Projet de loi immigration : la grande discrétion des patrons sur les métiers en tension

Ils refusent en majorité de se prononcer sur l’article 3 du texte gouvernemental..
Fanny Guinochet
Un travailleur chargé de la plonge dans un restaurant parisien.
Un travailleur chargé de la plonge dans un restaurant parisien. (Crédits : GUY LEROY)

UN GRAND EMBARRAS. Quand il s'agit de se prononcer sur le projet de loi immigration les patrons se dérobent. Pourtant, selon le gouvernement, l'article 3 du texte est fait pour eux : il facilite la régularisation des travailleurs sans papiers dans les métiers en pénurie de main-d'œuvre. Un étranger qui travaille durant au moins huit mois dans un secteur en tension pourra se voir délivrer de « plein droit » une carte de séjour temporaire. Sont ciblés le bâtiment, l'hôtellerie-restauration, la propreté... « Je ne connais pas un patron dans ces secteurs qui n'a pas de problème de main-d'œuvre et qui ne soit pas favorable à ce texte », plaide un ministre.

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Certes, mais la plupart se gardent bien de le dire. Seules quelques fédérations, comme l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (Umih), présidée par le chef étoilé Thierry Marx, montent au créneau pour soutenir le projet de loi. Près de 200 000 salariés ont quitté l'hôtellerie-restauration depuis la pandémie. Les hausses de salaires et une meilleure organisation du travail ne suffisent pas à les faire revenir. « Aujourd'hui, nous tenons grâce aux sans-papiers. Pour la plonge, par exemple, vous ne trouvez que des Maliens, des Bangladais, des Pakistanais. La régularisation des travailleurs étrangers est indispensable », assure un patron de brasserie parisienne qui préfère rester anonyme.

Autre filière qui milite pour une intégration plus large des travailleurs immigrés : les services d'aide à la personne où 800 000 emplois sont à pourvoir d'ici à 2030. La Fédération des particuliers employeurs de France, la Fepem, met déjà en place des parcours d'intégration pour les étrangers. Mais, la loi lui permettrait de passer la vitesse supérieure.

« Le sujet est devenu bien trop politique », plaide le Medef pour justifier sa réserve. Et pour cause, la bataille parlementaire porte justement sur cet article 3.

« Il n'y a que des coups à prendre à se prononcer sur ce texte », résume Guillaume Richard, président fondateur du groupe de services à la personne Oui Care, qui compte 20 000 salariés représentant 140 nationalités. Et ce membre du Medef d'expliquer : « Il y a le risque d'être accusés de néocolonialisme par l'extrême gauche, car nous prenons des talents à des pays souvent pauvres, et par l'extrême droite de favoriser un appel d'air pour l'immigration clandestine. » Sans compter que, dans les rangs patronaux, les adhérents sont tout aussi divisés : une partie des patrons est sensible au discours anti-immigration du Rassemblement national, quand d'autres, au contraire, assurent que l'intégration par le travail doit être encouragée.

Aussi le Medef, la CPME et l'U2P préfèrent-ils adopter une position officielle très consensuelle : « Avec 7 % de chômeurs dans ce pays, faisons plutôt en sorte de les ramener vers l'emploi. » En coulisse, pourtant, nombre de chefs d'entreprise estiment l'objectif intenable. Ne serait-ce que parce que dans l'agroalimentaire, la propreté, le bâtiment... seule la main-d'œuvre immigrée accepte les postes les plus pénibles.

Selon une étude de la Dares de 2021, 39 % des employés de maison sont des immigrés, 28 % des agents de gardiennage et de sécurité, 27 % des ouvriers non qualifiés du BTP, 17 % des agents d'entretien... « De fait, la création d'un titre de séjour spécifique serait une solution pour faire venir en France les compétences dont notre économie a besoin », juge Alexandre Pham, à la tête de l'entreprise d'intérim MisterTemp. Pour ce membre de l'association patronale CroissancePlus, la loi immigration permettrait surtout d'en finir avec l'hypocrisie de notre système qui interdit à des sans-papiers d'exercer et les maintient des années dans l'illégalité.

Fanny Guinochet
Commentaires 35
à écrit le 07/11/2023 à 10:12
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Certains semblent oublier le paradoxe de l’approche néolibérale (un extrémisme) qui n’a pas réduit l’intervention de l’État dans le système économique, mais a permis aux pouvoirs forts dans ce système de contrôler les institutions publiques afin d’ut...

à écrit le 06/11/2023 à 17:56
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Si certaines entreprises (par exemple des restaurants) ne peuvent survivre en payant convenablement leurs employés, c'est qu'elles ne sont pas économiquement viables et doivent fermer leurs portes. Ce ménage est souhaitable car il libérera un espace ...

à écrit le 06/11/2023 à 16:03
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Les "sans papiers" qui ont un emploi sont d'abord et par définition rentrés illégalement sur le territoire français. Première remarque, comment des illégaux peuvent-ils obtenir un emploi légal? Deuxième remarque, sur des métiers dits en tension c'...

à écrit le 06/11/2023 à 15:13
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tous les métiers vont être place en tension pour pouvoir mettre des migrants mal payé à la place de français . une modernisation et une fusion réussie de l'esclavage et de la tyrannie merci les députés et le gouvernement macron . Les français att...

à écrit le 06/11/2023 à 13:46
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Pour le BTP c'est pas la peine : Le secteur du bâtiment, très touché par la crise de la construction neuve, anticipe la suppression de 150.000 emplois d'ici 2025 et une baisse d'activité pour 2023 en France, a annoncé mercredi le président de la F...

à écrit le 06/11/2023 à 12:14
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L'immigration non qualifiée est le plus grand frein à l'innovation et à l'investissement, surtout dans les services. C'est la principale cause du manque de productivité. Et si on ne fait pas ces efforts d'innovations qui donneront des résultats de l...

à écrit le 06/11/2023 à 10:59
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Basta ! Tous ces patrons se moquent du monde ! Il n'y a pas de concurrence étrangère dans ces secteurs donc le problème c'est eux exclusivement ! Ils recherchent simplement des larbins quasi esclaves qu'ils payent une misère et souvent à temps partie...

le 06/11/2023 à 18:07
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Tu rêve ! Tu te crois sur l'ile aux enfants... ;)

à écrit le 06/11/2023 à 10:53
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Cette loi n'est qu'une régularisation des patrons esclavagistes qui font une concurrence déloyale aux patrons honnêtes. Ce dumping est délétère pour notre économie.

à écrit le 06/11/2023 à 10:16
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L'attitude des partis conservateurs (LR et FN en particulier) ne veulent pas voir la réalité en face et ce par idéologie et non par pragmatisme. Ma mère âgée (90 ans) est placée dans un établissement public spécialisée dans l'accompagnement des trou...

à écrit le 06/11/2023 à 10:10
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Les représentants des patrons de PME (hôtellerie,agroalimentaire par exemple) ont-ils leurs entrées à Matignon ? Ceci pourrait expliquer cela !

à écrit le 06/11/2023 à 10:02
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Les "patrons" sont plutôt de droite, chez les LR qui sont plutôt contre cet article 3. Pas bon pour les LR où leur positionnement apparaît comme une posture. Toujours vouloir essayer d'en faire plus que le RN\FN pour récupérer des vœux à droite. Ma...

le 06/11/2023 à 10:23
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Récupérer des voeux à droite ? Mon voeu personnel est que les commentateurs relisent leur prose avant de cliquer sur "Envoyer".

à écrit le 06/11/2023 à 9:47
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Il n'y a pas que la restauration ou le BTP : Couvreurs, couvreurs zingueurs qualifiés ,aides à domicile et aides ménagères , pharmaciens , chaudronniers, tôliers, traceurs, serruriers, métalliers, forgerons qualifiés , mécaniciens et électronicien...

à écrit le 06/11/2023 à 9:25
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La seule limite devrait passer par une (vraie) qualification du personnel employé, force est de constater qu'on en est loin et il n'est pas rare d'être servi dans ces petits restaurants avec ses serveurs qui ne possèdent pas le minimum des codes quan...

le 06/11/2023 à 13:39
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"Pour moi c'est : 1 sélection, 2 formation, 3 emplois et si satisfaisant au bout de deux saisons une nationalité." Et 4 ,le regroupement familial.Salaire minimum pour un regroupement familial :1383,09 € sur les 12 derniers mois précédant la demand...

le 06/11/2023 à 16:16
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Bien évidemment il faut réduire les transferts vers l'étranger (donc posséder des frontières) et autoriser un regroupement familial lorsque le travailleurs ou la famille sont capables de subvenir à leurs besoins et ceci avec un homme et une seule fem...

le 06/11/2023 à 17:47
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Si les serveurs ne maîtrisent pas les codes, c'est de la responsabilité de l'employeur et aussi la vôtre en tant que client car si vous continuez à y aller, pourquoi l'employeur se fatiguerait-il?

à écrit le 06/11/2023 à 8:57
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Le seul but est de relancer la consommation, et de continuer a créer un monde artificiel à nos dépends !

à écrit le 06/11/2023 à 8:33
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Ça permettrait aux patrons, qui ne sont en général pas de gauche, d apporter quand même leur contribution à la deconstruction de la France métissée appelée de leurs plus chers vœux par LFI et consorts. Lénine est toujours d actualité lorsqu il disait...

le 06/11/2023 à 8:45
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@ABC: Ca veut dire quoi, un patron de Gauche?

le 06/11/2023 à 9:12
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@henry: tous les anciens de mai 68 par exemple, qui se sont ensuite retrouvés PDG de boîtes comme nouvelles frontières si vous voulez des exemples ou Pierre chappaz ancien communiste inventeur de Kelkoo et qui vit aujourd’hui en Suisse..la liste est ...

le 06/11/2023 à 10:12
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@ABC: Raymond, où es-tu? N'oublions pas qu'une entreprise n'a pas de principes moraux et n'a pour but que d'enrichir l'investisseur. On pourrait épiloguer sur Antoine Riboud, Ford, Michelin qu'on taxait de paternalistes puisqu'on les accusait d'achet...

à écrit le 06/11/2023 à 8:26
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Bien sûr, il faut respecter ceux qui sont partis de leurs pays, pour chercher un meilleur avenir, voir un seul avenir. Bien sûr ceux qui travaillent participent à notre société doivent être reconnus. Mais, le seul bémol, est que notre société déraill...

le 06/11/2023 à 9:32
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+1000

le 06/11/2023 à 10:07
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@Bh. Dans le mille🎯

à écrit le 06/11/2023 à 6:36
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Quand les francais realiseront globalement la trahison de leurs gouvernants, helas pour eux, il sera trop tard. Bougez non de dieu.

le 06/11/2023 à 10:50
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inutile de "bouger". La Russie et la Chine se chargent de mettre l'occident au pied du mur.

à écrit le 05/11/2023 à 17:25
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Placé 6 mois sur un métier dit "en tension" c'est à dire souvent: sale, dégradant, stressant, mal payé, à temps partiel, management ordurier pour entendre l'intéressé après, une fois régularisé... bye bye !!! "je fais autre chose"...(quoi ?)

à écrit le 05/11/2023 à 17:05
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Bonjour, tous cette comédie sur les régularisations des migrants.. surtout que les métiers sous tentions seront toujours là .... Sa ne changera rien... Sauf qu'ils y aura plus d'étrangers dans notre pays... Bien sûr ils ne faut pas le dire.. Honte...

le 06/11/2023 à 13:41
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"les métiers sous tentions " La liste des métiers en tension est sur le net depuis 25 ans au moins.

à écrit le 05/11/2023 à 11:08
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Les Français s'appauvrissant et privilégiant les vacances avec sandwichs aux restos, le végan à la viande et les patrons qui ne devraient jamais avoir le droit d'embaucher un immigré SANS PAPIERS, c'est à dire dans carte d'identité ou passeport, préf...

à écrit le 05/11/2023 à 8:24
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Sont ils intellectuellement en mesure de le faire ? Question primordiale pour le dynamisme de notre économie.

le 06/11/2023 à 8:35
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Vous pouvez ajouter culturellement: ils viennent de pays phallocrates ou la femme ou les minorités sexuelles sont châtiées… trop d écart et de fossés socio-culturel et religieux .. les patrons hypocrites prennent l’avantage économique et laissen...

le 07/11/2023 à 9:04
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@ machin: "ils viennent de pays phallocrates ou la femme ou les minorités sexuelles sont châtiées… " Mais tu ne t'arrêtes donc jamais ? Épuisant.

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