Colère des agriculteurs : Gabriel Attal annule la hausse de la fiscalité sur le gazole non routier (GNR)

Gabriel Attal a promis vendredi un « sursaut agricole » pour faire face à la colère du secteur, en annulant notamment la hausse du gazole non routier et des sanctions contre trois entreprises ne respectant pas les lois Egalim, qui visent à protéger les revenus des agriculteurs.
Gabriel Attal ce vendredi à Montastruc-de-Salies (Haute-Garonne)
Gabriel Attal ce vendredi à Montastruc-de-Salies (Haute-Garonne) (Crédits : Pierrick Merlet)

Est-ce une première victoire pour les agriculteurs ? Depuis le début du mouvement, lancé en région toulousaine, à Carbonne (Haute-Garonne) le 18 janvier, les agriculteurs conditionnent la levée des barrages à une venue du Premier ministre sur le terrain. C'est chose faite depuis ce vendredi. Le Premier ministre, Gabriel Attal, s'est rendu en fin d'après-midi à Montastruc-de-Salies (Haute-Garonne), pour répondre à leurs attentes. Autre condition à la levée des blocages, le contenu de sa visite. « Qu'il ne vienne pas les mains vides, cela ne servira à rien. Il peut rester à Paris dans ce cas », confiait encore récemment à La Tribune, Jérôme Bayle, l'un des leaders du mouvement de la grogne agricole en Haute-Garonne. « C'est un bon signal qu'il se rende dans le territoire de France où les revenus agricoles sont les plus bas », témoigne de son côté Carole Delga, la présidente socialiste de la Région Occitanie, présente sur place.

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À son arrivée, Gabriel Attal a ainsi pu échanger avec une trentaine d'agriculteurs locaux, dont Jérôme Bayle, au milieu de l'élevage bovin de 250 bêtes de Ludovic Calvet, l'hôte du jour. « C'est un moment important pour notre agriculture. Nous avons reçu le message (...) C'est un jour de sursaut. Nous avons décidé de mettre l'agriculture au-dessus de tout », a tout d'abord lancé le Premier Ministre, Gabriel Attal. Debout, face à son assemblée, avec des similitudes au Grand Débat tenu par Emmanuel Macron en réponse à la crise des Gilets Jaunes, il a ajouté « qu'il n'y a pas d'amour sans preuve d'amour ».

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Sa première preuve d'amour a porté sur l'épineux sujet du GNR (gazole non routier), dont le gouvernement avait précédemment acté une hausse de la fiscalité progressive jusqu'en 2030, suite à un accord avec les syndicats de la profession.

« Cette réforme du GNR ne passe pas. Mais le sens de cette réforme était clair. Cette hausse de fiscalité devait alimenter des dispositifs pour vous, les agriculteurs. Cela représente 70 millions d'euros pour 2023 et 140 millions pour 2024. Cela n'apporte rien aux finances publiques. Donc objectivement, nous arrêtons ce système kafkaïen. D'ici l'été, un nouveau système prendra place. Cette somme vous sera déduite en pied de facture. L'État compensera directement le distributeur. Enfin, nous arrêtons cette trajectoire de hausse de fiscalité sur le GNR », a présenté le chef du gouvernement.

Sur le plan financier, le Premier ministre va allouer une enveloppe de 50 millions d'euros supplémentaires pour l'indemnisation des exploitants agricoles touchés par la MHE dont l'Occitanie est la région la plus concernée. La prise en charge des frais vétérinaires par l'État pour faire face à cette épidémie est aussi revue à la hausse, à 90% contre 80% jusqu'à présent. Le fonds d'urgence agricole pour la Bretagne va aussi « être doublé ». Gabriel Attal a également promis une nouvelle visite de Marc Fesneau, le ministre de l'Agriculture, en Occitanie dans « les tous prochains jours » pour annoncer des mesures de trésorerie et pour faire face à la surproduction dans la viticulture.

Alléger la charge administrative

Sur le plan administratif, le chef du gouvernement a été ambitieux sur ses intentions : nos agriculteurs veulent être dans les champs, pas devant les écrans. Pour y parvenir, le jeune locataire de Matignon a annoncé le lancement d'un Mois de la simplification pour tenter d'alléger la lourdeur administrative à laquelle font face les agriculteurs.

« En Haute-Garonne, quatre arrêtés préfectoraux ont été revus en quelques jours suite à des réunions entre le préfet et les agriculteurs. Je veux que ce modèle de concertation soit dupliqué dans tous les départements pour répondre à votre attente », a lancé Gabriel Attal.

Lui-même y a apporté sa contribution en faisant savoir qu'il allait instaurer « dix mesures inédites de simplification, par décret, dès demain et la semaine prochaine. » Tout d'abord, il va limiter la possibilité de déposer un recours contre un projet agricole sur deux mois, contre neuf actuellement. En cours de recours déposé, un futur décret ne laissera que 10 mois à la justice pour trancher afin de ne pas bloquer l'agriculteur dans son développement. « Nous allons aussi revoir l'obligation légale de débroussailler, sur laquelle plusieurs réglementations se contredisent », ajoute-t-il pour ne citer que ces exemples.

Assouplissement des normes

Gabriel Attal a-t-il répondu aux attentes des agriculteurs, qui l'ont timidement applaudi à l'issue de sa prise de parole. Parmi les revendications à court terme les plus sensibles demandées, une arrivait en tête : le report voire l'annulation de la taxation sur le GNR (gazole non routier) de manière progressive jusqu'en 2030. « Sur un euro de GNR, cela va représenter 15 centimes de taxe pour nos exploitations », confiait à La Tribune un manifestant lundi 22 janvier. Autre point demandé par les manifestants, un assouplissement des normes environnementales et un déblocage plus rapide et plus simple des aides de la PAC (Politique agricole commune) et celles allouées aux crises exceptionnelles comme la grippe aviaire et la MHE, qui ont concerné en premier chef l'Occitanie ces derniers mois et années.

« Je ne comprends pas qu'il faut quatre mois voire plus pour verser une aide d'urgence. Nous allons accélérer le versement de ces aides, tout comme celles de la PAC (...) Sortir de l'Europe, c'est vous priver de neuf milliards d'euros », a aussi ajouté l'ancien ministre de l'Éducation nationale.

Autre point crucial, les manifestants demandent un plan de sécurisation de l'approvisionnement en eau, par des projets de retenue d'eau, question aussi primordiale dans le Sud-Ouest. Carole Delga a déjà annoncé quelques avancées en ce sens lors d'une rencontre avec les agriculteurs, mais, sur ce point, Gabriel Attal n'a pas pris d'engagements.

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 Pour tenter d'apaiser la colère, la FNSEA, qui semble dépassée par sa base, a dévoilé en début de semaine une liste de 24 mesures, transmise au gouvernement. Parmi les revendications à court terme les plus sensibles, figure le « rejet du plan Ecophyto ainsi qu'un moratoire sur les interdictions ». Le gouvernement français a en effet présenté fin octobre sa nouvelle stratégie de baisse de l'usage des pesticides, en indiquant vouloir les réduire de moitié en 2030 par rapport à la période 2015-2017 : une perspective rejetée par les agriculteurs qui estiment ne pas encore disposer d'alternatives suffisantes.

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 La FNSEA demande aussi le « refus » d'une cartographie « zones humides » présentée par le ministère de la transition écologique afin de les protéger, puisque selon le syndicat elle parvient à confisquer aux agriculteurs 30% de la surface agricole utile. « Sur ce point, nous faisons une pause dans tout le pays et nous allons travailler le dossier », a promis le Premier ministre. Il exige encore le « rejet en bloc des zones de non traitement » : les distances minimales à respecter lors du traitement des parties aériennes des plantes aux abords des habitations, que les défenseurs de l'environnement et de la santé des riverains considèrent en revanche encore insuffisantes.

Conflit interne entre les bottes de paille ?

Par conséquent, ces annonces seront-elles suffisantes pour calmer la colère des agriculteurs, qui a pris une tout autre tournure huit jours plus tôt ? Déclenché en Occitanie, le mouvement se propage dans tout le pays au fil des jours et surtout les blocages gagnent en dureté et en intensité.

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L'autoroute A1, qui relie Paris à la Belgique, est totalement bloquée ces dernières heures. De plus, la FDSEA Île-de-France a annoncé l'installation de cinq barrages autour de Paris dès ce vendredi, à partir de 14 heures, alors que jusqu'ici le blocage de la capitale apparaissait comme un dernier recours au sein de la profession agricole.

Plus au sud, les agriculteurs ont notamment décidé de bloquer les accès routiers à la principauté de l'Andorre. À Toulouse et Agen, des actions ont été menées contre des centrales d'achats et des supermarchés pour montrer leur colère contre les faibles marges offertes par l'industrie de l'agroalimentaire que la loi Egalim est censée protéger.

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Sur le barrage de Carbonne, là où tout a commencé, la revendication majeure est claire : « nous nous battons pour un revenu décent pour les agriculteurs », rappelle un manifestant présent sur place. L'Occitanie est parmi les régions de France où les agriculteurs gagnent le moins bien leur vie, avec, par exemple, une moyenne de 6.000 euros de revenus annuels en Haute-Garonne, tous secteurs confondus. Jérôme Bayle, le leader du mouvement, s'est dit globalement satisfait et a ouvert la porte à la levée du barrage du côté de Carbonne. À contrario, Luc Mesbah, le secrétaire général de la FDSEA en Haute-Garonne, s'est dit déçu : « On n'est pas satisfait, ce ne sont que des mesurettes ». Ce soir, le Premier ministre a peut-être créé une scission au sein du mouvement des agriculteurs en colère.

Commentaires 16
à écrit le 27/01/2024 à 11:49
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@ la chose : merci d avoir rappelé cette vérité aux autres commentateurs ignorants des sujets mais ayant un avis sur tout .. on se plaint de la cgt qui est il est vrai parfois caricaturale et old fashion mais en réalité c’ est tout lé adn du syndic...

à écrit le 27/01/2024 à 11:49
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@ la chose : merci d avoir rappelé cette vérité aux autres commentateurs ignorants des sujets mais ayant un avis sur tout .. on se plaint de la cgt qui est il est vrai parfois caricaturale et old fashion mais en réalité c’ est tout lé adn du syndic...

à écrit le 27/01/2024 à 11:45
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il se souvient que les gilets jaunes, c'est parti de la taxe ecolobobo de segolene royal de 35 cts sur le diesel, ce qui sauve la planete donc le budget socialiste.....le pb, c'est que vu le nombre de lois normes et autres joyeusetes eoloofachoes, le...

à écrit le 27/01/2024 à 11:42
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@ la chose : merci d avoir rappeler cette vérité aux autres commentateurs ignorants des sujets mais ayant un avis sur tout .. on se plaint de la cgt qui est il est vrai parfois caricatural et ils fashion mais en réalité x’x est tout le syndicalisme ...

à écrit le 27/01/2024 à 10:45
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La recette magique … que tous les consommateurs baissent leur consommation ça fera baisser les prix … on cède aux agriculteurs mais on ay’ugmente sans vergogne le prix de l électricité des assurances des frais bancaires etc..

à écrit le 27/01/2024 à 9:54
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Mais le smicard pour aller au boulot doit la payer ???

à écrit le 27/01/2024 à 9:45
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Bonjour, Comme toujours le premier ministre a fait matche arrière, ons vas donc maintenir la détaxe sur les carburant... s'est si simple .. sauf que cela vas conre l'égalité et la justice sociale...... Favorisant la polution et la consommation exc...

le 27/01/2024 à 10:15
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"comme toujours ... " sauf qu'il n'était pas premier ministre quand le président de la fnsea a donné son accord sur la taxation du gnr ! c'est plutôt à Arnaud rouseau que votre remarque devrait s'adresser .

à écrit le 27/01/2024 à 9:28
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Petite colère tranquille et peinarde des agriculteurs qui vont encore récolter gros... en argent public. Juste à lever le petit doigt.

à écrit le 27/01/2024 à 9:26
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Et si NOUS TOUS faisions la même chose pour obtenir le non rétablissement de la taxe sur l'électricité? Notre gouvernement se déciderait peut-être à couper dans ses frais généraux, rémunérations, transports et "frais de représentation et de mandat" (...

à écrit le 27/01/2024 à 7:57
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Encore une victoire du lobby agro-industriel. Nos dirigeants sont faibles.

à écrit le 27/01/2024 à 1:39
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la présidente PS UNe blague ..

à écrit le 26/01/2024 à 21:51
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7 ans qu'ils sont au pouvoir, et d'après leurs propos, ils viennent d'arriver.... Evidemment, on a oublié les agriculteurs depuis 40 ans, et jamais personne ne parle de ces victimes de la société.... Evidemment, la FNSEA soufre en silence, et n'est...

le 27/01/2024 à 7:49
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La FNSEA souffre vous parlez du défunt M.Beulin un agro industriel ou l'actuel M.Rousseau un pauvre gentlemen farmer ou Mme Lambert qui voulait être là chouchou du pouvoir demandant son ticket unique à pour entrer à l'Elysée. Les différentes directio...

le 27/01/2024 à 7:56
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"Evidemment, la FNSEA soufre en silence, et n'est pas comme la CGT qui passe son temps à se plaindre." LOL ! A écouter avec un air de violon surtout ! ^^

le 27/01/2024 à 10:11
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@René MONTI "Evidemment, la FNSEA soufre en silence," Pas tous : Le patron de la FNSEA ,Arnaud Rousseau est administrateur ou dirigeant d’une grosse quinzaine d’entreprises, de holdings et de fermes : directeur de la multinationale Avril (Isio...

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