« Ce qui m'importe est d'être au service de ma ville » (Grégory Doucet, maire de Lyon)

GRAND ENTRETIEN. Neutralité carbone, végétalisation de la place Bellecour, piétonnisation du centre-ville, RER métropolitain, logements sociaux... De passage à Cannes, la semaine dernière, pour le Marché international des professionnels de l'immobilier (Mipim), le maire (Europe-Ecologie Les Verts) de Lyon, Grégory Doucet, a accepté de répondre à quelques questions de La Tribune.
César Armand
Grégory Doucet a été élu maire de Lyon le 4 juillet 2020.
Grégory Doucet a été élu maire de Lyon le 4 juillet 2020. (Crédits : Muriel Chaulet - Ville de Lyon)

Je ne raisonne pas en termes de mandat quand je pense à la durée de vie des bâtiments et au choix des matériaux comme lorsque je fais construire une école en bois ou les ateliers de la danse en terre crue.

Grégory Doucet, maire (EELV) de Lyon

LA TRIBUNE- Pourquoi vous êtes-vous rendu au Marché international des professionnels de l'immobilier la semaine dernière ?

GRÉGORY DOUCET- Venir à Cannes pour le Mipim, c'est un choix pour multiplier les rencontres avec les professionnels et retrouver d'autres élus qui viennent présenter leur ville. Je veux montrer que Lyon est une terre d'investissement et de transitions. En allant voir les maires de Hanovre, d'Helsinki (Finlande) de Nantes, de Lodz (Pologne), de Porto, de Tallinn (Estonie) ou de Riga (Lettonie), labellisées, comme nous, par la Commission européenne « Villes climatiquement neutres pour le climat et intelligentes d'ici à 2030 », cela permet de nous questionner sur nos actions. Au-delà de points communs comme l'efficacité énergétique, les mobilités ou la production d'énergies renouvelables, nous en profitons pour échanger avec eux et les professionnels des secteurs concernés. Autrement dit, nous en profitons pour dire ce que nous faisons et pour capter les informations et les idées utiles.

A horizon 2030, soit dans six ans et demi, vous vous êtes d'ailleurs engagé à ce que Lyon soit neutre en carbone sur les scopes 1 et 2 - les émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre. Soit avec vingt ans d'avance sur l'objectif national. Concrètement, comment y travaillez-vous ?

L'intérêt de travailler dessus est de poser un jalon qui nous permette de nous projeter en 2050, autrement qu'en formulant des bonnes intentions. Pour qu'un tel objectif soit approprié par tout un chacun, il doit être atteignable. Si nous voulons mobiliser, il nous faut respecter ces échéances intermédiaires pour mesurer les écarts et bien piloter en fonction des premiers résultats. C'est essentiel ! Nous avons une opportunité pour montrer que l'écologie améliore concrètement la vie des habitantes et habitants. Avec plus de 500.000 habitants et 24.000 entreprises, Lyon doit porter cette nouvelle responsabilité. Je souhaite que cette démarche rassemble les citoyens, universitaires, milieux économiques, associations et partenaires institutionnels. Tout le monde peut s'engager dans l'évolution de sa ville et son adaptation au réchauffement climatique.

Mais il ne suffit pas de le déclarer, comment transposez-vous une telle ambition dans la vie quotidienne de vos administrés ?

Nous avons défini des orientations pour la Ville qui s'inscrivent dans le quotidien. Concrètement nous avons mis en place un budget d'investissement de 1,2 milliard d'euros pour réussir ces transitions. Par exemple, nous voulons construire le Lyon des enfants. Nous avons déjà des traductions concrètes avec les cours nature où nous végétalisons en priorité les cours d'écoles et de crèches. Des nouveaux usages s'installent avec des aménagements pérennes car concertés avec la communauté éducative. Plutôt que de déposer leurs enfants et de repartir en voiture, les parents prennent plus le temps de discuter entre eux et les enfants de jouer. Un papa m'a remercié car il a retrouvé dix minutes tous les matins avec son fils. Cela crée donc des liens au-delà des questions de sécurité. Faire la ville des enfants, c'est en outre faire la ville pour tous, praticable pour les personnes à mobilité réduite comme pour nos aînés.

Élu en 2020, vous vous êtes aussi engagé à renaturer la Ville, et notamment en végétalisant la place Bellecour. Où en êtes-vous ?

Nous travaillons au concept de ville favorable pour la santé qui prend soin de nous. Bien sûr, nous allons massivement végétaliser, et notamment place Bellecour, mais pour l'heure, nous avons déjà arrêté l'artificialisation des sols. Nous l'avons même inversé en regagnant 3 hectares sur les 4.800 de la commune. C'est peu, mais nous replantons désormais de la pleine terre partout où c'est possible, notamment dans les arrondissements populaires qui sont les plus carencés. Par exemple, nous pouvons enlever des places de stationnement et transformer des espaces publics dédiés aux voitures en espaces de vie. A date, nous avons déjà doublé le rythme des plantations, ne serait-ce que pour absorber les eaux de pluie. Cette ville de la santé, c'est également celle qui favorise les mobilités actives comme le vélo, la marche et les transports en commun.

Votre projet de piétonniser une partie du centre-ville est déjà critiqué par vos oppositions...

L'apaisement du centre-ville de Lyon répond à trois objectifs selon moi : améliorer la qualité de vie des habitants, adapter la ville au réchauffement climatique et valoriser le patrimoine d'un des cœurs battants de Lyon tout en participant à la prospérité économique des commerçants, restaurateurs, hôteliers etc. La marche est la première des mobilités sur la Presqu'île. 80% des déplacements pour la rejoindre se font à pied et en mobilités actives ! C'est un projet ambitieux et d'équilibre avec la création d'une cette zone à trafic limité pour redonner de l'espace à toutes et tous.

Est-ce à dire qu'à mi-mandat, vous êtes déjà candidat à votre réélection ?

Le rythme de la démocratie n'est pas le rythme de l'aménagement. Je ne raisonne pas en termes de mandat quand je pense à la durée de vie des bâtiments et au choix des matériaux comme lorsque je fais construire une école en bois ou les ateliers de la danse en terre crue. L'agenda de la transition écologique n'est pas à confondre avec l'agenda politique. Ce n'est pas le temps de la campagne, ce qui m'importe est d'être au service de ma ville et de mener à bien la transformation dans laquelle nous avons engagé Lyon.

Autre sujet à l'agenda politique : le « RER métropolitain », pour lequel vous avez déjà manifesté votre intérêt, à la différence du conseil régional...

Il est indispensable de l'envisager, mais pour cela, nous devons déjà intensifier certains réseaux avant de trouver très rapidement toutes les possibilités de faisceau qui peuvent être exploités. La région peut décider très rapidement d'améliorer le quotidien des usagers. Pourquoi sur certaines lignes le dimanche n'y-a-t-il des trains que toutes les deux heures ? Il faut résoudre ces problèmes d'offres insuffisantes.

Par ailleurs, Lyon n'atteint pas non plus son quota de 25% de logements sociaux. Vous aviez annoncé en 2020 qu'il en faudrait 2.000 par an pour respecter la loi. Qu'en est-il aujourd'hui ?

Nous en sommes à 23%. C'est d'une complexité folle sachant que nous faisons face à une démobilisation des moyens. Ensuite, nous voulons positionner ces logements là où nous le souhaitons. C'est pourquoi plutôt que de faire des grandes opérations, nous préférons travailler à la parcelle : 40 ici, 50 là, mais je ne doute pas que nous allons y arriver d'ici à 2026.

Le chèque de la métropole aux communes qui construisent

Grégory Doucet n'était pas le seul élu lyonnais à se rendre au Mipim. Le président (EELV) de la métropole Bruno Bernard et son vice-président chargé de l'Habitat, du Logement social et de la Politique de la ville Renaud Payre se sont également affichés à Cannes.

Élus en 2020, ces derniers ont débloqué 50 millions d'euros d'aides à l'investissement d'ici à 2026 pour les communes qui construisent des logements, soit 10 millions d'euros par an. Ainsi, chaque commune lançant un nouveau projet peut, théoriquement, bénéficier d'un million d'euros pour aménager des équipements publics liés à l'habitat (crèches, écoles, gymnases, voiries...).

« Pour les trois quarts des villes qui ne jouent pas le jeu, l'Etat doit assumer ses responsabilités. Là où les communes sont défaillantes, il pourrait nous confier pourrait confier les permis de construire », estime le président du Grand Lyon, Bruno Bernard, candidat à une expérimentation.

« Si nous ne faisons pas ce rééquilibrage territorial en termes d'emplois et de logements, l'étalement urbain, un modèle catastrophique pour les habitants et la planète, se poursuivre », ajoute-t-il.

Il ne croit pas si dire : du fait de la remontée des taux d'intérêt, le logement privé fait face à une crise de la demande. « C'est la fin d'un modèle. Des projets n'ont plus l'équilibre financier pour sortir de terre », enchaîne l'édile écologiste. « La porte est toujours ouverte pour la fédération des promoteurs immobiliers », renchérit son vice-président Renaud Payre, prêt à examiner, sur vingt ans, l'usufruit locatif social.

D'un côté, la métropole achèterait des immeubles anciens et en vendrait l'usufruit, c'est-à-dire le droit de jouissance, à un bailleur social. De l'autre, ce dernier proposerait à des investisseurs d'en acquérir la nue-propriété, autrement dit les murs, avant qu'ils en deviennent pleinement propriétaires au bout de quinze ans.

César Armand
Commentaires 4
à écrit le 21/03/2023 à 9:42
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Ce qui lui importe est seulement d'etre au service de son ideologie a 2 vitesses et certainement pas au service des Lyonnais

à écrit le 21/03/2023 à 9:29
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Non, vous n'êtes pas au service des Lyonnais et Lyonnaises mais au service de votre idéologie dogmatique.

à écrit le 21/03/2023 à 8:55
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C'est nettement mieux qu'à Paris : Mme Hidalgo, qui soutient la grève des éboueurs pour des raisons politiques, n'est plus au service de l'intérêt général, et de la ville dont elle est maire. C'est moche, le dogmatisme.

à écrit le 21/03/2023 à 7:53
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HAROS SUR LES PROPRIOS avec la hausse massive des TAXES FONCIÈRES grace à l’augmentation des bases foncières de 7 % en 2023 6% prévu en 2024 . Les maires comme ceux de PARIS et nos chers maires écologistes LYON MARSEILLE GRENOBLE BORDEAUX qui augment...

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