Comédie à l'italienne

Pour le monde bancaire italien, l'été a été chaud. Comme prévu, les offres d'ABN Amro sur Banca Antonveneta et du BBVA sur la BNL se sont soldées par des fiascos. Comme beaucoup l'anticipaient et le redoutaient à la fois, Antonio Fazio, le gouverneur de la Banque d'Italie, est parvenu à ses fins. Ardent défenseur de "l'italianité" des banques transalpines, l'indéboulonnable Fazio est parvenu à susciter des offres concurrentes et à les imposer. Ce qui était moins prévu, c'est le brutal retour de bâton subi par le même Fazio dont l'art de la "combazione" a fini par lasser, y compris en Italie. Depuis plusieurs semaines, l'autorité boursière italienne, la Consob, et surtout le parquet de Milan sont passés à l'offensive pour dénoncer les manoeuvres déloyales dont ont usé et abusé les protagonistes de cette triste farce. Ainsi, la façon dont la Banca Popolare Italiana (BPI, ex-Lodi) est parvenue à circonvenir la Banque d'Italie est particulièrement édifiante. La révélation des écoutes téléphoniques entre Antonio Fazio et le patron de la BPI est à elle seule un moment d'anthologie. A ce niveau, parler de connivence est un euphémisme. Visiblement, le seul souci du gouverneur était de permettre à la BPI d'arriver à ses fins, quitte à subir les foudres de la Commission européenne. Et le moins que l'on puisse dire est que les autorités bruxelloises n'ont pas fait preuve d'une grande autorité ni d'une grande persévérance. Il a en effet suffi que la Banque d'Italie se fende d'une ou deux lettres pour que les Commissaires concernés baissent les bras et s'inclinent devant la volonté d'Antonio Fazio. Mais la polémique qui s'est depuis développée en Italie risque bien de faire du tort au gouverneur. Même si le gouvernement de Silvio Berlusconi a choisi de temporiser, la position de Fazio apparaît aujourd'hui affaiblie. Les milieux d'affaires sont en effet sévères vis-à-vis d'un gouverneur qui a ruiné l'image d'indépendance de l'institution qui dirige. A l'avenir, chacune de ses décisions risque de n'être scrutée que dans une seule perspective: quel intérêt particulier a voulu cette fois encore défendre le gouverneur? Cela risque bien sûr d'isoler l'industrie bancaire italienne qui n'a pas achevé sa consolidation. Cela entache aussi sa réputation au moment où elle peut légitimement prétendre à jouer un rôle de premier plan en Europe. Le rachat de l'allemande HVB par UniCredit prouve que la banque italienne sait s'ouvrir à l'international. La bataille d'arrière-garde du gouverneur Fazio sur "l'italianité" n'en est que plus anachronique.
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