A la rencontre de Saint Maradona

"El Camino de San Diego", un road-movie magique de l'argentin Carlos Sorin.

Le Chemin de San Diego est, au même titre que celui de Saint Jacques de Compostelle, un pèlerinage. Comme il l'avait déjà fait dans "Bombon el perro", Carlos Sorin nous emmène avec "El Camino de San Diego" sur les chemin de l'Argentine profonde, où son héros, Tati Benitez, modeste travailleur de la forêt, part à la rencontre de son Dieu, Diego Armando Maradona, l'étoile du foot argentin des années 1980. Tati entreprend ce parcours initiatique pour lui remettre la racine d'un arbre qu'il a trouvée dans la forêt et qui ressemble, au moins pour lui et quelques autres aficionados, au joueur mythique, mal en point dans un hôpital de Buenos Aires.

En partant de l'Etat de Missiones, dans le nord-est du pays, la route est longue, surtout sans un sou. Mais la statue de Maradona fait des miracles, permet de franchir un barrage bloquant la route, de rencontrer des camionneurs au grand coeur, comme Warguinho, un brésilien qui transporte 500.000 poussins dans son camion, et d'arriver enfin jusqu'à la villa où se repose le joueur après une crise cardiaque. Alors, le curé du coin a beau dire que l'Eglise n'aime pas l'idolâtrie, d'autres ont beau se moquer de la candeur de Tati, il va réussir dans son entreprise, avec la bienveillance des gens qui l'entourent, puisqu'il y croit. Certes, il ne remet pas en mains propres au footballeur la fameuse statue, mais qu'importe, il baigne dans la ferveur générale qui fait chanter en choeur "Diego, le peuple est avec toi".

Au delà d'un récit presque documentaire sur la vie de Tati, c'est une plongée dans les rouages de la société argentine que nous propose Carlos Sorin. Le réalisme magique, cher aux auteurs latino-américains tel que Gabriel Garcia Marquez, imprègne en effet la pensée et la vie de tous les jours, avec une composante supplémentaire, celle du football et de ses "saints" en Argentine.

Carlos Sorin s'est inspiré d'histoires vraies pour "El Camino de San Diego". Elles se sont déroulées à une autre époque, celle de l'autre mythe argentin, Evita Peron. Alors qu'elle se mourrait, à l'hiver 1952, la ferveur populaire a entraîné une partie de la population à accomplir des marathons de tango, des jeûnes, des marches à reculons. Il s'agissait, avec ces sacrifices, de hâter la guérison d'Evita, crucifiée par le cancer. Religion, populisme, football... le peuple argentin a plus d'un opium, pour lui permettre d'espérer, toujours et encore, que le miracle d'une vie meilleure va un jour s'accomplir.

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