Collomb défend sa politique d'asile face aux critiques

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(Crédits : Benoit Tessier)

PARIS (Reuters) - Le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, a défendu lundi sa "politique de raison" face aux 95.000 demandes d'asile reçues cette année en France, justifiant la hausse des expulsions et des contrôles malgré des critiques de plus en plus vives.

Un collectif d'associations comptant notamment la Cimade, Emmaüs et la Fondation Abbé Pierre a saisi lundi le Défenseur des droits, Jacques Toubon, pour que les dernières directives du gouvernement "portant gravement atteinte aux droits fondamentaux" des étrangers soient suspendues, a annoncé une porte-parole de la fédération des acteurs de la solidarité.

Jacques Toubon a annoncé lundi sur France Inter avoir envoyé une "série d'observations" au ministre de l'Intérieur.

"Ce que le gouvernement veut, c'est davantage d'expulsions : que les personnes qui n'ont pas de titre puissent être éloignés plus réellement et rapidement (...) La situation des personnes vulnérables n'est pas [prise en compte]", a-t-il déclaré.

"Les personnes qui n'ont pas de titre pourraient être enfermées dans des centres (...) : c'est un changement complet de notre politique", a-t-il estimé.

Les députés français ont adopté la semaine dernière une proposition de loi autorisant la rétention des migrants relevant du règlement européen dit Dublin III soupçonnés de vouloir échapper à une décision d'expulsion.

En 2016, sur les 85.000 demandes d'asile déposées auprès de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra), environ un quart ont abouti, selon les statistiques du ministère de l'Intérieur.

Au micro de RTL en ce lundi journée internationale des migrants, Gérard Collomb a justifié pour sa part l'envoi d'"équipes mobiles" pour étudier la situation des migrants dans les centres d'hébergement d'urgence et le cas échéant, leur expulsion, décidé dans une récente circulaire.

Ces équipes seront constituées de personnel administratif des préfectures et de l'Office français de l'immigration et de intégration (Ofii), a-t-il précisé.

"Aujourd'hui c'est à peu près 103.000 personnes qui sont dans ces centres, dont, parce qu'on n'arrive plus à les loger, 50.000 à l'hôtel et quelquefois ils sont à l'hôtel depuis 15 ans, ce n'est pas normal évidemment", a-t-il déclaré.

SITUATION "EXPLOSIVE"

Auteur de plusieurs circulaires invitant les préfectures à accélérer les expulsions des déboutés du droit d'asile, le ministre de l'Intérieur s'est félicité d'une hausse de 14% de ces expulsions sur les onze premiers mois de l'année.

Il a défendu en outre un alignement du droit français sur celui d'autres pays européens dans le projet de loi immigration et asile en préparation, qui prévoit de doubler la durée de rétention maximale des migrants actuellement fixé à 45 jours.

"Nous allons nous aligner dans la loi sur tout, comme les pays européens le font, c'est-à-dire par exemple notre droit nous allons aligner sur celui de l'Allemagne", a-t-il déclaré. "La moyenne européenne est de 90 jours et quelquefois (le temps de rétention) est du double", a-t-il ajouté.

"La situation aujourd'hui, vous le voyez sur Paris, est totalement explosive, parce qu'on n'arrive plus à gérer un système qui a sa propre logique", a-t-il ajouté.

Dressant un constat d'urgence, plusieurs édiles de grandes villes dont Alain Juppé et Martine Aubry ont tiré samedi la sonnette d'alarme quant à la nécessité de moyens plus importants de l'Etat pour accueillir les migrants, dans une tribune publiée dans le journal Le Monde.

"Nous sommes au pied du mur. L'Etat, qui - rappelons-le - est en responsabilité pleine et entière sur la mise en œuvre de la politique migratoire et de l'accueil des migrants, mais aussi de celles de l'hébergement et du traitement des dossiers de demande d'asile, doit faire plus que reconnaître la gravité de la situation actuelle", déclaraient-ils.

(Julie Carriat, édité par Yves Clarisse)