Les mesures d'urgence "Gilets jaunes" prennent corps

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Le budget remanie pour les gilets jaunes adopte a l'assemblee[reuters.com]
(Crédits : Philippe Wojazer)

PARIS (Reuters) - Les mesures d'urgence décidées par Emmanuel Macron face à la crise des "Gilets jaunes" ont commencé à prendre corps mercredi avec l'adoption d'un projet de budget révisé à l'Assemblée nationale et la présentation d'un projet de loi ad hoc.

Les quelque 10 milliards d'euros consentis dans l'espoir de dissiper les colères feront déraper le déficit public au-delà de la limite européenne, à 3,2% du produit intérieur brut en 2019. Cette entorse temporaire est nécessaire selon l'exécutif pour pouvoir continuer à réformer le pays.

Pour limiter le dérapage, les entreprises seront notamment mises à contribution, avec un report d'un an de la diminution du taux de l'impôt sur les sociétés (IS) de 33% à 31% pour celles dont le chiffre d'affaires dépasse 250 millions d'euros.

Le déficit de l'Etat devrait atteindre 107,5 milliards d'euros l'an prochain, soit 8,5 milliards de plus que ne le prévoyait le projet de budget voté en première lecture à l'Assemblée, a précisé le ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, devant les députés.

Comme l'exécutif s'était engagé à le faire, le projet de loi de finances pour 2019 adopté en nouvelle lecture annule la hausse de la taxe carbone, la convergence de la fiscalité du diesel et de l'essence et maintient un avantage fiscal des entreprises sur le gazole non routier.

Il intègre les mesures annoncées mi-novembre sur le chèque énergie et la prime de conversion automobile, après une suppression-confirmation express mardi.

Les députés ont également débloqué les crédits destinés à financer la hausse de la prime d'activité à compter du 5 février, ce qui permettra la revalorisation des salaires proches du smic, dont les modalités seront fixées par décret.

"SENTIMENT DE COLÈRE LÉGITIME"

Le projet de loi "mesures d'urgence économique et sociale" présenté mercredi au conseil des ministres complète la mise en oeuvre des promesses présidentielles.

"Il convient d'accélérer encore afin de répondre plus rapidement au sentiment de colère légitime, doublé d'un sentiment d'injustice", lit-on dans le compte rendu du conseil.

Le texte prévoit que les entreprises pourront verser d'ici à fin mars à leurs salariés touchant jusqu'à 3.600 euros par mois une prime exonérée - jusqu'à 1.000 euros - de toutes charges sociales et d'impôt sur le revenu.

Grâce à lui, les salariés et les fonctionnaires effectuant des heures supplémentaires ne paieront ni cotisations salariales, ni impôt sur le revenu sur ces dernières à partir du 1er janvier.

Selon le compte rendu du conseil, cette mesure permettra un gain de pouvoir d'achat annuel d'environ 500 euros pour un salarié rémunéré 1.500 euros net et réalisant un nombre d'heures supplémentaires égal à la moyenne observée.

Le projet de loi rétablit à compter du 1er janvier le taux de contribution sociale généralisée (CSG) de 6,6% "pour la moitié des retraités concernés en 2018 par la hausse de CSG de 1,7 point, soit 3,8 millions de foyers et 5 millions de retraités".

Il s'agit des retraités dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 22.580 euros (34.636 euros pour un couple), soit un revenu correspondant à la perception d'une pension de 2.000 euros pour un retraité célibataire et sans autre revenu.

"Compte tenu des délais nécessaires pour mettre en oeuvre la mesure, la CSG continuera au cours des premiers mois de l'année à être prélevée au taux de 8,3%. Le trop-perçu donnera lieu à remboursement dès la mise en place de la mesure et au plus tard le 1er juillet 2019", précise le compte rendu du conseil.

Selon l'Insee, les mesures annoncées par Emmanuel Macron, combinées au ralentissement de l'inflation, pourraient se traduire par une hausse de 0,5% du pouvoir d'achat des ménages au premier trimestre 2019, avant +0,2% au deuxième, des estimations susceptibles de varier selon leur date d'entrée en vigueur.

Entre l'élan de la fin d'année 2018 et l'effet de ces mesures, l'acquis de croissance du pouvoir d'achat à la mi-juin - c'est-à-dire son évolution si sa progression était nulle sur la deuxième partie de l'année - atteindrait 2,0% à fin juin.

(Myriam Rivet et Jean-Baptiste Vey, édité par Yves Clarisse)