France 2030 : le gouvernement dévoile enfin sa feuille de route budgétaire

Le gouvernement veut inscrire par voie d'amendement 3,5 milliards d'euros de crédits de paiement dans le projet de loi de finances 2022 toujours en discussion au Parlement.
Grégoire Normand
Emmanuel Macron avait présenté le plan d'investissement France 2030 le 12 octobre dernier.
Emmanuel Macron avait présenté le plan d'investissement France 2030 le 12 octobre dernier. (Crédits : Reuters)

Les nuages se dissipent progressivement. Trois semaines après la présentation du plan France 2030, aux allures de discours de campagne par le président de la République Emmanuel Macron, le gouvernement a levé le voile sur son plan de bataille budgétaire visant à appliquer concrètement les subsides de cette enveloppe. L'exécutif a déposé trois amendements dans le projet de loi de finances 2022 (PLF 2022), toujours en discussion au parlement ce mardi 2 novembre. Les textes consultés par La Tribune précisent que 34 milliards d'euros de crédits d'engagement et 3,5 milliards d'euros de crédits de paiement seront inscrits dans les documents budgétaires pour l'année prochaine.

Sur ces 3,5 milliards d'euros, 2,8 milliards correspondent à des subventions et 660 millions doivent être fléchés vers des investissements en fonds propres. Lors de la présentation du PLF 2022 à Bercy devant la presse, le Haut conseil des finances publiques (HCFP) avait pointé un budget "incomplet" suscitant de vives réactions chez le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire. En plein marathon budgétaire, le gouvernement veut clarifier sa feuille de route budgétaire.

"France 2030 vise à rattraper notre retard dans certains secteurs historiques et à donner un temps d'avance à la France en créant de nouvelles filières industrielles et technologiques pour accompagner les transitions écologiques et numériques", a déclaré le locataire de Bercy.

"Ce plan d'investissement s'inscrit dans la continuité de la politique économique annoncée en 2017. La période post-covid va être un moment charnière. L'enjeu est d'éviter que la France se fasse distancer par la Chine et les États-Unis", a ajouté l'entourage du Premier ministre Jean Castex lors d'une réunion avec des journalistes.

À moins de six mois de l'élection présidentielle, la présentation de France 2030 n'avait pas manqué de soulever des interrogations dans les rangs des oppositions.

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Unifier le programme d'investissement d'avenir (PIA) et France 2030

Le premier amendement déposé par l'exécutif illustre une nouvelle stratégie en matière d'investissement. "La doctrine d'investissement est modifiée afin d'autoriser le financement de projets situés plus en aval de la chaîne de production qui participeront du rehaussement du potentiel de croissance de l'économie française", indique le texte soumis au vote de l'Assemblée.

Face au casse-tête posé par France 2030, les conseillers du chef de l'État ont finalement opté pour une unification du programme d'investissement d'avenir (PIA) et France 2030 pour "plus de clarté et plus de visibilité" assurent les auteurs du texte. "Sur le plan technique, il s'agit d'assurer une cohérence entre les plans d'investissement d'avenir et France 2030. Cela permet de mobiliser des crédits dès 2022. Il s'agit de s'inscrire dans une architecture budgétaire déjà existante", précise Matignon.

Les programmes d'investissement d'avenir, lancés sous le mandat de Nicolas Sarkozy après la crise de 2008, ont récemment fait l'objet d'un bilan en demi-teinte de la part de la Cour des comptes. Dans leur publication, les magistrats de la rue Cambon notent que le "PIA apporte une contribution positive à la politique d'investissement de la France et qu'il s'est imposé comme un instrument structuré et singulier qu'il convient de maintenir".

En revanche, ils s'interrogent sur les conséquences de cet outil. "Plus de dix ans après son lancement, les effets véritables et profonds du PIA restent difficiles à cerner [...] L'appréciation des effets macro-économiques du PIA reste très limitée, les complexités méthodologiques et les interactions avec une multitude de dispositifs publics (fiscaux, subventionnels, réglementaires, etc.) rendant l'exercice particulièrement délicat", ajoutent-ils.

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30 milliards de subventions et dotations, 4 milliards en fonds propres

Petits réacteurs nucléaires, avion bas carbone, hydrogène, exploration des fonds marins... lors de son discours en grande pompe, Emmanuel Macron a déroulé les dix principaux objectifs de ce plan d'investissement destiné à bâtir la France de 2030. Sur les 34 milliards d'euros, 30 milliards prendront la forme de subventions et de dotations et les 4 milliards restants correspondent à des investissements en fonds propres visant "à réconcilier les start-up et l'industrie", selon les mots du chef de l'État. "France 2030 vise à amplifier les efforts dans la recherche et l'innovation, l'industrialisation", ajoute Matignon.

Sur le rythme de décaissement de ces sommes, l'entourage du chef du gouvernement n'a pas vraiment apporté de précision. "On a une trajectoire de crédits qui commence avec une marche à 3,5 milliards d'euros en 2022. Il y a une augmentation progressive et un ralentissement au bout de quatre ou cinq ans", explique un proche de Jean Castex.

Une gouvernance toujours floue

Sur le sujet de la gouvernance et du pilotage, les zones d'ombre planent toujours. Le chef de l'État a promis de présenter une gouvernance avant le mois de janvier prochain, soit trois mois avant le scrutin présidentiel. En attendant, les conseillers du Premier ministre reconnaissent que "c'est un sujet compliqué". "On a des discussions en cours. Nous proposerons quelque chose avant la fin de l'année [...] Sur l'ensemble des sujets, on est submergé de propositions. L'équation est difficile à résoudre. Il faut sûrement moins de guichets. Les 10 objectifs permettent d'y voir plus clair, mais il faut discuter calmement de la gouvernance avec tous les ministères impliqués", ajoutent-ils.

Du côté des économistes, cette question "de la gouvernance est cruciale. Comment l'argent va-t-il être distribué ? Comment les projets vont-ils être sélectionnés ?", s'est récemment demandé le président de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), Xavier Ragot, lors d'un point presse.

"Ma crainte principale est que la France sait lancer des projets, mais il faut savoir arrêter un projet si c'est un échec. L'échec du plan Calcul a marqué les esprits. La barre est assez haute au regard des objectifs affichés par le président", a-t-il ajouté.

La présentation des crédits budgétaires à l'Assemblée devrait susciter de vives réactions.

Grégoire Normand
Commentaires 2
à écrit le 07/11/2021 à 11:06
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Étrange qu'un président qui sera mit à la porte dans moins de 6 mois pense au budget de 2030 (dans 2 quinquennats) et que ce même résident n'ai rien fait en 4.5ans de règne pour éviter le surnombre de citoyens français pour dans 20 ans ce qui aurait ...

à écrit le 03/11/2021 à 11:52
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"L'enjeu est d'éviter que la France se fasse distancer par la Chine et les États-Unis". Ridicule langue de bois. Soyons plus modeste et réalistes. Le problème est que la France se fait distancer par l'Allemagne, le Royaume Uni, l'Italie, les Pays Ba...

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