
L'exécutif veut tenter de redorer son image auprès des syndicats. Après les trois mois de contestation contre la réforme des retraites, les relations entre le gouvernement et les différentes confédérations sont au point mort. Ce vendredi 28 avril, la Première ministre, Elisabeth Borne, a envoyé des invitations aux différentes organisations, afin de mettre en place « un nouvel agenda social » dans les prochains mois.
Lors de sa conférence de presse mercredi dernier, pour présenter sa feuille de route des 100 jours, la cheffe du gouvernement a déclaré vouloir « bâtir un nouveau pacte de la vie au travail ». Mais les responsables syndicaux pourraient à nouveau bouder ce nouvel agenda. Toujours isolée et sans majorité absolue, la locataire de Matignon veut tenter de reprendre la main sur le calendrier législatif, alors que les déplacements des ministres sont encore marqués par des concerts de casseroles et des tensions partout sur le territoire.
Un calendrier qui risque de soulever des critiques
A la veille du week-end du 1er mai, marquant la fête du Travail, les ministères de l'Economie et du Travail ont levé le voile sur le projet de loi « partage de la valeur ». Il s'agit en réalité de la retranscription législative de l'accord national interprofessionnel (ANI) signé en février dernier.
« Dans les trois mois qui viennent, le Parlement débattra du projet de loi transposant l'accord entre les partenaires sociaux sur le partage de la valeur. C'est un texte est important », a déclaré Elisabeth Borne, lors de son point presse mercredi.
Sans surprise, le gouvernement a présenté les grandes lignes contenues dans l'accord. En revanche, le calendrier retenu risque de soulever de nombreuses critiques. Pour rappel, l'accord a été signé par quatre syndicats sur cinq. La CGT a boudé ce texte, car il n'abordait pas la question des salaires.
Une quinzaine d'articles
Conclu le 10 février, l'accord national interprofessionnel (ANI) a pour objectif de généraliser des dispositifs comme l'intéressement, la participation et les primes de partage de la valeur (PPV) à toutes les entreprises de plus de 11 employés, ainsi que de développer l'actionnariat salarié. Reprenant l'accord, le projet de loi prévoit que les entreprises entre 11 et 49 employés et qui sont rentables - dont le bénéfice net représente au moins 1% du chiffre d'affaires pendant trois années consécutives - doivent présenter au moins un dispositif à leurs salariés.
Le projet de loi va également transcrire l'obligation pour les entreprises de plus de 50 salariés de négocier une manière de distribuer un éventuel bénéfice exceptionnel tout en laissant - conformément à l'accord interprofessionnel - aux employeurs la définition d'un tel bénéfice hors norme.
En revanche, l'exécutif a écarté l'option d'un prélèvement ou d'une taxe sur les superprofits, évoqué par Emmanuel Macron. Pour tenter de faire baisser la tension, le chef de l'Etat avait suggéré l'idée d'un prélèvement sur les rachats d'actions, lors d'un entretien au journal télévisé de France 2. Le président avait demandé au gouvernement de travailler sur « une contribution exceptionnelle » pour que « les travailleurs puissent profiter » de cette manne.
Une obligation pour les entreprises à partir du premier janvier 2025
Le calendrier retenu par l'exécutif risque, lui aussi, de faire bondir les syndicats. En effet, les représentants des salariés avaient alerté sur la nécessité d'agir en urgence sur le pouvoir d'achat des salariés au regard de la flambée des prix. Ecartant toute possibilité d'indexation des salaires (hormis le Smic) sur l'inflation, le gouvernement avait promis de mettre le paquet rapidement sur un partage plus juste des richesses au sein des entreprises.
Mais la mise en œuvre du texte à partir du 1er janvier 2025 pourrait finalement arriver trop tard. En effet, l'inflation continue de grimper en France à 5,9% en avril, contre 5,7% en mars. L'indice des prix à la consommation est surtout poussé par les produits alimentaires et les services, et moins par l'énergie. Dans ce contexte brûlant, l'opération apaisement du gouvernement pourrait bien faire un flop. En effet, la consommation et l'investissement des Français s'essoufflent depuis maintenant plusieurs trimestres, alors que la demande est un moteur traditionnel de l'économie tricolore.