Sanofi pénalisé par l'éventualité du déremboursement du Multaq

Les autorités de santé françaises réévaluent le médicament, suspecté d'effets indésirables. Si le laboratoire ne sera auditionné qu'en juin, le marché a d'ores et déjà sanctionneé le titre.
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Décidément, le Multaq ne réussit pas à Sanofi. A peine plus de six mois après sa commercialisation en France, ce médicament contre les troubles du coeur revient sous les fourches Caudines des autorités de santé. La Commission de la transparence, chargée d'évaluer l'intérêt médical des médicaments, a rendu fin avril un "projet d'avis" défavorable : le "service médical rendu" (SMR) par le Multaq serait "insuffisant", selon des sources concordantes.

Pour Sanofi, l'enjeu est de taille : "d'après les textes réglementaires, un SMR insuffisant conduit au déremboursement", souligne un connaisseur du secteur. Commercialisé en France depuis octobre 2010, le Multaq est remboursé au taux maximal de la Sécurité sociale, à 65%. En six mois, d'octobre à mars, il a rapporté 4,5 millions d'euros à son fabricant dans l'Hexagone. Et coûté 3,7 millions à la Sécurité sociale.

Mais pour Sanofi, c'est un "blockbuster" (médicament de plus d'un milliard d'euros de ventes) potentiel, dans un contexte de perte massive des brevets de ses produits historiques. Vendu aux États-Unis et dans plusieurs pays d'Europe, il a rapporté 172 millions d'euros au labo en 2010.

De quoi donc inquiéter les investisseurs. En Bourse, la valeur a subi des dégagements. En baisse dès l'ouverture, le titre a perdu 1,28 % à 54,04 euros. Depuis le début de l'année, la valeur, qui se négocie 8 fois les bénéfices estimés pour 2011 par le consensus Factset, avance encore de 12,94 %.

Mises en garde

La réévaluation fait suite à deux cas d'insuffisance hépatique aiguë, rapportés en janvier chez des patientes traitées au Multaq aux Etats-Unis et en Allemagne, sans qu'un lien de causalité ait pu être établi. Sanofi avait alors ajouté des mises en garde dans la notice du produit. Le Multaq fait toujours l'objet d'une réévaluation de son profil bénéfice/risque par l'Agence européenne du médicament.

Tout n'est pas joué pour l'industriel. "Nous sommes en phase contradictoire, la firme peut contester notre décision. L'avis définitif ne sera rendu qu'après son audition", précise Gilles Bouvenot, président de la Commission de la transparence. Elle aura lieu le 8 juin, selon l'agence spécialisée APM. Mais l'affaire Mediator ne joue pas en faveur de Sanofi.

"En six mois, la donne a radicalement changé. La pression sur l'évaluation des médicaments est énorme, de même que la suspicion entourant tout industriel français qui obtiendrait une décision considérée comme une faveur", glisse un proche de la Commission. D'autant que l'histoire du Multaq est déjà très chaotique. Après avoir estimé en mars 2010 qu'il n'apportait pas de progrès thérapeutique, la Commission de la transparence avait accordé, en juin, un avis favorable au remboursement du médicament, à la suite de l'audition de Sanofi.

Une fois rendu l'avis de la Commission, le ministère de la Santé décidera de dérembourser, ou pas, le Multaq. "Le délai d'application est à la discrétion du ministre. Mais il est plus facile de dérembourser un produit en début de vie, totalisant encore peu de ventes", rappelle un expert.

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