Pékin s'abstiendra de toute dévaluation compétitive, assure Li

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Chine: difficile de maintenir une croissance reguliere, dit keqiang[reuters.com]
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par Kevin Yao

TIANJIN, Chine (Reuters) - La Chine s'abstiendra de toute dévaluation compétitive, a assuré mercredi le Premier ministre Li Keqiang quelques heures après une nouvelle escalade dans le conflit commercial entre Pékin et Washington.

Dans son discours prononcé devant le Forum économique mondial de Tianjin, il n'a pas cité le différend avec les Etats-Unis mais a dit que l'idée d'un affaiblissement délibéré du yuan était "sans fondement."

"Une dépréciation à sens unique du yuan aurait plus d'inconvénients que d'avantages pour la Chine", a-t-il affirmé. "La Chine ne s'engagera jamais sur la voie d'une dépréciation du yuan pour stimuler ses exportations."

Le Premier ministre a enchaîné avec un plaidoyer en faveur du libre-échange, en soulignant que des actions commerciales unilatérales ne régleraient pas les problèmes.

Ses propos ont entraîné une hausse du yuan, qui a perdu environ 9% de sa valeur depuis la mi-avril en raison des frictions commerciales.

Mardi, Pékin a annoncé de nouveaux droits de douane sur 60 milliards de dollars (51 milliards d'euros) d'importations américaines à compter du 24 septembre en réponse à la décision de Donald Trump de taxer 200 milliards de dollars d'importations chinoises, également à partir de lundi prochain.

A ce stade, les Etats-Unis ont taxé 50 milliards de dollars de produits chinois pour pousser Pékin à modifier ses pratiques commerciales, et la Chine a riposté avec des mesures de même ampleur.

UNE CROISSANCE SOUS 6% ?

Les nouveaux tarifs douaniers appliqués par les Etats-Unis seront de 10% dans un premier temps avant de passer à 25% d'ici la fin de l'année.

Le maintien d'une croissance régulière est de plus en plus difficile dans un environnement extérieur marqué par des changements importants, a reconnu Li Keqiang dans son discours à Tianjin, tout en ajoutant que le pouvoir n'aurait pas recours à des mesures de relance massives.

Le pays dispose de nombreux instruments politiques pour faire face aux difficultés et il maintiendra une politique macroéconomique stable, a-t-il dit.

Les économistes de Bank of America Merrill Lynch prévoient un ralentissement de 0,5 point de la croissance chinoise à 6,1% l'an prochain.

Ceux d'Oxford Economics estiment qu'elle pourrait passer sous 6% et disent ne pas croire à un apaisement rapide de la situation.

"Mais la probabilité d'une désescalade augmentera avec le temps car l'impact croissant sur l'économie américaine rendra le camp Trump moins combatif, et la Chine comprendra de son côté qu'il lui sera difficile de s'intégrer davantage dans l'économie mondiale sans quelques concessions touchant à son modèle économique spécifique", écrivent-ils dans une note.

Les marchés ont accueilli avec soulagement les dernières mesures qui étaient moins sévères que ce que beaucoup redoutaient. Les Bourses asiatiques ont réagi à la hausse mercredi, suivies des places européennes, et les rendements des Treasuries ont atteint des plus hauts de quatre mois.

L'indice CSI300 index de la Bourse de Shenzhen a progressé de 1,32% à 3.312,48 points et le composite de Shanghai s'est adjugé 1,14% à 2.730,85, en hausse pour la deuxième séance consécutive.

Si le Premier ministre n'a pas nommément cité les Etats-Unis dans son discours, la presse officielle chinoise s'est chargée de dénoncer les "mesures extrêmes" prises par l'administration Trump, selon l'expression employée par le Quotidien du Peuple.

"Pour faire face à la guerre commerciale, ce que la Chine devrait vraiment faire, c'est se concentrer et faire bien ses propres affaires", écrit l'organe officiel du Parti communiste dans un article en première page de son édition étrangère.

"La Chine ne craint pas que les contre-mesures commerciales américaines renchérissent trop les prix des produits de base, mais elle les utilisera au contraire comme une opportunité pour repositionner ses importations, (...) ou développer une fabrication avancée orientée vers l'exportation".

Le tabloïd Global Times, qui est affilié au Quotidien du peuple, estime pour sa part que la guerre commerciale peut être une opportunité pour développer la visibilité des marchés financiers chinois à l'international. La Chine pourrait ouvrir davantage son marché des actions A aux sociétés occidentales pour qu'elles puissent s'y faire coter, ajoute-t-il.

(avec Brenda Goh à Shanghai ; Danielle Rouquié et Véronique Tison pour le service français, édité par Blandine Hénault)