Les agriculteurs toujours aux portes de Paris

Malgré les annonces de Gabriel Attal, la colère des agriculteurs de l'Oise n'est pas retombée. Le blocage de l'A16 continue. Ils devraient rejoindre Paris demain.
(Crédits : © YVES HERMAN/reuters)

Deux votes, pour un même résultat. Après les annonces de Gabriel Attal, les agriculteurs de l'Oise qui bloquent l'autoroute A16 ont tous choisi, à main levée et à deux reprises, de poursuivre le mouvement. « On a le sentiment d'avoir été écoutés, mais ça reste flou et surtout incomplet, donc pas de raison de replier le camp, explique Gwenaëlle Desrumaux, la présidente des Jeunes Agriculteurs de l'Oise. On a été déçus qu'il ne parle pas d'Europe, des importations, rien non plus sur la remise en question des 4 % de jachères... Le compte n'y est pas. »

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C'est elle qui, vendredi soir, a sollicité le vote de la centaine d'agriculteurs rassemblés autour des enceintes pour écouter religieusement le Premier ministre. Depuis mardi, la jeune éleveuse enchaîne les allers-retours entre le bivouac de l'A16 et son exploitation, pour traire ses bêtes et s'occuper de son bébé de 6 mois. Depuis mardi, comme elle, des éleveurs, des céréaliers, des betteraviers de tous les âges et pour la très grande majorité syndiqués se relaient pour bloquer l'autoroute entre Beauvais et Paris. Depuis mardi, chaque jour, le camp est déplacé, on cherche un autre pont plus proche de Paris, quelques kilomètres plus loin. Mercredi, l'exercice était déjà bien rodé. « On lève le camp, tout le monde dans les tracteurs et on avance », s'époumone Régis Desrumaux, le père de Gwenaëlle, président de la FDSEA de l'Oise.

En quelques minutes, le bivouac installé la veille n'est plus qu'un souvenir. Le barbecue aussi large qu'une deux-voies est rangé avec le générateur dans une remorque, les cercueils symbolisant le suicide des agriculteurs rejoignent leurs corbillards de fortune. La nuit tombe, un agriculteur balaie frénétiquement les derniers restes de foin sur l'A16. « On balaie l'autoroute, ça prouve bien qu'on marche sur la tête, non ? » dit-il en levant la sienne. D'autres s'occupent de l'intendance, de gérer le buffet installé sur des tréteaux sur la bande d'arrêt d'urgence, de faire cuire les dizaines de kilos de viande et de servir les litres de bière. « On reçoit plein de dons des gens du coin, un boulanger vient nous apporter des croissants tous les matins depuis le début », raconte Laurine, une jeune agricultrice. Plus surprenant, l'usine Danone voisine, devant laquelle ces mêmes agriculteurs avaient manifesté il y a quelques mois, leur a offert des centaines de yaourts. Quelques jours plus tard, un supermarché Leclerc leur a fait livrer des kilos de courses. « Certains tentent de s'acheter de la tranquillité, on n'est pas dupes mais on accepte les dons ! » explique Matthieu Carpentier, lui aussi membre des Jeunes Agriculteurs.

Les gendarmes viennent tailler le bout de gras

Si cette organisation et cette solidarité rappellent inévitablement les ronds-points des Gilets jaunes, les agriculteurs en colère contestent cette analogie : « Nous sommes des professionnels et nous nous battons pour les droits des agriculteurs et uniquement des agriculteurs. Il n'y a pas de convergence des luttes ; ici, il n'y a que des paysans et on n'est pas des révolutionnaires ! On est ravis que des gens nous soutiennent mais c'est notre combat, et c'est nous qui le menons. » Les chauffeurs routiers de l'Oise ont bien essayé de se joindre au mouvement dès mercredi, ils ont été fermement éconduits. Ceux qui sont les bienvenus sur cette portion d'autoroute sont les élus, locaux ou nationaux. Rien que mercredi, Fabien Roussel, le secrétaire national du PCF, Nadège Lefebvre, la présidente LR du département de l'Oise, et Philippe Ballard, le député RN local, sont venus fouler le bitume. « On ne veut pas de récupération mais on sait que ce sont les politiques qui font la loi et qui la votent, donc on les accueille, ils nous écoutent et ils repartent, c'est tout », explique Régis Desrumaux. Fabien Roussel leur a bien proposé d'activer les réseaux communistes pour organiser une grande manifestation avec eux à Paris, mais lui aussi a été éconduit.

La différence la plus frappante est peut-être l'attitude des forces de l'ordre vis-à-vis d'un groupe d'une centaine de personnes qui bloquent une autoroute empruntée chaque jour par des milliers d'automobilistes. À une centaine de mètres du camp, devant et derrière, deux véhicules de la gendarmerie assurent la sécurité du blocage. Aux heures de repas, les gendarmes viennent même tailler le bout de gras. « Vous revenez quand vous voulez ! » s'amuse un gendarme au moment où une jeune lui sert le café. En fin de journée, les agriculteurs préviennent les forces de l'ordre du lieu de leur nouveau bivouac, parfois les gendarmes leur proposent de les emmener voir un autre lieu un peu plus loin, mais ils n'imposent rien. Demain, les Rastignac des champs quitteront l'Oise pour rejoindre Paris avec la ferme intention de bloquer plusieurs accès stratégiques. Les forces de l'ordre sont prévenues.

Commentaires 7
à écrit le 28/01/2024 à 12:11
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Quelle fin? Il n'y aura jamais de pénurie, au contraire, il y aura surproduction de tout un tas de produits transgeniques, "soignés" à la chimie dans d'immenses fermes pour les produits en plein champ (type céréales et oléagineux) et dans des bâtimen...

à écrit le 28/01/2024 à 11:01
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7 millions de français ont des maladies chroniques en lien avec des maladies dites auto- immunes dont les pesticides , intrants chimiques et combinaisons alimentaires sont très suspectées…en clair je mange du pain dont les pesticide h va combiner av...

à écrit le 28/01/2024 à 9:35
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"Notre fin sera votre faim", pour résumer, ils veulent nous affamer ,pas sur que les 9 sur 10 favorable aux agriculteurs pour le moment restent longtemps sur le même avis surtout le ventre vide.Mais, bon Darmanin a dit qu'il va laisser faire, on verr...

à écrit le 28/01/2024 à 8:48
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Moi je mange pas de maïs transgénique arrosé de pesticide et d'engrais, donc votre fin ne sera pas ma faim vous êtes tranquille.

le 28/01/2024 à 9:51
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Dans quelles régions de France cultive-t-on du maïs transgénique ? La France veut savoir. :-) Il faudrait choisir du sorgo (transgénique ou pas), il parait que c'est moins gourmand en eau. J'en ai utilisé (farine, mélangée à d'autres) pour des crêpe...

le 28/01/2024 à 10:17
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"Dans quelles régions de France cultive-t-on du maïs transgénique ? " Ils sont souvent indiqués par des marqueurs au sol discrets certes mais ils les marquent il faut bien qu'ils les identifient eux déjà. Par ailleurs les OGM me dérangent beaucoup mo...

le 28/01/2024 à 18:27
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@photo73 La loi n°2008-595 relative aux OGM prévoit l'obligation pour l'agriculteur de déclarer ses cultures d'OGM et pour l'administration de constituer un registre national indiquant la nature et la localisation des parcelles culturales d'OGM, q...

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