LA TRIBUNE. Quel rôle peut jouer votre association alors que débute la campagne présidentielle ?
FRANCOIS SAUVADET. A quelques mois de l'élection présidentielle, nous voulons montrer qu'il est possible de mieux agir pour les Français. Selon un sondage que nous avons commandé à l'Ifop sur la perception des départements, nous apparaissons en première ligne pour relever les défis du futur. Nous sommes dans le cœur des Français. Nous devons redevenir le cœur de la République.
Comment ? De quelle nature sont les 102 propositions que vous allez révéler ?
Nous avons assisté à une vraie recentralisation notamment pendant la première période du quinquennat. Les collectivités ont vécu des moments très difficiles. Cela a commencé avec la suppression de toute marge de manœuvre fiscale (transfert de la taxe foncière aux communes privées de taxe d'habitation, Ndlr).
Or, peut-on encore parler de liberté sans autonomie fiscale ? Malgré les recettes liées aux droits de mutation à titre onéreux (frais de notaire, Ndlr), des départements se trouvent en difficulté. Nos dépenses ont été été contingentées par les contrats de Cahors (limitation de la hausse des dépenses de fonctionnement, Ndlr). C'est pourquoi nous avons créé Territoires Unis avec l'association des maires de France et Régions de France pour dire stop. Nous ne sommes pas des services extérieurs de l'Etat, mais des élus. Nous avons besoin d'un Etat qui impulse mais pas d'un Etat qui entrave la capacité à faire.
N'avez-vous pas renoué le dialogue depuis la crise sanitaire ?
Tout le monde parle du couple maire-préfet, mais le couple maire-département a fonctionné à plein. Tout le monde parle de l'Etat et des régions, mais les conseils départementaux ont continué d'assurer le quotidien, de protéger les enfants et de verser les allocations sociales.
Aux côtés des élus locaux, nous avons prouvé que nous étions armés pour relever le défi de la solidarité humaine et territoriale, partout en France. Nous sommes enfin reconnus comme l'instance de proximité par rapport aux grandes régions et les métropoles qui ne correspondent plus aux standards de vie.
Les départements sont une chance pour la France pour agir et répondre aux besoins de nos compatriotes. Nous plaidons ainsi pour que les politiques sociales soient adaptées selon les territoires.
N'est-ce pas l'objectif du projet de loi « 3DS » qui vient d'arriver à l'Assemblée nationale dont la différenciation territoriale est au cœur du texte ?
La question du suivi individuel de nos compatriotes n'est en effet pas le même en milieu rural ou en ville. La première des inégalités, c'est que l'Etat nous laisse bien seuls pour assurer une mission qui nécessiterait son intervention financière : le vieillissement de la population. Nous n'avons plus d'amortisseurs de l'Etat, alors que nous aurions besoin d'un Etat qui accompagne les territoires financièrement.
Faut-il alors une remise à plat de la fiscalité locale dès le premier jour du prochain quinquennat, comme le demandent les maires ?
Le "quoi qu'il en coûte" aura un coût mais nous avons besoin de la solidarité nationale. Nous avons créé un fonds de compensation interdépartemental, mais lorsque la Seine-Saint-Denis et d'autres départements plus ruraux demandent la renationalisation du RSA, l'Etat doit l'entendre comme un appel à l'aide.
La situation fiscale et sociale reste explosive. Si les recettes des droits de mutation à titre onéreux ont parfois plus progressé dans le monde rural que dans l'urbain, la précarité va grandissante. De par notre proximité, nous connaissons bien les familles.
Réaffirmons des chefs de file clairs sur l'autonomie, la protection de l'enfance et des personnes âgées pour redonner du sens et de la cohérence à l'action publique. Nous sommes parfois bien seuls sur le phénomène de la violence chez les enfants ou les problèmes de santé mentale voire de psychiatrie.
Nous demandons également le retour de la clause de compétence générale en temps de crise pour pouvoir combler les trous dans la raquette, comme l'économie de proximité.
La compétence du développement économique vous a été retirée en 2015 avec la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notré) au profit des métropoles et des régions. Souhaiteriez-vous la récupérer ?
Nous voulons un débat sur l'économie de proximité et les petits commerces. Nous le faisons déjà dans l'agriculture, les bâtiments d'élevage, les circuits courts... pour répondre aux demandes des Français. Nous réclamons aussi d'avoir la main sur les gestionnaires scolaires dans l'Education nationale. Nous finançons déjà l'entretien et la gestion des collèges.
Sur ce point, l'Etat a déjà fermé la porte...
Nous allons la rouvrir. Dans ce domaine, nous avons déjà la responsabilité de la carte scolaire, mais pas la compétence du transport qui relève de la région. Il y en a avec qui cela se passe bien, d'autre non. Que puis-je répondre aux élus locaux et aux parents d'élèves ?
C'est pourquoi nous poursuivons les discussions avec l'association Régions de France et l'association des maires de France pour proposer aux candidats à l'élection présidentielle un nouveau schéma de confiance pour la France. L'Etat a besoin de l'armée des 500.000 élus locaux.