Avec les progrès de la science, la retraite à 72 ans à l'horizon 2070 ?

Et si les progrès de la génétique permettaient de stopper le vieillissement du corps, repoussant de manière naturelle l’âge de départ à la retraite ? C’est la théorie détonante du cabinet Astérès qui a compilé les dernières publications scientifiques sur l’espérance de vie. Ainsi, grâce à de nouveaux traitements capables d’« inverser le processus de vieillissement », le corps rajeuni serait encore apte à travailler facilement. Mais d’autres études remettent sérieusement en doute cette théorie du bien vivre longtemps. La question de la pénibilité d’une tâche reste aussi difficile à quantifier pour chaque individu.
« Un traitement anti-vieillesse sûr sera disponible », affirme plusieurs chercheurs cités par le cabinet Astérès.
« Un traitement anti-vieillesse sûr sera disponible », affirme plusieurs chercheurs cités par le cabinet Astérès. (Crédits : Rocketclips)

Alors que les débats font rage en France autour du relèvement de l'âge de départ à la retraite à 64 ans et sur l'allongement de la durée de cotisation, il existerait, du point de vue de la science, un tout autre scénario. « Si les recherches sur la lutte contre le vieillissement tiennent leurs promesses, en 2070, l'âge de départ à la retraite pourrait être porté à 72 ans », pronostique ainsi dans une récente note le cabinet d'études Astérès. Celui-ci s'appuie sur les dernières recherches scientifiques qui anticipent un allongement de l'espérance de vie, jusqu'à +41%, suite à des tests menés sur des animaux en laboratoires. Ainsi, - selon une projection très optimiste du cabinet -, les maladies liées à la vieillesse (tumeurs, maladies endocriniennes, du système nerveux, cardio-vasculaires, ou de l'appareil digestif) disparaîtront ou, du moins, seront repoussées d'une trentaine d'années.

Dans ce scénario qui semble inspiré d'un film de science-fiction, il faudrait ainsi travailler jusqu'à 72 ans « pour que le ratio cotisants /  retraités soit égal à celui anticipé par le scénario de référence », soit amené à 1,3, le ratio qui aurait été obtenu dans le scénario central de l'Insee avec un départ à la retraite à 64 ans, selon les calculs d'Asterès.

Cette hypothèse de la vieillesse tardive est d'autant plus incongrue qu'actuellement en France, à partir de 70 ans, l'employeur peut, s'il le souhaite, décider de mettre à la retraite d'office un salarié. Autre paradoxe, si partout en Europe la tendance est à l'allongement de la vie de salarié, en 2070, la moyenne européenne demeure toutefois à 67 ans, selon un rapport de la Commission européenne. Dans les deux cas, on est donc encore loin d'envisager 72 ans et plus.

Une certitude toutefois, l'Europe vieillit à vitesse grand V. En 1950, pour une personne âgée de 65 ans, il y avait 11,7 travailleurs actifs. Or, en 2022, ce ratio est tombé à 7 en moyenne dans le monde. Pire, des pays « super âgés » tels que l'Italie, le Japon, la Corée du Sud, vont connaître un fossé « dramatique », prévient une autre étude de McKinsey. Résultat, « le nombre de centenaires en 2070 serait multiplié par 10, déséquilibrant le régime des retraites (...) Pour conserver le ratio actuel, soit 1,722, il faudrait porter l'âge de départ  à la retraite à 78 ans. Ce ratio serait amené à baisser à mesure que la population vieillit », justifie Asterès.

Mais la théorie du vivre longtemps est-elle toujours aussi crédible ? En France, en dehors des effets de la crise Covid, l'espérance de vie est en effet en pleine stagnation, selon l'Insee début 2023. Les hommes gagnent en effet seulement 0,1 an d'espérance de vie et celle des femmes ne progresse pas et baisse de 0,4 an par rapport à 2019, année de référence avec la pandémie.

« Réinitialiser » l'âge du corps

Face à ces tensions sur l'équilibre des comptes des caisses de retraite, une solution émerge pour faire accepter potentiellement de travailler plus longtemps. Selon Asterès, la science prouve en effet qu'il sera possible de « réinitialiser » à multiples reprises l'âge du corps.

« Maladies cardio-neurovasculaires, cancers, maladies neurologiques, diabète de type 2 ou arthrose (...) certains scientifiques pensent pouvoir s'attaquer simultanément à toutes ces maladies et  améliorer significativement l'espérance de vie en bonne santé », justifie le cabinet.

« Asterès fait l'hypothèse que ces expériences (menées sur des animaux) sont transposables aux êtres humains et qu'un traitement anti-vieillesse sûr sera disponible », assume ce cabinet privé qui a notamment indiqué avoir compilé plusieurs publications scientifiques d'un professeur de génétique de Harvard.

Vivre plus longtemps mais...

Mais si on estime que le nombre de seniors (âgés de 65 ans et plus) va doubler en 20250, pour atteindre 1,6 milliard d'individus d'ici 2050, selon les Nations Unies, il n'est pour autant pas certain que tous le soit en parfaite santé. D'autres publications montrent en effet que la vie peut être certes allongée bien au-delà de 80 ans, mais pas forcément en bonne santé; note une étude du cabinet McKinsey de novembre 2022.

Aussi, seuls 9% des hommes nés aujourd'hui et 16% des femmes peuvent espérer atteindre l'âge de la retraite en bonne santé, selon un étude britannique de The Institute for Public Policy Research (IPPR) de 2022. Outre-Manche, l'âge de départ à la retraite a été repoussé à 67 ans en 2028.

En creux, se pose enfin la question de la pénibilité d'un emploi. En France le débat s'enflamme depuis que le gouvernement a refusé de réintégrer dans sa réforme les trois facteurs de pénibilité dits « ergonomiques » (ports de charges lourdes, postures pénibles, vibrations mécaniques) exclus du compte en 2017. Ces critères sont « extrêmement difficiles à mesurer individuellement », a fait valoir le ministre du Travail, Olivier Dussopt. A cela s'ajoute en plus la catégorie dite des « carrières longues » caractérisées par un une entrée très précoce dans la vie active pour un salarié. Le gouvernement tente là aussi de prendre en compte un individu qui aurait sollicité ses capacités jeunes, plutôt qu'un autre qui aurait commencé plus tardivement. Là dessus, la science devra aussi répondre au cas par cas. Face au travail, la ligne de vie d'un actif en bonne santé semble encore aléatoire.

ZOOM : la question du bien vieillir devient un enjeu des organisations

Les débats sur l'âge de départ à la retraite en Europe soulèvent de nouveaux débats autour du « bien vieillir ». Dans une étude publiée en novembre 2022, la branche santé du cabinet de conseil McKinsey (The McKinsey Health Institute) a identifié six changements pour « permettre aux gouvernements, aux entreprises de tous les secteurs, aux organismes sans but lucratif, aux intervenants en santé et en bien-être et aux particuliers d'améliorer le vieillissement en santé ».

D'abord, il faut « investir dans la promotion d'un vieillissement sain ». Par exemple, les pays européens investissent, en moyenne, 2,8 % de leur budget de santé dans la prévention. Si le chemin vers un vieillissement sain commence à l'âge adulte, il y a beaucoup à faire pour les personnes âgées. Il convient de concentrer davantage d'efforts de prévention sur les pathologies liées à l'âge, telles que la démence et les déficiences sensorielles, précise McKinsey. Les cinq autres leviers du bien vieillir sont :« améliorer les mesures de la santé et obtenir de meilleures données, étendre les interventions dont il est prouvé qu'elles favorisent le vieillissement en bonne santé, accélérer l'innovation dans l'écosystème du vieillissement en bonne santé, libérer le potentiel de toutes les industries pour favoriser le vieillissement en santé, et enfin, donner aux personnes âgées les moyens et la motivation nécessaires pour vivre pleinement leur potentiel. »

Lire aussiRetraites : l'économiste Patrick Artus dézingue la réforme du gouvernement

Commentaires 13
à écrit le 11/02/2023 à 13:10
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"Mais si on estime que le nombre de seniors (âgés de 65 ans et plus) va doubler en 20250" Effectivement ça fait loin

à écrit le 11/02/2023 à 9:19
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En 20250 je serai mort depuis longtemps.

à écrit le 10/02/2023 à 16:53
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Avec les générations d'irradiés que nous somme, atteindre 70 ans sera difficile. On le voit déjà sur les nouveau retraité (moins de 10 ans) ils sont très nombreux a déclaré des cancer et on a beaucoup de mort, c'étaient les premier a subir cette irra...

à écrit le 10/02/2023 à 15:15
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"En France, en dehors des effets de la crise Covid, l'espérance de vie est en effet en pleine stagnation, selon l'Insee début 2023." Logique, puisque l’espérance de vie est calculé depuis des années sur la génération des boomers qui effectivement...

à écrit le 10/02/2023 à 14:31
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Bref, l'élixir de Jouvence et la poudre de perlimpinpin ont encore de beaux jours devant eux. Sans parler du transhumanisme, pour rendre immortels les égos surdimensionnés. Il y a des escrocs partout, y compris dans la très honorable profession méd...

à écrit le 10/02/2023 à 13:43
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Tout baser sur la pénibilité de l’emploi, c’est absurde, déjà parce que certaines corporations pesant électoralement vont s’arroger des privilèges, mais surtout nombre de maladies de vieillesse, comme l’arthrose ou le diabète dépendent surtout de la ...

à écrit le 10/02/2023 à 12:41
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Si les réformes se basent toujours sur des prospectives et de mauvaises données, nous serons toujours dans l'erreur a rectifier ! Sortir de "la politique de l'offre" et de ses éternelles publicités est la seule reforme valable !

le 10/02/2023 à 13:42
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aux prochaines élections faudra t il réinitialiser la scène du théâtre de la politique ?

à écrit le 10/02/2023 à 11:56
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La Tribune, c'est Mme Irma.

le 10/02/2023 à 16:56
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où la communication retranscrite de Macron..

à écrit le 10/02/2023 à 11:32
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Si on arrive à vivre en bonne santé jusqu'à 90 ans, on peut partir à la retraite à 67 ans, et ne pas avoir de frais médicaux ultérieurs, ça ça compte aussi dans les calculs, financiers (le nerf de la 'guerre', dit-on). Les exosquelettes dont parlait ...

à écrit le 10/02/2023 à 11:02
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A contrario on peut aussi penser au réchauffement climatique, avec des étés a 50°, une agriculture moribonde (because canicules qui s'emballent, sécheresses et inondations) insuffisante pour nourrir 80 a 100 millions de personnes et les disettes sui...

à écrit le 10/02/2023 à 10:50
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Bonne perspective.bravo! Mais d'abord mettons au point cette fantastique avancée et puis ensuite on discutera du report de l'âge de la retraite de manière plus sereine. Le gouvernement met la charrue avant les boeufs ...et nous prends comme d'habit...

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