Si l’on ne meurt plus, comment vivra-t-on ?

Les nouvelles technologies de la santé vont connaître un développement exponentiel dans les années qui viennent, ce qui allongera notre durée de vie d'une façon spectaculaire. Un phénomène transposable à l'univers de l'entreprise ? Notre contributeur Charles-Edouard Bouée, consultant spécialiste des marchés asiatiques, tente de répondre.
Peut-on transposer notre nouvelle longévité au domaine de l'entreprise ? REUTERS

J'ai abordé ici, à plusieurs reprises, la façon dont les entreprises peuvent adopter les principes de la stratégie militaire américaine, la light footprint strategy, qui reposent sur l'utilisation des drones, le recours aux forces spéciales et la maîtrise du cyberespace. Plus je développe ce principe auprès des entreprises, en Europe et en Asie, et plus il apparaît à tous comme une réponse aux années qui viennent, permettant aux organisations de rester légères, souples, réactives, en prise directe avec les nouvelles technologies.

 La validité de la light footprint strategy se vérifie dans bien d'autres domaines que celui du management de l'entreprise. Cette approche nous concerne aussi de près, et en particulier dans le domaine de la santé. Les nouvelles technologies qui se développent dans les biotechnologies, notre capacité à décrypter le génome humain, la miniaturisation des équipements, la création de nouveaux matériaux, le boom des nanotechnologies rendent dès aujourd'hui possible une médecine à « trace légère » où les médecins et chirurgiens vont se transformer progressivement en ingénieurs et soigneront les malades quasiment sans toucher leur corps. Cette transformation radicale de l'acte de soigner en un geste technologique de haut niveau aura des répercussions spectaculaires sur l'allongement de la durée de vie en permettant de remplacer des organes, de réparer des tissus, d'intervenir au cœur des cellules en en intégrant l'ingénierie propre, de placer dans le corps humain, y compris dans le cerveau, des micro-équipements qui permettront de soigner des maladies qui étaient jusque là incurables ou sur lesquelles les médicaments traditionnels n'ont pas de prise. 

 L'inexorable montée en puissance des NBIC

 Dans son livre « La mort de la mort », (JC Lattès, 2011), Laurent Alexandre, chirurgien et urologue de formation, fondateur de Doctissimo, décrit parfaitement cette évolution. Il dresse un panorama complet des progrès technologiques en cours dans les nanotechnologies, la thérapie génique, le clonage thérapeutique, la médecine régénératrice, la lutte contre le vieillissement, la biotechnologie de synthèse, les nanorobots, l'intelligence artificielle, technologies qu'il regroupe sous l'acronyme de NBIC (Nanotechnologies, Biotechnologies, technologies de l'Information, sciences Cognitives).  Grâce aux nanotechnologies, on sera capable de placer dans notre corps des nanomoteurs, nanoimplants, nanocapteurs afin de « reprogammer » des organes. Par les biotechnologies, il sera possible de changer l'ADN, de réparer des organes et des cellules, de créer des organes artificiels. Les calculateurs de plus en plus puissants permettront de séquencer l'intégralité du génome en moins de quatre heures. Enfin les sciences du cerveau et l'intelligence artificielle permettront d'interfacer nos cellules et même nos neurones avec des microcomposants électroniques. Pour Laurent Alexandre, la médecine est donc sur le point de connaître une triple révolution : celle de l'électronique et de la robotique, celle de l'ingénierie du vivant et celle de la nanomédecine qui, combinées, allongeront la durée de vie de l'homme dans des proportions que nous n'évaluons pas encore.

 Le parallèle avec l'univers de l'entreprise et le lightfootprint saute aux yeux. Nous sommes entrés dans une nouvelle révolution technologique qui bouleverse les connaissances anciennes, nos modes de pensée et d'organisation, et qui va modifier en profondeur non seulement la stratégie mais la nature même des entreprises, les transformant en « objets » nouveaux. La grande question est celle de la façon dont l'homme va évoluer dans cet univers, le rôle qu'il jouera, la maîtrise qu'il sera en mesure de conserver face à ces transformations et les valeurs qu'il saura ou non préserver et cultiver. Si l'on ne meurt plus, comment vivra-t-on ? 

 

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Commentaires 2
à écrit le 30/09/2013 à 10:19
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Fascinant... Mais sans la mort, quel sens donner à sa vie ?

à écrit le 29/09/2013 à 12:52
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C'est très séduisant, on désire tous à un moment donné la puissance, Mais quid de l'homme? de l'ontologie (sens philosophique) , quid de notre possibilité de devenir, en toute liberté...? D'autre part, cette volonté de tout vouloir programmer , de to...

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