Assurance chômage : le gouvernement veut durcir les conditions des cadres

Le gouvernement prépare sa réforme de l'assurance chômage, qu'il souhaite mettre en œuvre le 1er juillet prochain. Plusieurs pistes sont sur la table, dont celle de rallonger le délai de carence. Syndicats et patronat sont vent debout
Fanny Guinochet
La ministre du Travail Catherine Vautrin.
La ministre du Travail Catherine Vautrin. (Crédits : GONZALO FUENTES)

Il ne veut rien dire, si ce n'est que toutes les pistes sont aujourd'hui sur la table. Le gouvernement travaille à sa réforme de l'assurance chômage. Depuis que les partenaires sociaux ont échoué à se mettre d'accord sur les règles qui régissent le système, l'Etat a repris la main. Objectif : durcir les modalités pour percevoir les allocations. Avec en ligne de mire, le délai de carence.

Passer de 6 mois jusqu'à 12 mois le délai de carence

Aujourd'hui, quand un chômeur est indemnisé par France Travail - anciennement Pôle Emploi - il doit souvent attendre une certaine période de latence, avant d'être indemnisé, (quand il peut prétendre à une allocation chômage).

Ce délai dépend aujourd'hui du montant des indemnités supra légales qu'il a perçues par son employeur en partant. C'est ainsi que les demandeurs d'emploi ayant d'importants chèques de départ doivent souvent attendre plusieurs mois avant que ne s'enclenche leur allocation chômage.

Mais alors qu'aujourd'hui, le délai est plafonné à 6 mois, demain ce pourrait être plus. En effet, le gouvernement envisage de le rallonger jusqu'à 12 mois, au motif que ces chômeurs ont de quoi faire face à leurs dépenses dans l'intervalle. Autrement dit, ils peuvent vivre grâce à l'indemnité légale versée par les employeurs. Le gouvernement veut ainsi éviter que ces inscrits à France Travail ne cumulent allocation chômage et indemnité légale. Il vise notamment les demandeurs d'emploi qui sont licenciés ou ayant signé une rupture conventionnelle.

Outre le délai, le gouvernement se penche aussi sur la façon dont cette indemnité est prise en compte dans le calcul de l'indemnité chômage.

De fait, ces options de réformes s'adressent aux cadres, qui touchent souvent les sommes de départ les plus importantes, et dont les indemnités sont plus élevées que la moyenne des inscrits à France Travail. Les cadres sont aussi ceux qui ont le plus de chance de trouver rapidement un emploi, leur taux de chômage étant, en moyenne, plus bas que le taux national.

Enfin, pour le gouvernement, cette piste présente l'intérêt de ne pas raboter des droits existants - puisqu'il ne touche ni au montant, ni à la durée d'indemnités-. Elle consiste simplement à décaler dans le temps un droit. Donc, selon l'exécutif, plus acceptable socialement. Il n'empêche, les syndicats sont vent debout, notamment la CFE-CGC qui représente les cadres.

Extension du bonus-malus sur les contrats courts

Autre piste sérieuse sur laquelle planche l'exécutif : l'extension du système de bonus-malus sur les CDD et contrats courts. Ce dispositif, porté par le député Renaissance Marc Ferracci quand il était conseillé de Muriel Pénicaud, alors ministre du Travail entre 2027 et 2020, vise d'une part à sanctionner les employeurs qui multiplient les contrats précaires et de l'autre à récompenser ceux qui favorisent les emplois les plus longs. Malgré l'opposition du patronat, le bonus-malus a été mis en œuvre pour la première fois entre 2022 et 2023, avant d'être renouvelé.

 Le dispositif mesure le taux de séparation des entreprises de plus de 11 salariés soit le nombre de fins de contrat de travail (hors démissions ou autres exceptions) ou de missions d'intérim donnant lieu à inscription ou réinscription à France Travail (ex-Pôle emploi), rapporté à l'effectif annuel moyen. Ce taux de séparation est ensuite comparé au taux médian du secteur de l'entreprise. Il en résulte un taux de cotisation chômage inférieur à sa valeur actuelle de 4,05 % (il y a alors bonus), égal (statu quo), ou supérieur (malus), dans une fourchette de 3 % à 5,05 %

Aujourd'hui, le bonus-malus ne s'applique qu'à 7 secteurs - dont l'hôtellerie-restauration ou le transport routier. Mais, le gouvernement est d'autant plus intéressé par son extension qu'une étude du ministère du Travail publiée en février dernier, montre que la modulation du taux de cotisation chômage employeur semble avoir freiné la précarité professionnelle dans ces filières. « Par ailleurs, à un moment où l'étude des besoins de main-d'œuvre de France Travail montre que les intentions d'embauche en CDI faiblissent cette année, il est légitime d'intervenir pour orienter les entreprises », prévient un conseiller ministériel.

Les employeurs, qui ont bataillé dur contre ce système de bonus-malus voient évidemment d'un très mauvais œil cette nouvelle contrainte qui pourrait leur être imposée dans plusieurs pans de l'économie.

Des consultations à venir

Du côté du ministère du Travail, l'entourage de Catherine Vautrin insiste sur le fait qu'aucune décision n'est prise, que les arbitrages ne sont pas encore rendus. Et pour cause, la locataire de la rue de Grenelle prévoit de recevoir les organisations syndicales et patronales mi-mai pour consultation.

Reste que syndicats comme patronat ne se font aucune illusion sur la prise en compte de leurs points de vue lors de cet échange. Depuis qu'ils ont échoué à se mettre d'accord sur la négociation des seniors, ils savent que le gouvernement va durcir les critères, sans faire grand cas de leurs observations.

Sans compter que l'exécutif ne cache pas sa volonté d'aller vite, pour avoir une nouvelle convention d'assurance chômage dès le 1er juillet. Une convention qui permettra de faire des économies substantielles au système.

Fanny Guinochet
Commentaires 36
à écrit le 01/05/2024 à 8:28
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Ce gouvernement croit donc que c'est parce qu'il existe une assurance qu'il y a du chômage. Il n'y a donc plus aucun intérêt à payer ses cotisations chômage. Que celles-ci deviennent alors facultatives, et il n'y aura plus de chômeurs...

le 01/05/2024 à 21:36
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Vous devriez savoir que depuis 2019, aucun salarié sauf les intermittents du spectacle ne paie la cotisation chômage.

le 02/05/2024 à 0:09
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Le salarié paye indirectement une cotisation par la stagnation des salaires, entre autres. Les cotisations patronales sont les augmentations que les salariés n'ont pas : les patrons le dénoncent eux-même. L'état s'accapare l'argent des salariés, et l...

à écrit le 30/04/2024 à 15:06
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Doit-on mettre cela sur le compte du plan de réformes présenté par la France à Bruxelles pour obtenir la bénédiction de la Commission européenne, au budget de laquelle, rappelons-le, nous cotisons beaucoup plus que nous recevons?

à écrit le 30/04/2024 à 13:49
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quand on sait que tout le monde cotise, mais seulement 40% des gens bénéficie des assedics, ben c'est juste une vaste farce de croire que l'état sur une cotisation assurantielle, n'a normalement aucune forme de rapport avec cela ! c'est pourquoi macr...

le 01/05/2024 à 21:40
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En voilà un autre qui n'a jamais regardé sa fiche de paie. Aucune cotisation chômage n'est enlevée de votre salaire brut depuis 2019. heureusement que le ridicule ne tue pas.

à écrit le 30/04/2024 à 10:20
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Un dicton disait qu'il valait mieux être riche et bien portant que pauvre et malade, il faudra ajouter il vaut mieux avoir du boulot qu'être au chômage.

le 30/04/2024 à 13:51
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cela a toujours été, c'est juste l'idéologie d'extrême droite qui est parvenue a faire croire le contraire ! généralement, ceux qui bénéficient du système qui ont les avantages et n'ont pas eu a goûter au chômage ! C'est 25 000 morts chaque année, d...

le 30/04/2024 à 15:00
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@Ménon : une grosse étude australienne avait fait ressortir que ce n'était pas forcément le cas, que le chômage est mauvais pas bon pour la santé physique et mentale, mais ça restait un moindre mal par rapport à l'exercice de certains métiers, comme ...

à écrit le 30/04/2024 à 9:44
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On ne réglera pas notre situation économico-financière catastrophique en se polarisant seulement sur les retraites et le chômage, il conviendrait urgemment de changer de logiciel et tout le monde doit mettre la main à la poche ou réduire ses dépenses...

le 30/04/2024 à 10:12
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Les retraites, c'est vraiment le gros morceau, la moitié des dépenses publiques servant à payer les pensions et les soins des retraités... Ensuite les dépenses servent à créer des emplois et par là même à acheter la modération de diplômés bien plus s...

le 01/05/2024 à 21:46
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@ O : Les retraites du privé ne pose aucun problème que ce soit par la partie CNAV ou la partie complémentaire. Ce qui pose problème , ce sont les retraites des régimes spéciaux, et ceux des fonctionnaires, si bien que tous les ans l'état doit mettre...

à écrit le 30/04/2024 à 9:24
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Ahhh comment enrichir les copains... bah oui sans etre indemnisé, tu acceptes n'importe quel boulot à n'importe quel salaire. Je ne vois pas trop comment dé-smicardiser la France avec ce genre de mesure. Il ne pourrait y avoir une loi qui indexe le n...

le 30/04/2024 à 9:35
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et il tape encore et toujours sur les salaries du prive mais de l'evasion des capitaux du a la fraude a la sécurité social la le pouvoir est absent et le prejudice est bien plus important

à écrit le 30/04/2024 à 9:24
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Ahhh comment enrichir les copains... bah oui sans etre indemnisé, tu acceptes n'importe quel boulot à n'importe quel salaire. Je ne vois pas trop comment dé-smicardiser la France avec ce genre de mesure. Il ne pourrait y avoir une loi qui indexe le n...

à écrit le 30/04/2024 à 8:08
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Et quand est-ce que les riches payent des impôts ? Histoire d'être crédible même si visiblement être crédible est inconnu de notre classe dirigeante, n'a aucun intérêt pour eux.

à écrit le 30/04/2024 à 6:47
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Il faut faire des économies , il est inconcevable de payer des gens à ne rien faire pendant 18 mois. Le système le plus scandaleux est celui des intermittents du spectacle qui travaillent 50% du temps et sont indemnisés pendant 50% par pôle emploi,...

le 30/04/2024 à 17:03
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Certains profils nécessitent des formations longues, classiquement quand ils doivent changer de métier car l'ancien a été automatisé... Quant aux économies, il y en aurait bien plus à faire sur les pensions et les niches fiscales des retraités actuel...

à écrit le 29/04/2024 à 20:50
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L’argent économisé ne servira même pas à réduire les cotisations, (sinon le gouvernement le fanfaronnerait), mais à financer les retraites qui augmentent plus vite que les salaires qui les financent. C’est du pur clientélisme et une gestion gérontocr...

le 01/05/2024 à 21:49
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Quand dans pas longtemps vous serez à la retraite vous aurez changé de discours. Alors vos arguments ne sont pas crédibles

à écrit le 29/04/2024 à 20:10
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Ça va dans le bon sens mais il faudrait des mesures bien plus drastiques. L'assurance chômage est en France un encouragement à ne pas travailler en se faisant payer par ceux qui travaillent malgré tout. Les incitations à ne pas travailler ne sont aus...

le 29/04/2024 à 20:36
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Le système permet surtout les formations et reconversions, ce qui n’est pas un mal. Les tirs au flan sont parfaitement identifiés par les agents, c’est même chiffré cela représente environ 17%, pas de quoi généraliser comme vous le faites.

le 29/04/2024 à 20:43
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"il faudrait des mesures bien plus drastiques" fermer FranceTravail (même si ça met ses employés au chômage, euh, non, à la rue) et alors ne plus avoir de cotisations concernant ce poste là prélevées sur les feuilles de paie, et donc gagner plus !

le 29/04/2024 à 23:40
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@bce: a l aune de ce que vous écrivez , je ne vous souhaite pas d étre licenciée à 54 ans , de vous retrouvez cadre au chômage depuis 8 mois , que votre entreprise de distribution horticole plantes / fleurs qui a pignon sur rue et qui va fêter son b...

le 29/04/2024 à 23:40
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@bce: a l aune de ce que vous écrivez , je ne vous souhaite pas d étre licenciée à 54 ans , de vous retrouvez cadre au chômage depuis 8 mois , que votre entreprise de distribution horticole plantes / fleurs qui a pignon sur rue et qui va fêter son b...

le 30/04/2024 à 0:08
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@Target Vous avez certainement raison sur l'attitude comptable envers les seniors de nos chefs d'entreprise moyens. Mais ce n'est pas à la collectivité de nous garantir un niveau de vie et de compénser les mauvais choix des dirigeants d'entreprise ...

le 30/04/2024 à 8:28
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Bismarck avait justement inventé l'assurance chômage pour permettre aux salariés d'être plus sélectifs et d'éradiquer naturellement les employeurs nuisibles, mais en France, ces patrons là ont fait du lobbying et obtenu de recourir à l'immigration po...

à écrit le 29/04/2024 à 20:01
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Ah là, Macron risque de se mettre à dos ce qu'il lui restait d'électeurs encore en âge de travailler...

le 29/04/2024 à 20:28
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Un homme politique digne de ce nom ne devrait pas tenir compte de ce paramètre. Il doit avoir un programme validée par les électeurs et ensuite l'appliquer quoiqu'il lui en coûte. Le peuple ayant compris que ces spécimens ont longtemps disparus, exig...

le 29/04/2024 à 23:38
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@tototiti : c'est là la différence entre un homme d'Etat et un politicien, le premier pense au long terme, le second à sa réélection... Et ce qui est terrible, c'est qu'il y a la même chose avec les dirigeants d'entreprise, vous avez ceux pensant à l...

le 30/04/2024 à 15:30
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Tout à fait, les cadres s'en souviendront le 9 juin prochain...

à écrit le 29/04/2024 à 19:59
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Tout va bien pour les cadres. Avec un taux de chômage de 4,1%, ils sont mieux armés que les autres populations sur le marché de l’emploi mais aussi face à la réforme des retraites qui prévoit de maintenir plus longtemps les salariés en emploi. Pourta...

à écrit le 29/04/2024 à 18:39
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et les cotisations, elles baissent de concert? ou alors on va avoir des cris de tolerance en hurlant que ca finance la solidarite, par exemple les regimes speciaux des intermittents du travail, qui eux ne sont pas impactes par la reforme?

le 29/04/2024 à 19:44
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Le régime des intermittents du spectacle est maintenu car sans être aussi sensible que le militaire, ce secteur là rentre dans la catégorie des vecteurs d'influence d'un pays...

à écrit le 29/04/2024 à 18:35
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Ok, mais dans ce cas, baissez les cotisations en conséquence !!!

à écrit le 29/04/2024 à 18:35
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Pour UNE fois, je suis 100% d'accord avec cette mesure, je n'ai jamais compris au nom de quel droit moyenageux les cadres pouvaient cumuler indemnités légales et indemnisation au delà de 6 mois, alors que le non cadre se mange l'intégralité du différ...

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