contribuables de sauver une bande de requins sans moralité : une banque mal gérée doit faire faillite (c'est une des règles de base du libéralisme que les banquiers eux-meme défendent bec et ongles, n'est-ce pas ?), ...

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