Budget : les pistes explosives du gouvernement pour sabrer dans la dépense publique

Bercy a identifié 10 milliards d'euros d'économies potentielles dans le budget 2024 afin de permettre à la France de redresser ses comptes publics après plusieurs années de crise. L'exécutif a notamment prévu des coupes dans les dépenses d'arrêt maladie, les aides à l'apprentissage, la formation et des niches fiscales sur le carburant.
Grégoire Normand
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire lors de son discours à Bercy pour les Assises des finances publiques.
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire lors de son discours à Bercy pour les Assises des finances publiques. (Crédits : Reuters)

Le gouvernement continue de dérouler son programme de coupes budgétaires. Après l'envoi du programme de stabilité à Bruxelles en avril, l'exécutif a fixé le cap des prochaines années lors des assises des finances publiques organisées ce lundi à Bercy. Accompagnée des ministres de l'Economie Bruno Le Maire et du ministre des Comptes publics Gabriel Attal, la Première ministre Elisabeth Borne est venue conclure cette matinée consacrée à la dépense publique .« Nous devons assumer de devoir faire des économies quand nous constatons que des dispositifs n'atteignent pas leurs résultats ou pas suffisamment », a-t-elle déclaré.

Pressé par le verdict des agences de notation, l'exécutif entend bien montrer qu'il poursuit une politique budgétaire plus restrictive. Mais derrière cette vaste opération de communication, les marges de manoeuvre du gouvernement sont particulièrement étroites.

La cheffe du gouvernement a confirmé qu'elle comptait sur la croissance pour rétablir les finances publiques. Mais la dernière prévision de croissance du PIB de l'Insee pour 2023 (+0,6%) révèle que l'économie tricolore s'est largement essoufflée au fur et à mesure des trimestres depuis l'éclatement de la guerre en Ukraine. Certes, l'inflation permet de réduire le ratio dette sur PIB en améliorant les recettes fiscales, mais les prix de l'alimentaire demeurent encore à un niveau élevé.

Sur le front social, les réformes de l'assurance-chômage et des retraites permettant de faire d'amples économies ces derniers mois ont laissé des séquelles importantes en France. Ces nouvelles coupes pourraient venir alimenter l'exaspération et la défiance des Français à l'égard du président Macron alors qu'ils sortent d'un printemps particulièrement électrique.

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Des coupes dans les arrêts de travail, dans la fiscalité sur logement...

Dans le viseur du gouvernement, figurent notamment les arrêts de travail. Le ministre de l'Economie a évoqué « des dérives ». « Nous avons eu en 2022 8,8 millions d'arrêts maladie en France, contre 6,4 millions dix ans plus tôt. C'est une hausse de plus de 30 %, qui nous a conduit en 2022 à dépenser au total 16 milliards d'euros », a rappelé le locataire de Bercy.

Le gouvernement compte ainsi serrer la vis sur ces dépenses en convoquant les partenaires sociaux, les médecins conseils, la Caisse nationale d'assurance maladie en vue de la préparation du prochain budget de la sécurité sociale pour 2024 (PLFSS). Bruno Le Maire n'a cependant pas évoqué le contexte sanitaire encore très dégradé de l'année 2022. Pourtant, de nombreuses enquêtes depuis 2020 ont documenté la dégradation de la santé des travailleurs dans des secteurs particulièrement exposés aux risques d'infection. Bercy a également évoqué des pistes d'économies dans les dépenses de médicament. Sans surprise, le gouvernement a enfin rappelé la fin du dispositif Pinel et la réforme du prêt à taux zéro « là où il est le plus nécessaire ». Bercy a chiffré les économies réalisées sur ces deux derniers dispositifs à 2 milliards d'euros.

L'apprentissage et le CPF dans le viseur de l'exécutif

Parmi les autres pistes évoquées figurent les aides à l'emploi. Au moment de la pandémie, l'exécutif avait mis en place des aides très importantes pour subventionner l'embauche d'apprentis dans les entreprises du secteur privé. Dans une récente étude très détaillée, l'économiste de l'OFCE et spécialiste des questions de travail Bruno Coquet a dressé un bilan sévère sur le plan budgétaire de cette politique de l'apprentissage depuis la crise sanitaire.

Le chercheur qualifie son coût budgétaire de « nébuleux ». Ces aides massives à l'embauche se sont accompagnées d'une explosion du nombre de centres de formation des apprentis (CFA, multiplié par 4), passant de 954 centres en 2018 à 3.102 en 2023. Face à cette envolée, Bruno Le Maire a estimé qu'il était « possible de réduire le prix des formations payées par l'Etat pour les apprentis, pour compenser certains abus sur les marges ». Il a également évoqué des pistes d'économies sur le compte personnel de formation (CPF).

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Des opérateurs de l'Etat sous surveillance

Les opérateurs de l'Etat vont également devoir se serrer la ceinture. Bercy entend les contraindre à « un retour des règles de bonne gestion budgétaire ». Il s'agit de « limiter leur trésorerie et d'engager une démarche de contractualisation », a précisé Bruno Le Maire. Le ministre de l'Economie a également ouvert l'épineuse question des taxes affectées. Les ressources d'un opérateur « doivent correspondre à ses besoins et ne peuvent constituer des rentes aux frais des contribuables », a poursuivi le ministre des Finances. En revanche, il n'a pas évoqué d'opérateur en particulier lors de son intervention.

Suppression des niches fiscales sur le carburant

Enfin, l'administration fiscale pourrait ainsi mettre fin aux avantages fiscaux sur les carburants dont bénéficient notamment les transporteurs routiers ou les agriculteurs. Ils seront supprimés progressivement d'ici 2030, avec un accompagnement pour les professions concernées. « C'est nécessaire pour mettre nos actions en cohérence avec nos engagements climatiques », a justifié le ministre de l'Economie.

Selon le syndicat agricole FNSEA, « cette mesure fiscale prise dans un objectif budgétaire n'est en aucun cas une réponse adaptée aux enjeux de transition des carburants agricole vers la sortie des énergies fossile ». Le syndicat majoritaire plaide dans un communiqué pour que le coût de la décarbonation soit  « neutre » pour les agriculteurs et demande des « compensations réelles dans chacune des fermes françaises. »

Sur ces sujets explosifs, l'exécutif a promis une mise en oeuvre « progressive d'ici 2030 ». Déjà, lors du premier quinquennat Macron, le gouvernement avait déjà promis de revoir ces dépenses fiscales. Mais il s'était heurté à la fronde des secteurs du BTP et des travaux publics. Face aux craintes, Bruno Le Maire a promis « des mesures de compensation ».

Un principe d'auto-assurance pour les collectivités

L'autre nouveauté annoncée par le gouvernement est l'option d'une auto-assurance pour les collectivités. « Il s'agit d'utiliser les excédents budgétaires des collectivités pour qu'elles puissent se constituer des réserves financières en cas de coups durs », a indiqué Bruno Le Maire. Le ministre a également suggéré la mise en place « d'un haut conseil des finances publiques locales ».« Il réunira régulièrement, autour du ministre des Finances, tous les acteurs de la dépense locale à tous les échelons pour définir des choix stratégiques », a ajouté le numéro deux du gouvernement. Compte tenu de l'état houleux des relations entre les associations d'élus et le gouvernement, ces annonces pourraient faire un flop.

En effet, plusieurs organisations, dont la puissante association des maires de France (AMF), ont boudé le grand raout de l'exécutif à Bercy ce lundi. « La proposition de dernière minute de créer un haut conseil des finances locales sous l'égide du ministère des Finances, relève au mieux de la provocation, au pire du mépris à l'égard du Comité des finances locales, institution élue démocratiquement par l'ensemble des collectivités » a réagi en fin de semaine dernière l'AMF dans un communiqué. La promesse d'une « nouvelle méthode » ne semble pas convaincre les élus locaux. 

Grégoire Normand
Commentaires 40
à écrit le 29/06/2023 à 14:22
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Quelques pistes d'économie. Aide au développement : 16 Mds RSA : 10 Mds Aide médiale d'Etat : 1,5 Mds

à écrit le 20/06/2023 à 22:29
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Ce qui serait explosif, ce serait qu'on nous propose un budget en équilibre, pour la première fois depuis 50 ans. Les dépenses budgétées dépassent d'un tiers les recettes qui est donc financé par la dette. Dans une entreprise non nationalisée, on réd...

à écrit le 20/06/2023 à 18:38
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cvompletement dingues ses incapables ils ont bouffe la caisse et ne savent plus comment s'en sortir il va etre tres difficile de tenir encore 4 ans comme cela je crainds que tout cela se passe tres mal a force de taper dans tous les sens on risque ...

à écrit le 20/06/2023 à 14:14
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Dernière minute, voilà une analyse essentielle d' Eric Verhaeghe sur le Courrier des Stratèges, un immanquable à ne rater sous aucun prétexte, car tout y est de cette gestion de dingues.. "Borne et Le Maire font un pas de plus...

à écrit le 20/06/2023 à 9:53
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Vous croyez quoi ? Comment pensez vous que nono a sauvé sa notation chez standard and poors ?

le 20/06/2023 à 10:18
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Il n'a fait que des promesses!!!! S&P va bientôt déchanter et mettre enfin la massue sur la tête de la France qui n'a eu depuis 50 ans aucun budget à l'équilibre. Mais Manu dit "apres moi, le déluge" sinon pourquoi c'est a partir de 2027 qu'il commen...

à écrit le 20/06/2023 à 9:13
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Question. Si tu infliges des sanctions à quelqu'un mais que c'est toi qui souffres le plus de tes propres sanctions, mais que tu continues tes sanctions et que même t'en rajoutes des sanctions, peut on dire de toi que tu es un gros sot ? Ou un ...

à écrit le 20/06/2023 à 8:56
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Et Bruno Lemaire l'état a créé 11000 postes de fonctionnaires en 2023 comment peut on faire confiance à ce gouvernement pour faire des économies. Zéro pointé à Macron et ses ministres pour la gestion de l'état.

le 20/06/2023 à 14:44
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Pour réduire les effectifs de fonctionnaires, il faudrait réduire la population, que proposez-vous?

à écrit le 20/06/2023 à 8:16
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Bref, comme je l'ai suppute il y a six mois, chers concitoyens francais, lemeeeeer vous impose ine forme d'austerite qui ne dit pas son nom. Helas, pour vous tous ou presque, ce ne sera pas suffisant. 10 milliards, alors qu'il en faudrait 40 pour et...

le 20/06/2023 à 9:20
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Est ce si mauvais de gérer un budget de façon serrée ? Austérité ça devrait être la règle dans les budgets publics... Quand on regarde un peu on est très surpris par la gestion de l'État.

le 20/06/2023 à 10:06
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"Est ce si mauvais de gérer un budget de façon serrée ?" Ben disons qu'après avoir balancé les centaine de milliards par la fenêtre c'est au moins incompréhensible.

à écrit le 20/06/2023 à 5:27
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Nono oublie de nous dire qu'avec Macron ils ont joué à la bourse de la Dette avec nos impôts et ils ont perdu. Effectivement, ils ont misé la dette française adossée à l'évolution de l'inflation pour obtenir des taux plus bas. Mais, pas de bol, l'inf...

à écrit le 20/06/2023 à 4:19
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La vraie bombe a venir c'est la dette de l'inflation. Quand il faudra payer l'annuite, ce sera tout simplement impossible. Pourquoi on n'en parle pas clairement dans la Traibune ?

à écrit le 19/06/2023 à 23:26
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Et si il coupait les subventions à la presse et aux médias ? Ah non ça ce n'est pas possible, comment garder le pouvoir sans avoir tous ses macronistes de plateau télé et de rédaction au garde à vous ! Et surtout cela risquerait de rétablir un peu de...

à écrit le 19/06/2023 à 21:35
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Réduire le déficit reviendrait à ..sortir urgemment Bruno du jeu. Je m' explique. Le CDS titrait hier : "Tout en continuant à chercher les formulations les plus édulcorées possible, l’INSEE, pour sauver sa crédibilité, doit – comme ...

à écrit le 19/06/2023 à 20:54
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Pourquoi hésiter à enfin fiscaliser les copains plutôt que saigner à présent les classes moyennes? Rappelons encore et tjrs que fraude et exil fiscaux coûtent au pays 100 milliards annuels et sont légalisés par l' artic...

le 19/06/2023 à 21:22
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Frexit comme seule réponse mais je pose ouvertement la question, ne restera t-il de ce pays que l' os que ces tiques n' auront pas sucé à l' instant où Poutine va les botter d ' Ukraine ?

le 20/06/2023 à 10:58
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On reconnait bien là les affidés d'Asselineau : tels les "médecins" du 18ieme siecle pour lesquels la saignée était l'unique traitement à tous les maux, (et les aggravait même souvent) la sortie de l'UE est LA solution à tous nos problèmes et à tout...

à écrit le 19/06/2023 à 19:46
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Qu'il commence donc par supprimer les aides à l'achat des véhicules électriques, les chèques énergie et autres prébandes destinées à acheter la "paix sociale" et les élections plutôt qu'à encourager l'efficacité et ce qui fonctionne... Évidemment, ...

à écrit le 19/06/2023 à 19:25
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C'est explosif, 10 milliards sur un budget de 2000 milliards avec 3000 milliards de dette!! Ça fait 0,3% alors que la france a 5% de déficit, et qu'il faut faire des chèques quoi qu'il en coute aux allemands !!! Le jour du dexit, la france de gauch...

le 19/06/2023 à 19:49
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Nuance le budget de l'état n'est pas de 2.000 milliards mais de 443 milliards !

à écrit le 19/06/2023 à 19:00
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Encore 4 ans de gros dégâts à venir sur la France et les français.

le 20/06/2023 à 11:37
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Je n'ose imaginer ce que seraient les dégâts avec Mélenchon ou LePen au pouvoir !

le 20/06/2023 à 18:59
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On peut toujours trouver pire mais ce serait bien de chercher mieux car à force de voter pour le mal contre le pire le pire est partout. Quel manque d'argument... -_-

à écrit le 19/06/2023 à 18:18
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quand on a des gestionnires incapables voila ce qui arrive il faut tirer sur le baudet pour tenter de faire des economies quand on dit que les caisses sont vident je pense que l'on est pas loin de la verite bravo les gars vous avez bien bosses on ...

à écrit le 19/06/2023 à 17:12
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Il est évident que lorsque la politique fiscale a profité majoritairement aux plus aisés (sans donner le moindre résultat, puisqu'on est obligé de tout subventionner), il n'est pas question de leur demander de participer de façon équitable à l'effort...

le 20/06/2023 à 11:39
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La suppression de la taxe d'habitation et de la redevance télé profitent plus aux moins aisés comme le zéro reste à charge pour les prothèses dentaires et d'optique.

à écrit le 19/06/2023 à 17:01
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"21 milliards qui pourraient ne pas sortir de France pour alimenter les caisses de l'UE de Bruxelles" est un plan aussi "mauvais" que ceux proposés ! ;-)

le 19/06/2023 à 20:05
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Précision . Vous ignorez donc qu'au regard de la contribution de la France notre pays reçoit de l'Europe des subventions dans divers domaines dont l'agriculture dont nous sommes l'un des plus gros bénéficiaire .Pour 2018 nous avons versé 22 milliards...

le 20/06/2023 à 13:25
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La France est le deuxième contributeur au budget de l'Union européenne derrière l'Allemagne, avec 28,8 milliards d'euros versés en 2021( En 2017, la France a versé au budget de l’UE 16,3 milliards d’euros soit une augmentation de 67% ). Et L'article ...

à écrit le 19/06/2023 à 16:52
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21 milliards qui pourrait ne pas sortir de France pour alimenter les caisse de l'UE de Bruxelles est un plan aussi "mauvais" que ceux proposés ! ;-)

le 20/06/2023 à 11:41
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En ce cas il faudrait sortir de l'UE et de l'euro qui nous coûterait énormément plus.

à écrit le 19/06/2023 à 16:45
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Ils pourraient également sabrer un max sur les trop nombreuses subventions parfois distribuées au gré du Prince. L'IFRAP avance quelque 30 milliards, certes il existe le jaune budgétaire recensant en particulier l'intervention tentaculaire et un tant...

le 20/06/2023 à 13:53
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Les consultants sont très utiles pour les dirigeants aimant décider seuls et/ou ayant du mal à assumer leurs décisions.

à écrit le 19/06/2023 à 16:45
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« Il aurait fallu moins dépenser avant » donc je conseille à la Première ministre de demander à Emmanuel Macron de revenir sur certaines de ses mesures inutiles ou très peu utiles et alors il ne sera pas nécessaire de « tailler dans les dépenses publ...

le 20/06/2023 à 11:43
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Pouvez vous donner des exemples de dépenses inutiles au lieu de YaKa FoKon ?

le 20/06/2023 à 13:40
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Par exemple les aides à l'apprentissage (21,6 milliards d’euros consacrés en 2021 au financement de l’apprentissage dont 8,2 milliards à la charge de l’État et reconduites en 2022 et 2023) qui ont surtout bénéficié aux diplômes les plus élevés et que...

à écrit le 19/06/2023 à 16:34
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Un joli programme pour mettre les oppositions dans une rage folle.

le 19/06/2023 à 18:00
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Surtout les castors émotifs du second tour de la présidentielle! :)

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