L'Europe a besoin d'un miracle

Résumons les faits. Pour la deuxième fois en six mois, la Commission européenne a abaissé hier sa prévision de croissance pour la zone euro. A 1,6% pour l'année 2005, son pronostic n'en reste pas moins beaucoup trop optimiste aux yeux de nombreux économistes. Car les cours du pétrole ont bondi de 85% en douze mois. Le chômage a grimpé à 8,9% de la population active. La confiance des consommateurs est à son plus bas niveau en sept mois. Celle de chefs d'entreprises n'avait pas connu un tel creux depuis plus d'un an. Fermez le ban.La question est donc de savoir d'où peut venir le sursaut. Et force est de reconnaître que la réponse n'est pas aisée. Le précédent existe pourtant, et il n'est pas si lointain. A la fin des années 1990, la France a connu un redressement spectaculaire, qui l'a propulsé au delà de la moyenne de la croissance de la zone euro, avec une progression moyenne du PIB de 3,7% de 1998 à 2000, rappelle Jean-Marc Lucas, dans une étude de BNP Paribas. L'origine de ce rebond spectaculaire ? "Le dynamisme atypique de la demande intérieure," répond l'économiste. La consommation privée a été soutenue par une forte progression de l'emploi dans un contexte de modération salariale. Les dépenses publiques ont soutenu la demande. L'investissement productif a gagné plus de 9% en rythme annuel, encouragé par cette demande solide, la chute des taux d'intérêt et des marges d'autofinancement restaurées.Malheureusement, ce scénario vertueux ne peut se reproduire cinq ans plus tard, pour de multiples raisons. La croissance est devenue moins créatrice d'emplois. Le réservoir d'emplois "flexibles" (CDD) est désormais largement épuisé. Le ralentissement récent n'ayant pas entraîné une chute proportionnelle d'effectifs, un début de reprise n'appellera pas un retour rapide à l'embauche. Enfin, pour beaucoup d'entreprises, l'allégement des charges est compensé par la revalorisation du SMIC.Deuxième obstacle : du côté des dépenses publiques, les marges de manoeuvre ont disparu. Un, le ralentissement qui dure pèse sur les recettes publiques. Deux, la maîtrise des dépenses nécessaire pour obtenir un déficit public ramené à moins de 3% du PIB ne permet aucune générosité (d'autant qu'en 2005, le solde de 2,9% ne sera obtenu que grâce à une "soulte" de 7,7 milliards d'euros prélevée sur EDF).Enfin, le redémarrage de l'investissement se heurte à deux difficultés. D'abord, les priorités en ce domaine vont logiquement aux zones à plus forte croissance. Ensuite, toutes les entreprises n'ont pas les résultats mirobolants des géants du CAC 40: globalement, les capacités de financement des entreprises demeurent relativement contraintes.Bref, réamorcer un cercle vertueux s'annonce cette fois particulièrement délicat. Avec tous les facteurs exogènes impossibles à maîtriser, comme le cours du pétrole, des finances publiques exsangues et la résistance du chômage, les arguments ne se bousculent pas pour motiver consommateurs et entreprises.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.