Les syndicats agricoles hésitent sur le calendrier d'une mobilisation nationale

Les représentants des agriculteurs français travaillent encore sur la suite à donner au mouvement.
(Crédits : Reuters)

Les agriculteurs français vont-ils marcher dans le sillon des producteurs allemands qui cette semaine se sont rassemblés avec leurs tracteurs à Berlin et des fermiers polonais, roumains, slovaques et hongrois qui multiplient les protestations contre l'afflux de céréales et d'autres denrées alimentaires d'Ukraine ? Comme dans le reste de l'Europe, les motifs de mécontentement des agriculteurs ne manquent pas en France. Ils vont de l'inflation des coûts de production aux prix payés par les industriels de l'agroalimentaire et les distributeurs, des normes environnementales aux indemnisations après les catastrophes naturelles ou les maladies vétérinaires, a rappelé lors de ses vœux à la presse Arnaud Rousseau, le président de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), le 10 janvier. Et depuis quelques jours, des foyers de colère s'allument au niveau local, notamment en Occitanie. À Toulouse, mardi, un millier d'agriculteurs ont déversé de la paille et du crottin devant des institutions. Depuis jeudi soir, ils bloquent plusieurs axes routiers autour de la ville. Vendredi, à Carcassonne, une explosion a visé un bâtiment vide de la direction régionale de l'environnement. Entre-temps, en Mayenne, des éleveurs laitiers manifestent devant plusieurs sites du géant du lait Lactalis.

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Menaces sur le Salon de l'agriculture

Au niveau national, toutefois, pour le moment, seule la Coordination rurale, deuxième syndicat agricole français, souvent présentée comme étant à la droite de la FNSEA, a appelé explicitement à manifester le 25 janvier. Elle prévoit d'organiser des « actions un peu partout en France », notamment des actes de « bâchage des radars », voire des « opérations plus spectaculaires ».

En décembre, une mobilisation organisée dans tout l'Hexagone à l'appel des Jeunes Agriculteurs (JA) et de la FNSEA a en effet déjà permis d'obtenir quelques résultats qui ont calmé les esprits. Pendant plusieurs semaines, les agriculteurs, sous le slogan « On marche sur la tête », avaient retourné les panneaux signalétiques indiquant les noms des communes, pour illustrer un « monde à l'envers ». La Première ministre, Élisabeth Borne, avait fini par céder à la pression, en acceptant d'abandonner deux hausses fiscales prévues dans le projet de loi de finances 2024 et dénoncées par les agriculteurs. Après cette victoire, les principaux syndicats agricoles ont surtout misé sur la menace d'un Salon international de l'agriculture peu serein pour obtenir rapidement d'autres décisions favorables. Prévu du 24 février au 3 mars, celui-ci représente une vitrine médiatique importante pour le président et les ministres. « Les choses doivent se mettre en place d'ici là », a mis en garde le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, le 10 janvier, sous peine que les agriculteurs ne se contentent plus des traditionnelles « photos avec les vaches ».

« Susciter le soutien de l'opinion »

La pression de la base semble toutefois commencer à ouvrir une brèche. La FNSEA et JA n'excluent plus une mobilisation nationale avant le Salon de l'agriculture. La semaine prochaine, ils réuniront même leurs instances de décision afin d'annoncer des actions conjointes dès jeudi. Mais au-delà du calendrier et des priorités, les syndicats s'interrogent sur la méthode. L'enjeu est en effet de parvenir à une « mobilisation d'envergure » sans pour autant « embêter tout le monde », comme dans les cas des blocages de routes par les tracteurs, explique Pierrick Horel, secrétaire général de JA. Ils cherchent donc une formule semblable à celle choisie en décembre, qui a eu l'avantage d'être « pédagogique » et de « susciter le plein soutien de l'opinion », souligne l'ancienne présidente de la FNSEA Christiane Lambert, aujourd'hui à la tête du Comité des organisations professionnelles agricoles (Copa) européen. Loin de souhaiter s'aliéner le reste de la population, les agriculteurs préfèrent en effet insister sur un mécontentement commun : « Tous les Français en ont marre des normes et de la surtransposition, souligne Christiane Lambert. Tous, qu'ils soient chefs d'entreprise ou salariés, vivent dans leur quotidien les complexités administratives que nous dénonçons. »

Crainte d'une « instrumentalisation »

La récupération de la colère des agriculteurs par l'extrême droite gêne les syndicats agricoles, qui partagent rarement la même vision politique, notamment en matière d'intégration européenne. C'est d'ailleurs aussi à cause de cette « instrumentalisation » que la Confédération paysanne, classée à gauche, a décidé de ne pas appeler à rejoindre le mouvement qui se dessine au niveau national, sans pour autant exclure des manifestations locales. Et ce malgré « la colère, l'inquiétude, l'angoisse » que ressentent aussi ses adhérents, explique sa porte-parole Laurence Marandola. Restant « attentive » à ce qui se passe dans les campagnes, la Confédération paysanne réévaluera toutefois elle aussi la situation mercredi, lors d'une réunion de ses instances de décision.

Commentaires 7
à écrit le 22/01/2024 à 16:06
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À partir de 1957, le CNJA est investi par la Jeunesse agricole catholique (JAC) et développe alors un projet politique axé sur la « modernisation » de l'agriculture française. Selon l'historien Gilles Luneau, la Jeunesse agricole catholique qui rep...

à écrit le 22/01/2024 à 8:35
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En coulisse le politique mène déjà l'agriculture . Qui hésite? la FNSEA qui tire les ficelles en coulissent avec le gouvernement. L'hésitation montre que le gouvernement à déjà gagné une manche. Bravo Matignon belle manoeuvre politique. Allez encore ...

à écrit le 21/01/2024 à 15:57
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Choisir la date de mobilisation c'est choisir la meilleure période de visibilité outre, le national, l'international serait un plus ! ;-)

à écrit le 21/01/2024 à 9:39
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Toujours la même question ou passe le pognon de la PAC ? L’enveloppe globale allouée aux États de l'Union pour la PAC est de 264 milliards d’euros pour la période 2023-2027. La France obtiendra 45 milliards d'euros sur la période 2023-2027 qui seront...

à écrit le 21/01/2024 à 8:44
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Bon ben finalement vu qu'ils râlent comme d'habitude il faut croire qu'ils ne vont pas si mal que ça nos agriculteurs.

à écrit le 21/01/2024 à 7:37
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Tout cela est du aux traités de libre échange ne vous laissez pas avoir ,tout politique qui ne vous promet pas la sortie de l Europe se fiche royalement de vous

le 21/01/2024 à 8:42
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Mais pas du tout, tout ça c'est la faute aux écolos !

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