En France, la hausse des prix s'accélère. Portée par une nette croissance des tarifs des produits manufacturés, des hydrocarbures et de l'alimentation, l'inflation a dépassé la barre des 4%, sur un an, en mars. Après avoir atteint 3,6% sur un an, en février, l'inflation connait donc une forte progression.
En cause, les goulots d'étranglements dans les circuits de production à cause de la reprise après la pandémie. Mais aussi et surtout, ces dernières semaines, à cause du conflit en Ukraine. C'est bien la guerre qui accélère l'envol des prix.
Une inflation qui se propage en Europe
Et toute l'Europe en subit les conséquences : en Allemagne, l'inflation atteint 7,3%, du jamais vu depuis la réunification. En Espagne, la flambée des étiquettes est encore plus marquée en mars : 9,8% soit la plus forte hausse depuis 37 ans, et une progression de deux points par rapport à février.
Si l'inflation progresse en France, notre pays reste relativement protégé pour le moment. La première raison tient à l'action du gouvernement. La mise en place du chèque inflation, du bouclier tarifaire sur le gaz et l'électricité ont permis de pondérer l'impact sur les ménages français. Selon l'Insee, sans l'action gouvernementale, l'inflation en France aurait atteint 6% sur un an en mars.
A LIRE AUSSI | La flambée du prix du gaz pousse l'Etat à prolonger le bouclier tarifaire de six mois
Tous les pays européens ont pris des mesures mais pas dans des proportions aussi élevées qu'en France. Alors que le gouvernement se défend de recourir de nouveau au quoi qu'il en coute, il a largement ouvert le chéquier pour aider les Français à faire face à ces hausses. Demain, vendredi 1er avril, il appliquera une remise de 15 à 18 centimes d'euros sur le litre de carburant. Au total, depuis l'automne, il a dépensé entre 22 et 26 milliards d'euros.
Ces décisions sont évidemment liées au contexte politique. A quelques jours de l'élection présidentielle, l'exécutif veut éviter toute manifestation sociale qui pourrait peser sur le scrutin. C'est pourquoi, outre les automobilistes, il a aussi apporté, ce mois de mars, des aides aux agriculteurs, pêcheurs, routiers qui ont manifesté leur inquiétude et mécontentement face à l'envolée des prix des carburants.
Autre élément qui protège la France : son mix énergétique. Le nucléaire représente 40% de son bouquet énergétique. Le pétrole, 28% ; le gaz naturel 16%; et 14% d'énergies renouvelables. Par ailleurs, l'Hexagone achète 17% de son gaz à la Russie. Alors que nos voisins allemands, qui ont renoncé au nucléaire, sont beaucoup plus dépendants des hydrocarbures russes. Elle n'a pas d'autre choix que de s'appuyer sur le gaz naturel et le charbon.
Une inflation prévue pour durer et progresser
Enfin dernier élément d'explication, la France continue à avoir des salaires qui sont en moyenne plus bas qu'en Allemagne, par exemple. Et pour l'heure, les tensions de recrutement ne renversent pas la tendance. L'augmentation des salaires - entre 2,5 et 3 % cette année -, reste, pour l'heure, en deçà de l'inflation. "Il y a moins de hausses de salaires et donc de transmissions sur les prix", résume Mathieu Plane, directeur adjoint de l'OFCE.
Reste à savoir si la France pourra très longtemps rester en marge de ces fortes hausses. Et ce, alors que les prix des matières premières et des carburants promettent de progresser encore, surtout si le conflit en Ukraine s'enlise et si l'épidémie de Covid repart. Hier, Christine Lagarde, la patronne de la banque centrale européenne, a reconnu que l'inflation dans la zone euro allait "durer", et que le phénomène n'était pas temporaire mais allait durer.