Emmanuel Macron est bien en campagne. Même si la virulence du variant Delta a obligé le chef de l'Etat a annoncé une batterie de nouvelles mesures sanitaires lors de son allocution le 12 juillet au soir, il a axé une bonne partie de son discours sur la relance. "Les semaines à venir seront donc celles de la mobilisation pour bloquer le virus et pour continuer de relancer notre économie. L'été de mobilisation pour la vaccination sera aussi un été de relance" a déclaré le président.
A moins d'un an de la présidentielle, le quadragénaire veut déjà se projeter dans la France de 2030. Et même si son agenda de réformes est chamboulé par la crise, il veut montrer aux Français qu'il garde le cap du "quoi qu'il en coûte". Après la traditionnelle cérémonie du 14 juillet sur les Champs Elysées, Emmanuel Macron a prévu un déplacement dans les Hautes-Pyrénées à l'occasion d'une étape du Tour de France en fin de semaine. Il se rendra sur le site du constructeur de matériel roulant espagnol CAF à Bagnères de Bigorre puis dans la ville de Lourdes empêtrée par la chute du tourisme depuis le début de la pandémie. Ce déplacement aux allures de campagne électorale risque cependant d'être rapidement percutée par l'évolution de la situation sanitaire. La communauté scientifique a tiré la sonnette d'alarme le week-end dernier et le ministre de la Santé Olivier Véran redoute un été comparable à celui de l'année dernière. "La charge hospitalière pour l'instant n'augmente pas, mais il va se passer la même chose que l'été dernier, c'est-à-dire que les jeunes vont contaminer les moins jeunes, et, parce que tout le monde n'est pas vacciné, vous allez avoir une augmentation de la pression sanitaire, une augmentation des cas graves et des hospitalisations" a signalé le ministre d'après des propos rapportés par l'Agence France Presse (AFP).
Un plan d'investissements à la rentrée
Le chef de l'Etat est revenu sur un plan d'investissements en préparation qui vise à bâtir la France de 2030. Sans vraiment rentrer dans les détails, le locataire de l'Elysée a l'ambition de faire émerger en France et en Europe "les champions de demain qui, dans les domaines du numérique, de l'industrie verte, des biotechnologies, ou encore de l'agriculture, dessineront notre avenir". De son côté, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a déclaré à l'antenne de France Info ce mardi 13 juillet qu'il rendrait "fin juillet" ses propositions à Emmanuel Macron pour le nouveau plan d'investissement voulu par le président de la République sans préciser le montant d'investissements envisagé, après le plan de relance de 100 milliards d'euros. "C'est le moment d'investir tout simplement parce que cette pandémie va rebattre les cartes des rapports de force mondiaux dans les mois, plus d'ailleurs que dans les années, qui viennent", a-t-il insisté. Ce plan portera "à la fois dans les compétences humaines", mais aussi dans "le capital, dans les nouvelles technologies, dans les innovations de rupture", a précisé le ministre.
Le chef de l'Etat a également annoncé que le gouvernement devait s'attaquer à la formation et la requalification des chômeurs de longue durée. La pandémie a plongé un grand nombre de demandeurs d'emploi dans un profond désarroi. En effet, même si l'activité partielle a permis de préserver le travail de ceux qui étaient déjà en poste, beaucoup de chômeurs ont vu leur situation professionnelle se dégrader très rapidement dans un marché du travail submergé par les différentes vagues épidémiques.
Enfin, il a mis l'accent sur la jeunesse en annonçant un revenu d'engagement pour les jeunes. Il visera "les jeunes sans emploi ou formation et sera fondé sur une logique de devoirs et de droits". Sans surprise, Emmanuel Macron a renoncé à l'extension du revenu de solidarité pour les jeunes de 18 à 25 ans.
Une croissance à 6% sous réserve d'une amélioration de la situation sanitaire
La plupart des derniers indicateurs conjoncturels indiquent que la confiance des agents économiques (entreprises et consommateurs) s'est redressée ces dernières semaines. Les grands instituts de statistiques ont révisé à la hausse leurs prévisions de croissance autour de 6%. Et même si Bercy table sur une croissance "prudente de 5% en 2021", Emmanuel Macron n'a pas hésité à avancer le chiffre de 6% de croissance du produit intérieur brut (PIB) lors de son intervention télévisée. "Sur le plan économique, le « quoiqu'il en coûte auquel je m'étais engagé dès mars 2020, non seulement nous a permis de protéger nos entreprises et nos emplois, mais a préservé le pouvoir d'achat de nombre de Français et est à l'origine d'un vigoureux rebond. Notre croissance devrait s'établir à 6% en 2021, en tête des grandes économies européennes", a-t-il annoncé.
Cette amélioration récente de la conjoncture qui s'explique en grande partie par la réouverture d'un grand nombre de secteurs et de l'avancée de la vaccination ne doit pas faire oublier que l'évolution de la situation sanitaire demeure la principale boussole de l'économie tricolore depuis près d'un an et demi. Et même si la vaccination devrait permettre de protéger une grande partie de la population, les aléas sanitaires depuis le début de la pandémie ont complètement chamboulé les plans du gouvernement. Au début du printemps 2020, l'exécutif tablait sur une crise sanitaire rapide.
Un calendrier des réformes ajourné
Sur le front social, la pandémie a chamboulé l'agenda des principales réformes de l'exécutif. Emmanuel Macron a assuré que la réforme contestée des retraites devra être engagée "dès que les conditions sanitaires seront réunies". "Alors si je demande au gouvernement de Jean Castex de travailler avec les partenaires sociaux sur ce sujet dès la rentrée, je ne lancerai pas cette réforme tant que l'épidémie ne sera pas sous contrôle et la reprise bien assurée" a-t-il ajouté. Au regard de l'agenda présidentiel et de la situation sanitaire, relancer le chantier miné de la réforme des retraites paraît bien périlleux aux yeux des partenaires sociaux.
En revanche, le Président de la République a montré sa détermination à mener jusqu'au bout la réforme de l'assurance-chômage torpillée à plusieurs reprises par le Conseil d'Etat. "Elle sera pleinement mise en œuvre dès le premier octobre. Autour d'une volonté simple : en France, on doit toujours bien mieux gagner sa vie en travaillant qu'en restant chez soi, ce qui n'est actuellement pas toujours le cas" a-t-il déclaré. Cette affirmation n'a pas manqué de faire réagir dans les rangs des partenaires sociaux. "FO conteste le bien-fondé de la réforme de l'assurance chômage" dont elle dénonce "l'injustice à l'égard des travailleurs les plus précaires", comme "le bien-fondé de la mise en cause du système de retraite et l'inéluctabilité du recul de l'âge de la retraite" a écrit le syndicat dans un communiqué.