Coronavirus : Le Japon met en place son état d'urgence sur fond de tensions politiques

reuters.com  |   |  617  mots
Coronavirus: le japon met en place son etat d'urgence sur fond de tensions politiques[reuters.com]
(Crédits : Issei Kato)

par Linda Sieg et Elaine Lies

TOKYO (Reuters) - La métropole de Tokyo a recommandé vendredi la fermeture de certains commerces et les dirigeants de Kyoto ont demandé aux touristes de ne pas venir dans l'ancienne capitale impériale alors que le Japon met difficilement en place l'état d'urgence partiel décrété par le gouvernement, accusé par certains d'agir trop timidement et trop tard pour éviter une propagation du nouveau coronavirus à travers le pays.

La gouverneure de Tokyo, Yuriko Koike, a fini par établir une liste de commerces priés de fermer à partir de samedi et jusqu'au 6 mai après avoir surmonté ses différends avec les conseillers du Premier ministre Shinzo Abe sur l'étendue de ces fermetures.

Yuriko Koike souhaitait agir plus rapidement mais Shinzo Abe a refusé toute mesure susceptible d'accroître les difficultés d'une économie japonaise déjà au bord de la récession, alimentant les accusations selon lesquelles son gouvernement privilégie l'intérêt des entreprises sur les vies humaines.

"Ce sera dur pour les habitants mais si nous agissons rapidement, la douleur sera de courte durée et l'épidémie sera vite contenue", a déclaré la gouverneure vendredi lors d'une réunion du comité ad hoc mis en place pour gérer ces mesures.

Parmi les commerces concernés, les salles de jeux vidéo et les cafés internet sont priés de fermer tandis que les restaurants doivent réduire leurs horaires d'ouverture. Les grands magasins, les commerces d'ameublement et les coiffeurs sont exemptés, ce qui constitue une concession vis-à-vis du gouvernement.

"UNE CADRE INTERMÉDIAIRE"

Shinzo Abe a décrété l'état d'urgence mardi pour Tokyo et six autres préfectures mais le détail des mesures et le calendrier de leur mise en oeuvre dans la capitale ont fait l'objet d'intenses tractations.

"Je pensais que les gouverneurs auraient l'autorité d'un PDG mais (...) j'ai davantage l'impression d'être une cadre intermédiaire", a dit Yuriko Koike à la presse pour témoigner de sa frustration face aux pressions exercées par le gouvernement.

Shinzo Abe a décidé de réagir face à la récente augmentation du nombre de cas de contamination au coronavirus à Tokyo, qui fait craindre l'imminence d'une flambée épidémique au Japon similaire à celle que connaissent de nombreux autres pays dans le monde.

La capitale a fait état vendredi de plus de 185 nouveaux cas, selon NHK, ce qui porterait son total à environ 1.800 sur les quelque 5.700 cas répertoriés dans l'ensemble du pays, qui compte plus de 100 morts.

Des préfectures qui ne sont pas concernées par l'état d'urgence prennent aussi des mesures. Le gouverneur d'Aichi, poumon industriel du Japon avec notamment le siège de Toyota, a décrété vendredi son propre état d'urgence et a demandé à ce que sa région soit ajoutée à la liste gouvernementale.

La préfecture de Gifu, dans le centre du pays, s'apprête à faire de même, selon les médias nippons.

Le maire de Kyoto et le gouverneur de la préfecture ont aussi demandé l'inclusion de la région dans l'état d'urgence et ils ont exhorté les touristes à ne pas se rendre dans les célèbres palais, temples et jardins de l'ancienne cité impériale.

"J'appelle tous les amoureux de Kyoto et les touristes du monde entier, jusqu'à ce que la situation soit terminée, à vous protéger vous et vos familles, s'il vous plaît abstenez-vous de visiter Kyoto", a dit le maire Daisaku Kadokawa lors d'une conférence de presse.

(Yoshifumi Takemoto, Chris Gallagher, Ju-min Park et Sam Nussey; version française Bertrand Boucey, édité par Henri-Pierre André)