A chacun son public. Une semaine après la mort du jeune Nahel à Nanterre (Hauts-de-Seine), le président de la République a reçu, à l'Elysée, 302 maires, pendant que la Première ministre et cinq ministres se sont rendus, à l'Assemblée nationale, devant l'intergroupe de la majorité présidentielle (Renaissance, Horizons, MoDem). Au programme : articulation des actions de l'Etat et des collectivités territoriales, démonstrations d'empathie des deux têtes de l'exécutif, mise en sécurité des élus locaux et bien sûr réflexion sur les causes et les conséquences des émeutes urbaines.
« Nous voulons construire les solutions avec eux au cours d'un échange réel sur le fond », expliquait, à La Tribune, une source proche du dossier avant les prises de parole d'Emmanuel Macron et d'Elisabeth Borne.
Simplifier les procédures
Dans la cour du Palais, chaque maire avait sa propre appréciation de la situation. Le maire (EELV) de Bordeaux entendait, lui, délivrer un message « clair » au président: « il faut privilégier la médiation et rétablir l'humain dans les quartiers ».
« Il faut se donner les moyens de simplifier les procédures car toutes les politiques de la ville sont un véritable machin d'acronyme divers », a encore lâché Pierre Hurmic.
Son homologue de Grenoble a, lui, confié à La Tribune son « amertume » après l'« explosion de colère ».
« Nous avons besoin de travailler le fond et de remplacer la politique de la ville actuelle », a poursuivi Eric Piolle.
Une loi d'urgence pour écraser tous les délais
Sauf que tout ne s'est pas passé comme prévu. « Le chef de l'Etat, qui veut "qualifier les faits", nous a refait le coup du grand débat, sauf que les maires n'ont pas besoin de catharsis ou de soutien psychologique mais d'actions concrètes », tance David Lisnard, président (LR) de l'Association des maires de France, contacté par La Tribune. Aussi face à « l'écroulement de l'autorité », le maire de Cannes défend-t-il « une concentration de l'Etat sur ses missions régaliennes, une révision de la politique migratoire et une refonte de la justice pénale des mineurs ».
De son côté, Emmanuel Macron a déjà annoncé aux édiles une « loi d'urgence pour écraser tous les délais » et accélérer la reconstruction des villes touchées, érigeant en « priorité absolue », l'« ordre durable », et ce avec des « moyens exceptionnels » pour « maintenir l'effort et la pression ». Au menu: des aides financières pour la voirie et les équipements publics comme les écoles. Peu avant au Palais-Bourbon, les ministres de l'Intérieur et de la Justice, Gérald Darmanin et Eric Dupont-Moretti ont fait des points « factuels » sur la situation auprès des élus de la majorité présidentielle
Une réunion de suivi dès ce soir
Le président de la République comme son gouvernement feront un point d'étape « à la fin de l'été ».« Il faut prendre le temps de l'écoute et de l'analyse. Le Conseil des ministres du 5 juillet permettra d'étudier tout cela », justifie un député Renaissance proche d'Emmanuel Macron. « Il est évident qu'il y a des choses qui ont éloigné Paris de la province, comme le non-cumul des mandats. On devrait avoir à l'Assemblée des élus des territoires, et pas uniquement des militants ou des membres de cabinets ministériels », pointe un autre, élu Horizons.
A la sortie du Château, le maire (PS) de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol, espère, lui, « des actes et une politique de la ville forte ». « Personne n'a la baguette magique. Nous avons besoin de plus de République, de sécurité, de justice, mais aussi de plus de formation dans la police, d'un président de la République qui rassemble et non qui divise », a-t-il encore insisté. Toujours est-il que selon nos informations, une réunion de suivi est déjà prévue ce soir entre Emmanuel Macron et certains membres de son gouvernement.