Le gouvernement mise sur France Travail pour atteindre le plein-emploi

Alors que le chômage remonte, Pôle emploi change de nom et de fonctionnement. La nouvelle structure doit remplir l’objectif prioritaire de la fin du quinquennat.
Fanny Guinochet
Sur fond de réforme de l’assurance chômage, les syndicats dénoncent une énième stigmatisation des plus précaires.
Sur fond de réforme de l’assurance chômage, les syndicats dénoncent une énième stigmatisation des plus précaires. (Crédits : © Marta NASCIMENTO/REA)

Pôle Emploi est mort, vive France Travail. Ce 1er janvier, le service public de l'emploi fait peau neuve, avec un nouveau logo et de nouvelles missions. L'objectif de cette mutation : mieux coordonner les innombrables acteurs de la formation, de l'emploi et de l'insertion, comme les missions locales, les maisons de l'emploi, l'Apec pour les cadres, etc., et impulser une nouvelle dynamique.

Un défi confié à Thibault Guilly, ancien haut-commissaire à l'emploi, qui succède à Jean Bassères, ex-directeur de Pôle emploi. Son rôle ? Jouer les chefs d'orchestre, pour que ces structures accordent leurs violons, trouvent un langage commun, utilisent des outils partagés, notamment informatiques. Et gagnent en efficacité.

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Mais Thibault Guilly prévient : « 2024 sera une année de préparation et d'expérimentation. Ce ne sera pas le grand soir au 1 er janvier 2024 mais le début d'une nouvelle façon de travailler ensemble et du déploiement de nos mesures pour tous les demandeurs d'emploi et les entreprises. » Et d'expliquer : « Concrètement, par exemple, un jeune qui cherche un travail, et s'adresse à sa mission locale de quartier, n'aura plus besoin de raconter dix fois son histoire à l'assistante sociale qui le suit, ni au conseiller France Travail, ni à son chargé d'orientation. Ce sera plus fluide. »

Tous les demandeurs d'emploi devront s'inscrire, y compris les plus éloignés du marché du travail

Telle est la promesse, au moins sur le papier, de cette nouvelle structure qui doit incarner le mantra originel du macronisme : chaque individu peut se construire un destin grâce à son travail, qu'il soit cadre au chômage, bénéficiaire du RSA, ou jeune créateur d'entreprise... Et c'est par l'emploi que l'on retrouve de la croissance.

Le taux de chômage risque d'augmenter

France Travail comporte une nouveauté de taille : tous les demandeurs devront s'inscrire, y compris les plus éloignés du marché de l'emploi, comme les 1,8 million de bénéficiaires du RSA. Sachant que moins d'un allocataire sur deux est comptabilisé à Pôle emploi, près de 1 million de personnes pourraient donc venir grossir les registres administratifs des demandeurs d'emploi. Cet afflux de nouveaux inscrits fera augmenter, mécaniquement, le nombre de chômeurs. Certes, tous ne pointeront pas en catégorie A, la plus observée, mais ils pourraient être pris en compte par le Bureau international du travail et par les agences de notation.

Aussi, à un moment où la conjoncture économique se tend et où le taux de chômage regagne du terrain, le gouvernement prend-il le soin de reporter à 2025 l'entrée en vigueur de cette inscription obligatoire pour tous. Au ministère du Travail, l'idée de créer une nouvelle catégorie de demandeurs d'emploi spécifiques a même été avancée... avant d'être abandonnée. Trop risqué politiquement. À défaut, la Rue de Grenelle se prépare à déployer des trésors de pédagogie pour expliquer cet effet d'optique, plaider que le chômage « réel » ne reparte pas à la hausse.

Pas question que France Travail ne vienne entacher une des plus belles réussites d'Emmanuel Macron : avoir ramené le chômage au plus bas depuis quarante ans. L'ancien collaborateur de François Hollande à l'Élysée ne se souvient que trop d'une inversion de la courbe tant attendue qui avait empêché le président socialiste de se représenter.

Pour les patrons : une nouvelle usine à gaz

Au sein du gouvernement, la création de France Travail ne fait pas l'unanimité. Élisabeth Borne a beaucoup œuvré à son élaboration. L'ancienne ministre du Travail est intimement persuadée que ramener les plus fragiles vers l'emploi est la seule solution pour atteindre la promesse présidentielle de plein-emploi, autour de 5 % contre 7,4 % actuellement. D'autres sont moins convaincus : « France Travail doit-il absorber les personnes les plus éloignées du marché du travail, comme les bénéficiaires du RSA, dont on sait qu'ils ne se réinséreront pas, à cause de soucis de santé, de logement... ? » questionne un poids lourd du gouvernement.

Un autre ministre poursuit : « La loi prévoit que ces personnes signent un contrat d'engagement et réalisent au moins quinze heures mensuelles d'activité ou de formation, obligatoires, sans quoi elles perdront leur allocation. C'est louable, mais en a-t-on les moyens ? » Spécialiste des questions d'emploi à l'Institut Montaigne, Bertrand Martinot doute lui aussi de « notre capacité réelle d'accompagner ces personnes à qui on va demander des heures d'activité, de formation, de coaching ».

Les partenaires sociaux, eux, sont remontés. Sur fond de réforme de l'assurance chômage, les syndicats dénoncent une énième stigmatisation des plus précaires. À la CGT, Sophie Binet voit d'un mauvais œil l'arrivée de France Travail : « Ce qui devrait être un véritable service public de l'emploi ne sera qu'un outil pour diminuer encore les prestations des chômeurs. »

Le patronat, lui, s'inquiète d'une nouvelle usine à gaz. Patrick Martin, le président du Medef, craint que les entreprises ne passent à la caisse alors que le budget 2024 prévoit déjà un crédit de 350 millions d'euros supplémentaires pour le nouvel opérateur. Sur trois ans, ce sera plus de 1 milliard et demi. Sans compter que l'État accompagnera aussi les autres partenaires de l'emploi, comme les collectivités à hauteur de près de 4 milliards d'euros, les quatre prochaines années. Le patronat table plutôt sur une dizaine de milliards d'euros pour créer France Travail. « France Travail, c'est avant tout un pari, mais pas une recette magique », résume Franck Morel, ancien conseiller social d'Édouard Philippe à Matignon.

Une certitude : son déploiement sera surveillé de près par l'Élysée, surtout s'il s'accompagne d'une remontée du taux de chômage. Car, en France, le seul comptable de l'emploi, reste toujours, in fine, le président.

Fanny Guinochet
Commentaires 26
à écrit le 26/12/2023 à 15:41
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Bonjour, dans toute pays certaine personne sont tres tres loins du monde du travail... Eet remettre toute cette population au travail ne sera pas simple... D'ailleurs ils car sont nombreux est atypique... Individus totalement hors de la société,...

à écrit le 26/12/2023 à 9:25
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"le service public de l'emploi fait peau neuve, avec un nouveau logo et de nouvelles missions." Petit retour en arrière. Il y a vingt ans, ce qui était alors l’ANPE (avant la fusion avec les Assedic) avait confié à l’agence Euro RSCG (désormais Ha...

à écrit le 26/12/2023 à 9:07
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Fermons ces structures, bien trop couteuses, pour une efficacité extrêmement discutable, ce qui est reconnu puisque l’on cherche à changer cela. Pôle emploi, France travail, ne sont que des administrations destinées à distribuer des prestations socia...

à écrit le 26/12/2023 à 1:11
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C'est Noel, normal d'y croire.

à écrit le 25/12/2023 à 20:44
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Au fait, on n'ose toujours pas reconnaître que ce sont nos propres sanctions qui ont provoqué la crise actuelle, en renchérissant le prix du pétrole et du gaz, en plus de nous couper des échanges avec la Russie qu'on voulait mettre à genou ?

le 25/12/2023 à 23:47
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Vous avez une vision très réductrice de la situation.

à écrit le 25/12/2023 à 20:25
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Heu... Il y a confusion : là c'est Noël, pas le 1er avril...

à écrit le 25/12/2023 à 16:15
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C'est le genre... chaine de Ponzi pour faire disparaitre l'image du chômage ! Tout est inversé pour que cela disparaisse !;-)

à écrit le 25/12/2023 à 10:06
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Tout changer pour ne rien changer. Les francais connaissent la musique.

le 25/12/2023 à 16:27
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tout simplement ! la sous traitance n est pas devenue une entreprise de démolition ? au service d une politique néo llibérale dévastatrice et rejetée par un grand nombre

à écrit le 25/12/2023 à 7:04
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Pour le plein emploi il faudrait déjà que ceux qui ne veulent pas travailler alors qu'ils en sont capables aillent aussi bosser. Je parle bien évidemment en connaissance de cause, ceux avec des excuses bien stupides ou qui vous répondent "si je trava...

à écrit le 25/12/2023 à 1:12
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Il faut 1.5 de croissance du pib minimum pour une création de poste. Une récession arrive. Désolé pour le plein emploi

à écrit le 24/12/2023 à 21:21
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Inspirez-vous du code du travail en suisse, et posez-vous la question du succès économique de la Suisse. Ca évitera une suisse à 10 millions d'habitants et le bétonnage de mon pays. De la part d'un patron de PME qui engage facilement, car en cas de ...

le 25/12/2023 à 11:40
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"posez-vous la question du succès économique de la Suisse" Peut-être parce que c'est la première place au monde d'évasion fiscale non plutôt ? lol

le 25/12/2023 à 15:20
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Comparer la France et la Suisse n'a aucun sens. Pas d'immigration (illégale), pas d'armée, une très grande partie de la richesse provenant de la finance et plus particulièrement de la gestion de fortune... Vous comparez des choux et des carottes. L...

le 25/12/2023 à 18:47
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"pas d'armée". Veuillez composer "Armée suisse" sur Wikipedia et vous verrez.

le 26/12/2023 à 10:19
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Et la Suisse dispose du référendum obligatoire comme instrument de démocratie directe.

à écrit le 24/12/2023 à 21:09
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Le plein emploi consistera à exclure les demandeurs d'emplois et d'afficher des emplois temporaires . Ce n'est qu'une vision électoraliste

à écrit le 24/12/2023 à 17:33
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A croire qu'un changement de nom à consonance pétainiste pourrai faire évoluer le monde du travail ! ,-)

à écrit le 24/12/2023 à 12:33
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L'exécutif devrait songer à stoper sa consommation de substances illicites car ça finit par ronger tous les neurones🤡 Source: Capital 23.12.2023 - dixit Marc Touati - ["(...) Depuis le début 2020, notre dette publique a explosé de 713,31 milliards d’...

à écrit le 24/12/2023 à 12:13
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La recession arrive aucune chance que le taux de chomage baisse mais comme on oblige presque les chomeur a devenir uber on maintient bas un taux de chomage qui ne reflete en rien la realité

à écrit le 24/12/2023 à 9:52
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A croire qu'un changement de nom à consonance pétainiste pourrai faire évoluer le monde du travail ! ,-)

à écrit le 24/12/2023 à 9:47
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le titre est quand meme hallucinant!!!! l'etat stratege sovietique et ses entites bienveillantes compte sur le zele des fonctionnaires pour te forcer tout ca!!!!! et sinon, on a fait des etudes d'economies, sur ce qu'est le chomage, comment ca se pas...

à écrit le 24/12/2023 à 9:01
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4.5 milliards de détournement d'argent public ! LOL. Au fait ils ont toujours une semaine de vacances de plus à france travail ?

à écrit le 24/12/2023 à 8:30
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Avec 3 022 000 de chômeurs inscrits en catégorie A en septembre, nous serions proche du plein emploi. On rappellera, qu'autrefois, c'était le nombre de chômeurs inscrits en catégorie A par rapport à la population active qui servait de référence pour...

à écrit le 24/12/2023 à 7:50
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Y aura-t-il un vrai changement en ne passant plus par la sous-traitance de prestations qui normalement relèvent de la compétence de France travail ? A voir…Si c'est pour passer à nouveau par des cabinets privés de placement, des organismes de formati...

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