Le temps de la succession

"L'heure d'été", un film très émouvant d'Olivier Assayas qui traite de la transmission d'un patrimoine familial riche en oeuvres d'art. Après la disparition de la mère, les trois enfants - incarnés avec beaucoup de sensibilité par Juliette Binoche, Charles Berling et Jérémie Rénier - ont des avis divergents sur la conduite de la succession.

Les affaires de famille, avec leurs enjeux les plus divers, c'est un peu la spécialité du cinéma français. Olivier Assayas les avait déjà abordées dans sa grande saga historique "Les destinées sentimentales" (2000). Cette fois, il les traite sous l'angle de la succession et de la transmission d'un patrimoine artistique.

Le projet est parti d'une proposition du Musée d'Orsay qui voulait associer le cinéma, sous la forme de courts-métrages, aux célébrations de son vingtième anniversaire. Pour des raisons techniques, l'idée a été abandonnée mais Assayas en a tiré la matière d'un long métrage. Le Musée et ses responsables laissent d'ailleurs une trace dans le film où ils apparaissent car ils vont cristalliser l'enjeu de la succession en question.

"L'heure d'été" débute par une belle journée dans la grande maison familiale, véritable caverne d'Ali Baba à la campagne, non loin de Paris. Autour de la mère, veuve (charmante Edith Scob), qui fête - à contrecoeur - ses 75 ans, sont rassemblés ses trois enfants et leurs marmailles respectives. Des trois, seul l'aîné (Charles Berling) est resté proche (physiquement et moralement) de la mère. Les deux autres se sont dispersés au quatre vents de la mondialisation: la puinée (Juliette Binoche) travaille en Amérique, le cadet (Jérémie Rénier) en Chine.

Sentant qu'elle n'est pas éternelle, la mère, profitant d'un moment d'inattention des autres, accapare l'aîné pour lui faire la visite du patrimoine familial, qui est énorme. De son oncle, un peintre réputé du début du XXème siècle dont elle conserve religieusement le souvenir, elle a hérité de cette maison de rêve et de tous le objets qui s'y trouvent. Outre des oeuvres d'art, des meubles Art nouveau signés Majorelle et quantités de bibelots, vases.... qui ont une grande valeur vénale et plus encore, pour elle, symbolique.

L'aîné a beau se récrier que l'heure n'est pas encore à la succession, la mère insiste pour dresser un inventaire précis de ce dont ils vont hériter et qui mérite l'attention. Bien lui en a pris, car un an après cet anniversaire, elle n'est plus de ce monde. Les trois enfants se retrouvent à nouveau mais seuls, cette fois, afin de régler la succession. Pour l'aîné, il ne fait pas de doute que la maison doit rester dans la famille avec tout son contenu et servir de point de ralliement à tous pour les vacances. Ce n'est pas l'avis des deux autres qui font valoir que leur vie (et leurs vacances) sont ailleurs. Et qui suggèrent - doucement mais fermement - qu'il est temps de tourner cette page de l'histoire familiale.

Faut-il donc envisager de se débarrasser de tout ce legs? Malgré lui, l'aîné doit se rendre à leurs raisons. Le coeur gros. Le spectateur aussi.

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