Dépenses et investissements des communes : le retour à la normale attendu d'ici deux à trois ans

En pleine crise Covid, les investissements communaux ont dégringolé de 14,5%, selon une analyse financière menée en 2020, réalisée par l'association des maires de France, la Banque des territoires et la Banque postale. En plus de l'arrêt de l'activité, ceci s'explique aussi par l'augmentation des dépenses exceptionnelles, toutes ou presque liées à la gestion de la crise sanitaire, et parallèlement à une chute des recettes tarifaires de 2,3 milliards d'euros.
César Armand
(Crédits : DR)

2021 est sur le point de se terminer que les maires regardent encore 2020. Lors du congrès des maires, l'association des maires de France, la Banque des territoires et la Banque postale - deux entités de la Caisse des Dépôts - ont en effet présenté une analyse financière des communes sous le titre "une première année de mandat inédite".

Des investissements qui ont dégringolé de 14,5%

Sans surprise, il en ressort que les investissements communaux (travaux publics, équipements, infrastructures) ont dégringolé de 14,5% en 2020. En espèce sonnantes et trébuchantes, c'est 5,27 milliards d'euros en moins par rapport à 2019.

Les explications sont déjà connues : confinement, décalage du deuxième tour des élections municipales trois mois après le premier, et mécaniquement décalage du vote des budgets.

"En plus des nouvelles contraintes et obligations d'hygiène et de sécurité, les collectivités du bloc communal évoquent des difficultés à poursuivre leurs travaux d'investissement en raison du manque de disponibilité des entreprises et des problèmes d'approvisionnement de leurs fournisseurs", justifient aussi les porte-paroles de l'étude.

Des dépenses d'intervention en augmentation

La crise sanitaire a parallèlement conduit à l'augmentation des dépenses d'intervention: +2,1% l'an dernier par rapport à 2019. Dans le détail, ces 17,9 milliards d'euros supplémentaires viennent, notamment, de l'achat de masques (30%), de gel hydroalcoolique (28%), de vêtements de protection (8%) ou d'opérations de nettoyage supplémentaire (10%).

Si les dépenses d'intervention ont logiquement augmenté, l'ensemble des dépenses de fonctionnement stagne. Ceci s'explique par la mise en veille de certains équipements (piscines, gymnases...) et de l'utilisation de moyens publics (chauffage, carburant, entretien...) pendant les confinements successifs.

Une chute des recettes tarifaires de 2,3 milliards d'euros

Dans le même esprit, les recettes de fonctionnement ont baissé de 0,9%. Par exemple, les redevances et recettes tarifaires (les billetteries gérées par la commune) ont chuté de 2,3 milliards d'euros en 2020.

"Elles ont diminué en raison de la fermeture pendant la durée des confinements et du couvre-feu d'une grande partie des services publics locaux et notamment de la quasi-totalité des établissements publics culturels (musées, châteaux, salles de spectacles, cinémas), touristiques (campings...), sportifs, scolaires et périscolaires", décryptent les portes-paroles de l'étude.

Résultat: cet effet de ciseau "inversé" entre stagnation des dépenses de fonctionnement et réduction des recettes de fonctionnement a fait baisser de 5,5% l'épargne brute des communes en 2020.

Les collectivités se portent mieux depuis début 2021

Force est pourtant de constater que les collectivités se portent mieux depuis début 2021. Dans une étude publiée fin septembre, le cabinet Stratégies Locales révélait à La Tribune que l'ensemble des collectivités locales, et pas seulement des communes, détenait une trésorerie disponible de 72 milliards d'euros.

Dans la même veine, lors d'une conférence de presse le 1er octobre, le directeur des études de la Banque postale collectivités, relevait "une épargne brute du niveau de 2019", soit + 9,4% par rapport à 2020. Entre la reprise des recettes et celle des dépenses de fonctionnement, "l'effet ciseau ne se prolonge pas", affirmait encore Luc-Alain Vervisch.

Pour les maires, un retour à la normale dans 2 à 3 ans

Il n'empêche, les maires qui déclarent avoir perdu 5,1 milliards d'euros du fait de la Covid-19 considèrent que le retour à la normale n'interviendra que dans deux à trois ans.

"Ils dorment tous sur un matelas d'or, quelle subtile plaisanterie !" s'agace André Laignel, premier vice-président (PS) de l'association des maires de France (AMF), candidat à sa succession aux côtés de David Lisnard, et président du comité des finances locales. "Nous sommes dans une situation de besoin de financement, la dette augmente et nos ressources se sont estompées", poursuit-il.

Pour le maire (UDI) de Sceaux, secrétaire général et président de la commission des finances de l'AMF, Philippe Laurent, candidat à la suite de François Baroin, le problème reste celui de la taxe d'habitation, qui sera définitivement supprimée d'ici à 2023. "La question n'est pas réglée", pointe-t-il. Selon lui, 6.000 des 35.000 communes n'ont pas reçu la compensation intégrale, telle que promise par le président de la République, "et ne la recevront pas", assène encore l'élu local.

En réalité, tous deux rêvent que le sujet des finances publiques s'invite dans la campagne de l'élection présidentielle. Ainsi, le socialiste André Laignel espère, encore et toujours, que les dépenses exceptionnelles liées à la crise sanitaire soient prises en charge par l'Etat. Le centriste Philippe Laurent redoute, lui, que la taxe foncière, dont s'acquittent les propriétaires et qui revient aux communes depuis la suppression de la taxe d'habitation, soit, à son tour supprimée. "Cette question est déjà évoquée  dans des discussions confidentielles", lâche-t-il, sibyllin.

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César Armand
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