À l'Elysée, le président Macron ne cesse de multiplier les dîners « secrets » depuis deux mois. Edouard Philippe début mars, Philippe De Villiers début avril... Pas vraiment des fans du chef de l'Etat ! Mais à un an de la présidentielle, Emmanuel Macron cherche surtout à consolider ses soutiens à droite. Il a ainsi dîné récemment avec de grands élus LR, comme Hubert Falco, le maire de Toulon, ou Christian Estrosi, le maire de Nice.
République monarchique oblige, la valse des courtisans continue donc autour du Roi.
C'est qu'Emmanuel Macron, seul en son château élyséen, a besoin de renouveler son équipe dans l'optique de 2022. Sa majorité est exsangue. Tout au long du quinquennat, la presse a raillé les « amateurs » et « les apprentis » au pouvoir, pointant le manque d'expérience politique des députés, ministres, ou de leurs collaborateurs. « Macron a prouvé qu'il était un très mauvais manager. Il préside seul. Et ces derniers temps, il est plus que jamais seul », critique un partisan déçu.
Alors pour mieux rebondir, Emmanuel Macron déploie de nouveau ses talents de séducteur, et pas uniquement à droite... C'est ainsi qu'il a invité Julien Dray à dîner à l'Elysée il y a un mois environ. Depuis le début du quinquennat, les contact entre les deux hommes était pourtant particulièrement parcellaires. Quelques SMS de courtoisie tout au plus. Le socialiste avait pourtant « couvé » Emmanuel Macron quand il était ministre à Bercy, devenant presque son coach en politique.
À l'époque, « Juju » avait à toute heure « Manu » au téléphone. L'ancien trotskiste trouvait alors au ministre de l'Economie toutes les qualités. Le cofondateur de SOS Racisme était bluffé par les débuts en politique de celui qui n'avait pas encore quarante ans. Bluffé mais lucide. Ainsi, celui qui a inspiré le personnage du Baron noir dans la série télévisée n'a guère apprécié la manière qu'a eu son protégé d'alors de jouer en solo à la dernière présidentielle, fomentant sa candidature derrière le dos de son copain François Hollande.
Et pourtant, Dray a accepté le dîner. Car ce chantre historique de l'unité de la gauche craint par dessus tout l'arrivée potentielle de Marine Le Pen en 2022. Et au vu des dernières polémiques, celui qui se définit comme un républicain est lassé par les réflexes minoritaires d'un Jean-Luc Mélenchon ou des chamailleries de ses camarades du PS. Alors, une fois n'est pas coutume, l'homme pourrait se laisser tenter par une aventure hors de « sa » gauche. Mais rien n'est décidé. Dray réfléchit. Pourrait-il apporter son aide à ce jeune président et lui permettre de faire coup double alors même qu'il a renié une bonne partie de ses promesses de gauche, préférant présider à droite toute ?
2022, qui sera le Faiseur de Roi ?
En attendant, c'est bien à droite et au centre qu'on essaye de jouer des coudes pour proposer la dream team de ses rêves à l'actuel président. Chacun espère sortir gagnant d'une stratégie de coalition qu'Emmanuel Macron pourrait constituer autour de sa candidature, à la façon allemande ou italienne. À ce petit jeu, François Bayrou compte bien mettre d'accord tout le monde en rappelant, qu'en 2017, c'est bien lui qui avait proposé un tel accord à Macron, et qu'il avait été alors le faiseur de Roi.
Car son rival de toujours, Nicolas Sarkozy, pourrait également être tenté de proposer un accord de gouvernement au futur candidat Macron. À l'image de l'équipe Castex, l'ancien président se voit bien en super DRH d'une macronie renouvelée (et à droite). À moins qu'il choisisse finalement de soutenir Xavier Bertrand : « Tout dépendra si Macron est faible, ou trop faible », décrypte un sarkozyste. L'enjeu ? Emmanuel Macron a-t-il encore la capacité de rassembler les Français en cas de qualification au second tour de la présidentielle ? Reste-t-il un rempart à l'extrême droite ?
De son côté, Xavier Bertrand a surpris tout le monde en se déclarant candidat à la présidentielle avant même les élections régionales, alors qu'il se représente à la tête de la région des Hauts-de-France. Ce pari pourrait lui permettre en tout cas de démontrer à tous qu'il constitue un meilleur rempart à Marine Le Pen. Ce scénario ne semble pour l'instant ne pas inquiéter la garde rapprochée d'Emmanuel Macron : « Les macronistes sont assez sûrs d'eux. Ils pensent qu'il n'y a personne de sérieux en face d'eux. Personne dans leur rang ne croit à Bertrand. Ce dernier pourrait pourtant profiter du tout sauf Le Pen et tout sauf Macron », remarque un conseiller du soir du Château.
Les macronistes ne devraient d'ailleurs pas oublier une donnée : depuis 2017, s'il y a bien eu des déçus à l'égard du macronisme, on en trouve une bonne part parmi les chiraquiens. Ceux là même qui s'étaient engagés derrière François Hollande en 2012 contre un certain Nicolas Sarkozy. On comprend mieux pourquoi Emmanuel Macron pourrait avoir besoin qu'un « Baron Noir » vienne à son aide pour 2022...