Les déplacements présidentiels ont un air de campagne électorale. A sept mois du scrutin décisif, le chef de l'Etat est sur tous les fronts en cette rentrée. Accompagné du ministre de l'Economie Bruno Le Maire et celui des PME Alain Griset, Emmanuel Macron s'est rendu aux rencontres de l'U2P, l'une des principales organisations patronales françaises, à la maison de la Mutualité ce jeudi 16 septembre. L'objectif est de présenter un grand plan pour les indépendants en première ligne durant les confinements et l'application des mesures sanitaires.
"Le déplacement du Président de la République doit permettre de prendre le pouls des entreprises du quotidien qui sont si importantes pour notre économie. C'est l'occasion de faire un bilan en sortie de crise et un bilan de l'accompagnement de l'Etat", indiquent les proches du président de la République.
Dans l'après-midi, les deux ministres doivent se rendre à Saint-Germain en Laye pour rencontrer des professionnels touchés par la crise. Dans le contexte de la bataille électorale pour 2022, le principal lobby des indépendants en France a pu bénéficier d'une écoute à Bercy compte tenu de l'ancienne position du ministre des PME Alain Griset. Entre 2017 et 2020, il a été président de l'Union des indépendants.
Une vingtaine de mesures attendues
Lors de son déplacement, le quadragénaire a présenté un arsenal d'une vingtaine de mesures à destination des indépendants. Parmi les principales annonces, certaines concernent le patrimoine personnel des entrepreneurs.
"Le principal point est la protection du patrimoine de l'indépendant. La règle actuelle est que l'ensemble du patrimoine peut être saisi en cas de défaillance personnelle. Ce qui change est que le patrimoine personnel ne pourra plus être saisi comme les voitures par exemple", explique l'Elysée.
Alors que jusqu'ici, seule leur résidence principale était protégée en cas de coup dur professionnel, désormais, cette protection sera élargie à d'autres éléments du patrimoine. Le plan prévoit également de faciliter la transmission d'entreprises, en particulier au sein d'une même famille, via un allègement de la fiscalité sur les transmissions.
Le plan "indépendant" vise à l'amélioration de la protection sociale de ces travailleurs "en diminuant le coût de l'assurance volontaire contre les risques et les maladies professionnelles . Nous voulons également faciliter les relations avec les Urssaf en permettant la modulation en temps réel des cotisations. C'est une demande ancienne des indépendants" expliquent les conseillers du chef de l'Etat.
Outre ces principales annonces, un autre dispositif doit faciliter la reconversion des professionnels en leur facilitant l'accès à des indemnités spécifiques. Il s'agit de l'allocation travailleur indépendant (ATI). L'une des promesses du candidat Macron en 2017 était d'élargir l'assurance-chômage à ces travailleurs. Plus de deux ans après le passage de la réforme controversée de l'assurance-chômage au cœur de l'été 2019, cette mesure est très loin d'avoir rempli ces objectifs.
"Très peu de travailleurs indépendants ont eu recours aux indemnités de l'assurance-chômage, concède l'Elysée. Seules 1.000 personnes ont eu recours au dispositif de l'Unedic contre un objectif de 29.000. Les critères ont peut-être été trop restrictifs" poursuit-on. En mettant en place un grand nombre de critères, le gouvernement avait écarté beaucoup de bénéficiaires potentiels. Sur ce point, il ne s'agit donc pas d'une nouvelle annonce mais d'un changement de modalités.
Un texte de loi spécifique, pas de chiffrage global du coût des mesures
Cette panoplie de mesures doit faire l'objet d'un projet de loi spécifique pour les indépendants. Le plan devrait également se matérialiser dans le projet de loi de finances 2022 (PLF 2022) et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS 20222) présentés tous les deux dans les prochains jours. Les dispositifs seront applicables dès janvier 2022 précisent les proches du chef de l'Etat.
En revanche, aucun chiffrage précis de l'ensemble des mesures n'a été apporté par l'exécutif. "ll y a beaucoup de mesures opérationnelles qui visent à simplifier la vie des entreprises. Certaines mesures fiscales pourraient coûter de l'ordre de 50 à 150 millions d'euros mais il n'y a pas chiffrage global à ce stade [...] ces annonces feront l'objet de débat au Parlement au moment du budget" affirme l'Elysée.
Une conjoncture favorable, une transformation des aides
Alors que les indicateurs économiques sont au beau fixe et que la campagne de vaccination a rattrapé son retard, la conjoncture est relativement favorable pour l'exécutif qui veut occuper le terrain après une pandémie chaotique. Si l'exécutif a annoncé la fin du "quoi qu'il en coûte" à la fin du mois d'août, une grande partie de l'économie française et du privé va rester sous perfusion pendant cette période électorale. Malgré un rebond de l'économie très net, le fonds de solidarité a été prolongé au mois de septembre. "On met fin à l'aide forfaitaire et généralisée. Le nouveau régime de soutien va permettre de capter certains secteurs confrontés à des difficultés. A partir du mois d'octobre, les mesures d'aide vont permettre la prise en charge des coûts fixes. Il n'est pas question d'abandonner les uns et les autres" assure-t-on dans l'entourage du chef de l'Etat. En outre, une partie des indépendants a payé un lourd tribut pendant la crise sanitaire passant parfois à travers les mailles des filets de sécurité. En annonçant ce plan, le gouvernement n'entend pas abandonner ses potentiels électeurs.
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Qui sont les indépendants ?
Artisans, commerçants, chauffeurs de taxis, professions libérales....les indépendants regroupent une multitude de profils. lls sont environ 3 millions sur l'ensemble du territoire français. Ces travailleurs ont en moyenne 47 ans et sont en majorité des hommes (63%). lls gagnent en moyenne 2.580 euros par mois mais ce chiffre masque d'importantes disparités. Après avoir chuté pendant des décennies, le nombre d d'indépendants est reparti à la hausse dans les années 2000 en raison notamment de la création du statut d'auto-entrepreneur. La libéralisation de la création d'entreprises a boosté les immatriculations dans les services notamment.