Confinement : un coût économique moins sévère qu'au printemps

Le second confinement entraînerait une perte d'activité de -12% au mois de novembre, selon une enquête de la Banque de France qui a interrogé plus de 8.000 entreprises. Si les dégâts sont moins colossaux qu'au printemps (-31%), l'économie française devrait néanmoins enregistrer une violente récession estimée entre -9% et -10% pour 2020.
Grégoire Normand
(Crédits : Reuters)

Le retour à la normale n'est pas pour demain. Selon la dernière livraison de la Banque de France ce lundi 9 novembre, la mise en place du confinement à la fin du mois d'octobre dernier entraînerait une perte de produit intérieur brut (PIB) d'environ 12% au mois de novembre. En avril, au moment des mesures drastiques de confinement, les pertes s'élevaient à environ -31%.

Une telle différence peut s'expliquer en partie par une mise sous cloche de l'économie tricolore beaucoup moins sévère qu'au printemps. La plupart des établissements scolaires et des crèches sont restés ouverts contrairement aux mois de mars et avril. En outre, beaucoup d'entreprises, qui avaient basculé dans le télétravail en seulement quelques jours, sont mieux préparées, même s'il reste encore des organisations réfractaires.

L'hiver sera morose pour de nombreux secteurs

Malgré cette moindre perte de richesse produite, l'hiver s'annonce morose pour beaucoup de secteurs. La recrudescence de l'épidémie et la saturation des services de réanimation ont obligé le gouvernement à durcir ses mesures pour tenter d'endiguer la propagation de cette maladie infectieuse.

Au micro de RTL, ce lundi matin, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, a expliqué que l'institution avait dégradé ses projections pour cette année.

"Sur l'ensemble de l'année 2020, avant la deuxième vague, nous pensions qu'on aurait une récession d'un peu moins de 9 %. Nous pensons aujourd'hui que sur l'ensemble de l'année 2020, on sera entre moins 9% et moins 10 %. Le chiffre précis, nous le publierons, notre estimation plus précise, nous la publierons à mi-décembre, et elle dépendra bien sûr de la suite de ce confinement."

Le second confinement pourrait être plus dévastateur pour l'économie

Ces estimations restent malgré tout plus optimistes que celles du gouvernement qui, lui, table désormais sur une récession de -11% pour 2020. Si l'exécutif a annoncé un quatrième budget d'urgence la semaine dernière doté d'une enveloppe d'environ 20 milliards d'euros, beaucoup d'entreprises se retrouvent bien dans une situation budgétaire bien plus délicate qu'au printemps pour affronter ce nouveau confinement et cette seconde vague.

Lors d'un récent séminaire sur les PME, le directeur des études à la Banque de France, Olivier Garnier revenait sur la situation financière des entreprises.

"Le second confinement risque d'affecter plus durablement l'économie, notamment sur la solvabilité des entreprises plutôt que sur la liquidité. Les entreprises entrent endettées dans ce second confinement. Les entreprises ont moins de capacité d'endettement qu'au printemps."

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Les services dans le rouge

La mise en oeuvre du couvre-feu, d'abord dans les grandes métropoles puis dans 54 départements, et enfin le reconfinement, ont affecté sérieusement les services marchands (-17%).

Selon l'enquête de la Banque de France, le commerce de gros et de détail, les transports et l'hébergement restauration (-40%) ont subi de plein fouet la multiplication de toutes ces mesures.

Viennent ensuite les autres services marchands (-12%) comme les services aux entreprises par exemple. Ces pertes sont d'autant plus importantes que le poids des services marchands dans l'économie tricolore (57%) et les emplois est très important. Ce qui risque au final de peser sur la croissance du dernier trimestre 2020.

En revanche, les activités de services financiers et immobilier semblent peu affectées par la crise (-1%).

Dans les services non marchands, les dégâts sont moins impressionnants (-5%), mais leur part dans le PIB est conséquente (22%). De nombreuses incertitudes pèsent sur le niveau d'activité dans ce secteur. "Si les guichets publics et l'essentiel de l'éducation restent ouverts, comme devraient l'être de nombreux services d'entretien et certains services à destination du public, et que le télétravail devrait être pour le reste généralisé, il est possible qu'une partie du personnel se retrouve à nouveau en situation de ne pas pouvoir travailler, ni sur site ni à distance", indiquent les statisticiens de l'organisme bancaire.

La construction en repli

Toujours au mois de novembre, la construction enregistre des pertes relativement importantes également (-8%). C'est bien moindre qu'en avril (-65%) mais le recul de l'activité persiste depuis le mois de septembre.

Ce recul persistant peut s'expliquer à la fois par la baisse du cycle d'investissement classique lié au mandat des municipalités et la dégradation prolongée de la conjoncture. Le manque de visibilité et l'incertitude persistante sur l'évolution du virus ne favorisent pas vraiment les investissements de moyen et long terme. "Les nouvelles dérogations ainsi que l'adaptation du cadre de travail des entreprises aux contraintes sanitaires devraient limiter la perte pour ces secteurs relativement à la perte constatée en avril", expliquent néanmoins les économistes de la banque centrale.

L'industrie en recul

Les moteurs de l'appareil productif français ont des difficultés à redémarrer. Après un sursaut de l'activité au troisième trimestre lié au déconfinement, l'industrie connaît à nouveau des pertes considérables (-7%). Si elles sont moins élevées qu'au mois d'avril, les répercussions de cette pandémie risquent d'accélérer la désindustrialisation de l'économie tricolore entamée depuis les années 1970. En effet, beaucoup de grands groupes ont annoncé des fermetures de sites de production depuis le printemps et des licenciements par milliers. Cette perte des capacités de production pourrait avoir des répercussions majeures en termes de perte de savoir-faire et de dépendance à l'égard des pays étrangers. Beaucoup de postes détruits risquent de ne pas être remplacés et les processus de reconversion des salariés peuvent prendre plusieurs mois, voire plusieurs années.

En outre, l'appareil productif français fortement spécialisé dans l'aéronautique, la construction navale ou les produits de luxe risquent de subir pour un long moment les effets de cette pandémie sur le transport de voyageurs et le tourisme. Dans l'eau, l'énergie, la gestion des déchets, la cokéfaction et le raffinage, les répercussions sont relativement similaires (-5%).

Pas de perte pour l'agriculture

Sans surprise, l'agriculture et l'industrie agroalimentaire ne devraient pas connaître de perte d'activité au mois de novembre (0). Déjà, au printemps, ces deux secteurs avaient été parmi les moins affectés par la paralysie de l'économie tricolore. Beaucoup d'exploitations agricoles s'étaient retrouvées en manque de main-d'oeuvre du jour au lendemain tandis que l'industrie agroalimentaire a pu tourner sur un régime soutenu malgré cette période de fortes restrictions. Il reste que le poids dans le PIB de ces secteurs demeure relativement modéré (-4%). Ce qui a peu d'impact sur la croissance, même si leur activité est jugée essentielle.

> Lire aussi : Confinement : l'économie française à nouveau au bord du précipice

Grégoire Normand
Commentaire 1
à écrit le 09/11/2020 à 12:20
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C'est logique puisque au printemps c'était un confinement total tandis que là il est partiel voir reposant sur la base du volontariat, au printemps c'était 99% du trafic arrêté là je pense qu'il doit y avoir à peine une perte de 25% de bagnoles sur l...

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