La présentation du plan « France 2030 », ce mardi 12 octobre, ressemble, sans aucun doute, à un programme économique de campagne. Certes, Emmanuel Macron a longuement développé les filières sur lesquelles l'Etat va miser dans les 5 ans à venir, pour que la France reste dans la course mondiale, mais, il a aussi évoqué, à multiples reprises, l'avenir de notre modèle social.
« Une force qui répare », selon le chef de l'Etat, qui a toutefois souligné notre « incohérence française » : « car on a une faiblesse aussi : on n'a plus le tissus productif qui permet de le financer. »
Trouver les leviers pour conserver cet acquis social
Alors que notre pays vit à crédit, qu'il s'endette massivement pour payer les pensions des retraités, les dépenses d'assurance maladie, l'éducation.... il y a urgence à retrouver des marges de manœuvre. Et c'est bien le programme France 2030, selon Emmanuel Macron, qui doit redonner à notre pays des leviers pour conserver cet acquis social :
« Je veux que nous retrouvions un cercle vertueux qui se vérifie : innover, produire, exporter et ainsi financer notre modèle social. »
Car le chef de l'Etat se dit convaincu : « Dans une démocratie, impossible de réduire trop les droits. Je ne crois pas qu'on arrivera à réduire le modèle social français... C'est très dur de dire aux gens, on va vous enlever des droits massivement ».
L'exercice du pouvoir et la crise des Gilets jaunes ont laissé des traces : les crises sociales ne sont jamais loin.
Pas d'autre choix, alors, selon le locataire de l'Elysée que de « dépenser plus efficacement et de produire davantage. »
"Un pays qui travaille moins que les autres"
Sur ce dernier point, le président a égrené un diagnostic peu glorieux : « Nous sommes un pays qui travaille moins que les autres, la quantité de travail allouée n'est pas au bon niveau dans le cycle de vie, et en horaires cumulés. »
Ce n'est pas la première fois qu'Emmanuel Macron tient ce type de discours. Et il est vrai que dans les comparaisons internationales de l'OCDE, sur ces questions, la France se situe plutôt en queue de peloton.
Mais, plus que la faiblesse du temps de travail hebdomadaire, c'est notre durée des carrières qui pose problème. Les Français rentrent sur le marché du travail tardivement et avec un âge légal de départ fixé à 62 ans, ils en sortent plus tôt que dans la plupart des pays occidentaux.
L'Hexagone compte aussi plus de personnes inactives, au chômage, que ses voisins. L'occasion, à ce titre, pour Emmanuel Macron de vanter sa récente réforme de l'assurance chômage qui vise à dynamiser le marché du travail.
Reste qu'à à six mois de l'élection présidentielle, l'ensemble de ces remarques présidentielles prennent une tonalité particulière.
Et pour cause, elles sont autant de coups de griffes à ses concurrents dans la course pour l'Elysée - Anne Hidalgo souhaite réduire le temps de travail hebdomadaire, Jean-Luc Mélenchon, et Marine Le Pen prônent un retour de l'âge légal de la retraite à 60 ans.
Réforme des retraites
Elles sonnent aussi comme des préconisations à suivre pour un second mandat. Car sans prononcer le mot de réforme des retraites, celle-ci était bien présente, tout au long du discours d'Emmanuel Macron.
Comme un message, pour ceux qui en doutaient, que le chef de l'Etat hésite encore avant la fin de son mandat à réformer le système. Même a minima, de façon express, en s'attaquant aux seuls régimes spéciaux, avant d'envisager une vaste réforme du système général lors d'un second quinquennat.
Son discours « France 2030 » laisse ainsi penser qu'il ne renoncera pas.
Surtout dans le contexte politique qui se dessine : à droite Xavier Bertrand prône un départ à 65 ans. Edouard Philippe, qui vient de créer son parti « Horizons », se positionne comme le partisan d'un départ à la retraite décalé jusqu'à 67 ans.
Au milieu de son plaidoyer pour le nucléaire, l'hydrogène vert ou encore l'automobile de demain, Emmanuel Macron s'est appliqué à réduire l'espace de ses adversaires. Il a aussi cherché à retrouver son image de réformateur, celle-là même qui l'avait portée au pouvoir en 2017. Mais si le chef de l'Etat a proposé d'embarquer les Français dans une « aventure », pas sûr que cette injonction à la réforme, même sibylline les fasse tous rêver.