Bruno Le Maire : "Mon ambition est que la France soit leader dans les Fintech" - 5/5

ENTRETIEN. Le ministre de l'Économie et des Finances défend le rôle de la finance comme acteur du développement économique en France. La Place de Paris doit être un champion de la Fintech et de la Blockchain. Extrait de l'entretien avec Bruno Le Maire publié dans La Tribune Hebdo du 15 février 2019.
(Crédits : Philippe Wojazer)

LA TRIBUNE - Le risque d'un Brexit dur, sans accord, n'a jamais été aussi grand. Les entreprises françaises sont-elles prêtes ?

BRUNO LE MAIRE - Nous sommes prêts sur le plan financier, ce qui est le plus important. Toutes les décisions ont été prises pour éviter toute difficulté sur les transactions financières. Une dérogation a été accordée pendant un an aux chambres de compensation britanniques [qui réalisent la grande majorité de la compensation des opérations en euros], pour que nos banques puissent continuer à fonctionner correctement au lendemain d'un éventuel Brexit sans accord. D'autres décisions ont été prises pour veiller à la continuité de la protection des contrats d'assurance.

Le sujet de préoccupation numéro un, c'est l'état de préparation des PME : nous avons mis en ligne tous les éléments d'information et un kit des décisions à prendre. Je veux rappeler à toutes nos PME que c'est de leur responsabilité de prendre toutes les dispositions nécessaires pour s'adapter aux risques d'un éventuel Brexit sans accord.

Quel bilan tirez-vous des efforts déployés pour attirer les institutions financières étrangères à Paris ?

Le bilan est très positif : plusieurs milliers d'emplois vont être relocalisés dans l'Hexagone et la France va pouvoir s'affirmer comme une des plus grandes places financières de la planète. La France va ainsi retrouver une partie de son histoire et de sa culture. Je rappelle que la France a une tradition séculaire de puissance financière : c'est une mauvaise compréhension de notre histoire qui a amené certains à stigmatiser la finance en France. La finance a fait les succès politiques de notre nation. Quand François ier gagne à Marignan, c'est grâce à ses soutiens financiers importants. Au xixe siècle, quand nous réussissons notre transformation industrielle, c'est aussi grâce à la présence en France d'un système financier puissant.

La finance reste pourtant souvent critiquée en France...

Je préfère aller contre les opinions communes pour défendre les intérêts français : si nous voulons réussir la révolution technologique - sur l'intelligence artificielle, le stockage des données, les algorithmes, la digitalisation des entreprises et la robotisation - un système financier solide est indispensable. En 2018, l'investissement en capital-risque s'est élevé à 100 milliards de dollars aux États-Unis, 81 milliards de dollars en Chine et 21 milliards en Europe. Ce retard-là se traduit ensuite par des retards de technologie. Soit nous développons le capital-risque en Europe pour financer des projets qui se chiffrent aujourd'hui en milliards d'euros ; soit demain nous serons dépendants des technologies chinoises et américaines.

La question est de savoir quelle finance nous voulons : ce que nous souhaitons c'est une finance responsable, qui se fixe des limites, et une finance verte. Nous devons définir ensemble avec le secteur bancaire des critères objectifs et transparents permettant de savoir quelles sont les banques qui investissent vraiment dans les énergies renouvelables. Cela apporterait une vraie information aux consommateurs : il faut que les épargnants sachent exactement où va leur argent. Les banques ont très bien joué le jeu sur le plafonnement des frais bancaires pour les clients les plus modestes ; je suis certain que nous trouverons un accord sur les indicateurs de finance verte.

Le rapport de la mission « Monnaies virtuelles » du député Pierre Person propose d'aller beaucoup plus loin que le cadre réglementaire et fiscal que vous avez instauré dans la loi Pacte et la loi de finances, afin de « faire de la France une crypto-nation » : est-ce votre ambition ?

Mon ambition est que la France soit leader dans les fintech. Je considère que le cadre que nous mettons en place trouve le bon équilibre entre la liberté nécessaire et la protection des épargnants. Avec ce cadre, les émetteurs d'ICO [levées de fonds en jetons numériques] pourront disposer d'un passeport, un visa délivré par l'Autorité des marchés financiers (AMF), mais ne seront pas obligés de le faire.

Quand j'ai présenté cette régulation à Davos à des investisseurs étrangers, des banquiers, des spécialistes mondiaux de la fintech et des personnalités comme Christine Lagarde [la directrice générale du FMI], ce dispositif a été reconnu par tous comme le plus innovant et le plus adapté au bon développement de la fintech.

Nous pouvons être fiers de la puissance de la fintech française et de son imagination. Je crois profondément dans ces technologies financières. J'organiserai à cet effet le 15 avril prochain à Bercy une grande conférence internationale consacrée à la blockchain et à ses applications pour l'économie, la finance, mais aussi de nombreux usages citoyens. Je pense que la blockchain est une révolution technologique, mais aussi politique qui redéfinit les rapports d'autorité et de confiance, qui va avoir des implications considérables bien au-delà de ce secteur financier. Tant mieux si la France se montre leader dans le monde.

Bercy pourrait-il montrer l'exemple dans ce domaine et être le promoteur de la blockchain dans certaines administrations ?

Nous sommes tout à fait prêts à développer la blockchain, y compris dans le secteur administratif.

RESERVE AUX ABONNES  : retrouvez ci-dessous la suite de l'entretien avec Bruno Le Maire

2/5 - "Nous mettrons à jour en avril nos prévisions de croissance pour 2019"

3/5 - "Sur ADP, ne pas renouveler les erreurs commises lors de la cession des autoroutes"

4/5 - "Taxe Gafa : on ne pourra pas financer les services publics avec la fiscalité du XXe siècle"

5/5 - "Mon ambition est que la France soit leader dans les Fintech"

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Une version intégrale est disponible dans La Tribune hebdo disponible à partir du vendredi 15 février

Commentaires 2
à écrit le 17/02/2019 à 11:00
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A la relecture du titre je m apercois que le titre à ete rectifié mais ce n est pas croyable . Donc je demande l excuse d une mauvaise lecture mais garde pour moi un sourire de connivence . Par contre je maintien le reste .

à écrit le 17/02/2019 à 10:07
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Mr Lemaire est un ministre indépendant il dit je au lieu de nous Sur un autre sujet il veut diminuer les impôts si c est pour augmenter les taxes contraintes c est carrément une déclaration de guerre aux petits retraités .

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