La facture des émeutes s'annonçait lourde. Le patronat évoquait même lundi un montant d'un milliard d'euros. Ce matin, la présidente de France Assureurs, Florence Lustman, a avancé de son côté, au micro de Franceinfo, un premier montant de 280 millions d'euros, pour 5.800 sinistres déjà déclarés. « La facture va être beaucoup plus élevée qu'en 2005 », précise la représentante des assureurs.
Il y a treize ans, les cinq semaines d'émeutes, suite à la mort accidentelle de deux jeunes poursuivis par la police, avaient entraîné 205 millions d'euros de dommages, rappelle la présidente de France Assureurs. Et cette facture, « ce sont les assureurs qui vont la régler sur la base des garanties qui figurent dans les contrats », explique-t-elle.
Selon un premier décompte ce week-end du ministère de l'Économie, pas moins d'une dizaine de centres commerciaux, de 200 magasins de la grande distribution, 250 bureaux de tabac et 250 agences bancaires auraient été pillés.
Un délai de déclaration exceptionnel de 30 jours
« La première chose à faire est de déposer plainte et de contacter son assureur le plus rapidement possible », rappelle Florence Lustman, précisant que « tous nos assureurs ont mis en place une cellule de crise » avec « des représentants sur tout le territoire ».
En outre, un délai de déclaration exceptionnel allant jusqu'à 30 jours a été instauré, annonce-t-elle. Un point confirmé par le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, ce mardi matin. « A la demande du gouvernement, les assureurs ont accepté de reporter de cinq à 30 jours le délai pour faire sa déclaration de sinistre », a-t-il annoncé, se réjouissant que « cela donne beaucoup de liberté d'esprit aux commerçants ».
« Mais il vaut mieux aller le plus vite possible pour accélérer le processus et lancer la phase d'indemnisation », insiste Florence Lustman.
Un geste sur les franchises
Si Bruno Le Maire avait appelé, samedi, les assureurs à « faire preuve de la plus grande simplicité dans le traitement des procédures », il les avait également enjoint de « réduire au maximum les franchises ». Il a été partiellement entendu. « Nous allons prendre en considération, au cas par cas, les situations des commerçants indépendants les plus touchés par ces violences urbaine pour réduire l'effet de leurs franchises contractuelle», explique Florence Lustman
De son côté, le groupe de bancassurance BPCE a déjà annoncé, lundi, qu'il n'appliquerait pas «de franchise en cas de dommages aux biens » pour ses « clients professionnels ». De même, pour les particuliers en assurance automobile, aucune franchise ne sera appliquée si le véhicule n'est pas réparable (véhicule incendié ou détruit) sous réserve que la garantie incendie ait été souscrite.
Axa France prend également des mesures exceptionnelles avec la suppression totale des franchises pour les particuliers et l'application d'une seule franchise pour les professionnels quelque soit le nombre de sinistres déclarés, selon un communiqué publié ce mardi. Par ailleurs, l'assureur décide la création d'un fonds de solidarité d'urgence pour soutenir les assurés professionnels en situation de fragilité.
La Macif annonce, elle aussi, des dispositifs équivalents et l'ensemble des assureurs devraient suivre le pas.
Une fois le dépôt de plainte effectué, la rapidité dans le traitement des dossiers « dépendra également des délais d'intervention des experts et de toute la chaîne de réparation », poursuit la présidente de France Assureurs qui explique : « On répare le réel et nous sommes aussi liés aux capacités locales de réparation. Mais nous allons tout faire pour que ça aille le plus vite possible ». Et d'assurer que les assureurs vont « essayer de fluidifier et simplifier le processus d'indemnisation. Chaque assureur met en place des mesures très concrètes pour accélérer le traitement de ces sinistres ».
Avoir souscrit aux bonnes garanties
Quant aux modalités d'indemnisation, la présidente de France Assureur rappelle la nécessité pour les commerçants d'avoir souscrit les garanties nécessaires. En effet, les dommages liés à la guerre civile ou aux émeutes ne sont pas automatiquement couverts.
Si l'incendie et le vol sont systématiquement couverts par les contrats multirisques professionnels, ce n'est pas le cas des pertes d'exploitation. Selon France Assureurs, un commerce sur deux serait assuré contre les pertes d'exploitation et donc susceptible d'être indemnisé pour le manque à gagner. Encore faut-il « que la fermeture soit liée à un dommage couvert dans le cadre de ces violences urbaines. Mais il faut donc avoir souscrit à cette garantie », souligne la présidente de France Assureurs.
En effet, la souscription à la garantie perte d'exploitation est facultative précise le site de France Assureurs. Il en va de même pour la garantie « émeutes et mouvements populaires» : « les dommages matériels subis par un commerce ou un immeuble sont pris en charge par la garantie « émeutes et mouvements populaires ». Le site indique que « la quasi-totalité des contrats d'assurance couvrant les commerces et les immeubles prévoient cette garantie ».
Interrogée à propos des commerçants qui n'auront pas souscrit aux bonnes garanties, Florence Lustman rappelle la nécessité « de toujours contacter l'assureur car il peut y avoir des garanties de-ci de-là auxquelles le commerçant n'a pas pensé ». Mais, « on ne peut pas s'assurer rétrospectivement », rappelle-t-elle.