Trois des plus importantes institutions de réflexion sur le management et l'entreprise viennent de publier un épais rapport visant à refonder la formation des futurs managers à la lumière du séisme qu'a constitué la crise financière et des changements profonds qui bouleversent l'organisation des entreprises. L'Institut de l'Entreprise, présidé par Michel Pebereau, le Cercle de l'Entreprise et du Management, dirigé par Jean-Pierre Helfer, et la Fondation nationale pour l'enseignement de la gestion des entreprises, animée par Miche Bon, relancent le débat que latribune.fr avait initié l'an passé en publiant des contributions de plusieurs patrons de grandes écoles de management qui tous voulaient revoir le contenu de leurs enseignements.

Aujourd'hui, c'est le monde des entreprises qui prend le relais. Le groupe de travail réuni par les trois institutions accuse. « La réputation des business schools n'est pas sortie indemne du vaste processus de remise en question qui a accompagné la crise financière. Crédités d'un formatage massif de leurs étudiants, qui aurait conduit ces derniers à appliquer de manière univoque et irréfléchie des modèles préconçus à une réalité économique complexe, les établissements d'enseignement supérieur de gestion se sont même vus accusés d'avoir formé les responsables de la crise ».

Mais les écoles doivent également répondre aux défis des changements du management des entreprises. Il faut « élargir l'horizon de cette réflexion au-delà du cadre de la crise actuelle.
En effet, c'est précisément parce que le rôle du manager a largement évolué ces dernières années (...) les changements organisationnels profonds intervenus au cours des dernières décennies au sein des entreprises (arasement des pyramides hiérarchiques, fonctionnement en mode projet, etc.) ont de fait considérablement fait évoluer la fonction de manager », souligne le rapport.

Pour ces deux raisons, il souhaite revoir de larges pans de l'enseignement. Il plaide vigoureusement pour que les écoles « accordent une plus grande place à la culture générale et introduire davantage d'éthique dans les cursus proposés » pour développer chez les jeunes gens qui fréquentent les écoles de management « un sens des repères, un mélange subtil d'obéissance et d'esprit critique, un sens affirmé de l'écoute et du dialogue, ainsi qu'une conscience claire de son impact sur la collectivité, de ses responsabilités et de ses devoirs ». Vaste programme, comme dirait le Général De Gaulle. Pour y parvenir, le rapport propose de revoir les enseignements théoriques et d'introduire de l'éthique dans les cursus.

Sur le premier point, le groupe de travail avance cinq propositions. D'abord, renforcer la transversalité des enseignements en développant chez les étudiants des dispositifs, par exemple des évaluations, qui permettent de « transcender le cadre disciplinaire ». Ensuite, classiquement, le rapport veut promouvoir la culture générale pour que les jeunes comprennent mieux leur environnement professionnel. Cela devrait, troisième piste avancée, « favoriser l'esprit critique », notamment en instaurant dans les cursus une « expérience de recherche ». Ensuite, la formation des futurs managers devrait comprendre un volet communication et enfin, les écoles devraient repenser les enseignements relevant du « savoir-être ».

Deuxième volet, plus mince, le groupe de travail propose de poser « les fondements d'une éthique managériale ». Les écoles devront apprendre à leurs élèves à distinguer l'éthique et le respect des règles, notamment les déontologies professionnelles. Tandis que l'éthique devrait être incluse dans l'ensemble des enseignements. Loin d'être des v?ux pieux, ces propositions sont déjà en discussions dans certaines écoles. Les réformes ne devraient pas tarder.