
C'est une étude qui tombe à pic juste avant le 15 mars, une date synonyme de mi-mandat pour les maires (ré)élus en 2020. Standard & Poor's vient de publier une note de perspectives intitulée « Les collectivités locales resteront résilientes malgré les incertitudes ». L'agence de notation américaine affirme en effet qu'en 2023, les territoires devraient continuer de se désendetter après un pic d'endettement atteint en 2021.
« Nous allons assister à une stabilisation voire à une érosion de l'endettement. Les collectivités locales ont aussi largement réduit leurs émissions de NEU CP, ces billets de trésorerie à court terme, suite à l'évolution des taux courts en terrain positif, rendant les conditions de refinancement sur les marchés financiers moins attractives », analyse, pour La Tribune, Stéphanie Mery, analyste secteur public, S&P Global Ratings.
Ce n'est une surprise pour personne : les conditions de crédit se sont resserrées avec l'augmentation des taux d'intérêt et un coût de la dette plus élevé. Jusqu'à présent, les élus locaux ont bénéficié de taux négatifs, leur ayant rapporté de l'argent et permis de baisser leur dette de 3,6% en 2022 avant 1,56% en 2023 et 1,15% en 2024. Les collectivités ont en effet, à la différence des Etats, l'obligation de respecter une règle d'or budgétaire : l'équilibre des recettes et des dépenses.
La maîtrise des dépenses d'investissement et... de fonctionnement
D'autant que leur dette est majoritairement à taux fixe à 75% et seulement à 25% à taux variable. De même que leurs prêts durent, en moyenne, onze ans, ce qui lisse la hausse des taux dans le temps. Et ce sachant qu'un mandat exécutif municipal, département ou régional dure six ans voire sept quand l'élection est repoussée d'une année pour ne pas interférer avec la présidentielle.
Sauf que le pendant du désendettement restant la maîtrise les dépenses d'investissement, les collectivités locales vont aussi devoir contenir leurs dépenses de fonctionnement. En février 2022, la guerre en Ukraine a fait exploser leurs coûts de l'énergie, suivis au 1er juillet de deux décisions gouvernementales ayant trait à leurs finances locales : le dégel du point d'indice des fonctionnaires de 3,5% et la revalorisation de 4% de prestations sociales comme le revenu de solidarité active (RSA).
A cela s'ajoutent des « incertitudes » pour cette année : l'inflation bien sûr, mais aussi le risque de fléchissement, selon la consommation des ménages, de la TVA. Cet impôt national est déjà reversé en partie aux régions, et bientôt sous la forme d'une fraction territorialisée aux communes et aux intercommunalités. Le sujet est en cours de négociation entre Bercy et les associations d'édiles concernées à la suite de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).
Des aléas pour 2023
Autres aléas : la variation du taux de croissance qui peut jouer sur l'emploi et in fine sur les prestations sociales, ou encore la chute du marché de l'immobilier qui entraîne mécaniquement une chute des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) dits aussi « frais de notaire » qui représentent 9% des recettes des conseils départementaux.
« En cas de pression sur leurs dépenses de fonctionnement, les élus locaux vont être amenés à ralentir leurs dépenses d'investissement. Du fait des incertitudes économiques et budgétaires, ils vont peut-être réviser en cours d'année leur budget 2023 selon les tendances », estime l'analyste du secteur public de Standard & Poor's.
Malgré ce ralentissement économique, « nous anticipons que la qualité du crédit des collectivités locales françaises sera résiliente », poursuit Stéphanie Méry. Elle en veut pour preuve que le taux d'épargne brut et consolidé des territoires va certes baisser mais rester conséquent.
Après avoir été de 17% en 2022, cette capacité d'autofinancement devrait en effet tourner autour de 15% en 2023 et de 14,5% en 2024. Des ressources à laquelle vient se greffet l'augmentation de 7% des bases de la taxe foncière et de la taxe d'habitation sur les résidences principales, derniers leviers fiscaux à la main des élus mais qui reposent encore sur la contribution des seuls propriétaires.
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