Remous à la CGT au sujet de la succession de Philippe Martinez

Après deux journées de mobilisation réussies contre la réforme des retraites, Philippe Martinez doit gérer un autre dossier tout aussi sensible : celui de sa succession. Plusieurs fédérations qui comptent dans son organisation lui ont écrit pour lui demander un débat sur ce sujet. Ce mercredi 1er et jeudi 2 février, le chef de file de la CGT, qui remettra son mandat en mars prochain, réunit ses troupes dans le cadre de son congrès confédéral national (CCN).
Fanny Guinochet
Philippe Martinez doit faire face à une fronde interne.
Philippe Martinez doit faire face à une fronde interne. (Crédits : BENOIT TESSIER)

Après avoir battu le pavé hier, Philippe Martinez doit faire face à un autre combat. Et non des moindres. Convaincre en interne, que la candidate à sa succession, Marie Buisson, à qui il aimerait passer le flambeau en mars prochain, à l'occasion du Congrès, est LA bonne personne pour le syndicat. Beaucoup en doutent dans l'organisation. Dix-huit fédérations - sur les 33 que compte la CGT -, soit les deux tiers des adhérents, lui ont écrit lundi soir pour porter ce sujet. Elles souhaitent en débattre ce mercredi et jeudi à l'occasion de la commission exécutive de la CGT, qui précède le congrès confédéral national, le CCN, l'équivalent du Parlement de la CGT.

Pourquoi la candidate de Philippe Martinez ne fait pas l'unanimité

Dans leur courrier, ces fédérations s'inquiètent du risque de fractures qui pourraient se creuser dans la CGT, si demain Marie Buisson, 54 ans, en prenait la tête. La crainte est d'avoir « une direction mal élue ou pas élue », écrivent ces fédérations. Marie Buisson est professeur de français, cheffe de la fédération éducation-recherche-culture, syndiquée depuis son premier jour à l'Education nationale, peu connue à l'extérieur mais aussi à l'intérieur du syndicat. Ses rares sorties médiatiques sont récentes. Alors que la CGT entend mener des actions fortes pour faire reculer le gouvernement sur la réforme des retraites, la question de son leadership est posée.

Poussée par Philippe Martinez, et validée par les instances exécutives de l'organisation, la candidature de cette quinquagénaire est surtout remise en cause par les plus radicaux de la CGT, comme les représentants de la Chimie, de l'Industrie, de l'Energie. Ils voient d'un mauvais oeil l'arrivée de celle qui a participé à la création du collectif « Plus jamais ça », que la CGT avait créé avec les défenseurs de l'environnement. Son positionnement est jugé trop sociétal, trop féministe, loin des positions historiques du syndicat centenaire.

« Marie Buisson pâtit d'un débat que n'a pas voulu trancher Philippe Martinez, celui de la ligne de la CGT », analyse un bon connaisseur du syndicat. Et de poursuivre « Cela fait de nombreuses années que le syndicat est tiraillé entre ; d'un côté, les tenants d'une ligne dure, ancrée dans la lutte des classes, pour le nucléaire qui maintient des emplois industriels, qui ne fait ni de concessions avec le gouvernement, ni d'alliances avec la CFDT, et de l'autre, une ligne plus ouverte, sur la discussion, les rapprochements avec d'autres centrales, etc. »

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Pourquoi Philippe Martinez peut éviter les fractures

Si la contestation est là, importante, Philippe Martinez a toutefois pour lui quelques atouts pour imposer sa dauphine. En effet, le succès des mobilisations contre la réforme des retraites lui donne un surcroît de légitimité : s'allier avec la CFDT permet, pour l'heure, de mobiliser massivement les adhérents et plus largement les Français.

« Dans un moment de lutte aussi fort, montrer une CGT divisée, c'est se tirer une balle dans le pied », plaide un membre de l'organisation. C'est d'ailleurs ce que Philippe Martinez devait en substance expliquer à ses troupes lors du débat de ces deux jours.

L'argument est d'autant plus fort que d'aucuns à la CGT se souviennent de la succession ratée, il y a dix ans, de Bernard Thibault échouant à imposer Nadine Prigent. Après des mois de batailles internes, la CGT en était ressortie affaiblie, assortie de surcroît, d'une image délétère d'organisation misogyne. « Aujourd'hui écarter une femme est compliqué, bien plus qu'il y a dix ans, la sensibilité n'est pas la même sur le sujet », reconnaît cette même source.

Enfin, parmi les détracteurs de Marie Buisson, il y a peu de candidats. Beaucoup se mobilisent en interne contre, mais aucun n'a encore vraiment pris le risque de se lancer. Seul Olivier Mateu, des Bouches-du-Rhône, a exprimé publiquement son intention, mais pour l'heure, il n'a pas reçu la validation du Parlement de la CGT, ce qui rend sa candidature impossible. Très médiatique, Sébastien Menesplier de la branche énergie hésite... Sa position compte, alors que les raffineries peuvent peser lourd dans le conflit contre la réforme des retraites.

Reste que la pression est forte sur Philippe Martinez. Alors qu'il sait par exemple que la CFDT n'est pas favorable aux grèves reconductibles, et que des mobilisations de ce type peuvent faire éclater l'intersyndicale, ce matin, sur France Inter, le secrétaire général se disait finalement partisan de ce type d'actions. Comme une façon de dire à ceux qui aujourd'hui le bousculent en interne qu'il les a entendus.

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Fanny Guinochet
Commentaires 2
à écrit le 02/02/2023 à 19:33
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Espérons un successeur qui ne soit pas fossoyeur d'entreprises ???? et avec un état d'esprit capable de faire avancer notre pauvre économie ....et espérons que nos dirigeants politiques seront capables de remettre de l'ordre en face ce syndicat .......

à écrit le 02/02/2023 à 12:54
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la si (peu) démocratique CGT.......

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