> Dossier : Covid, l'an II
Il est le symbole de la mise sous perfusion de l'économie française depuis le début de la crise Covid. Au pays des 3 millions de PME et TPE et du million de création d'auto ou de micro-entreprises en 2019, le PGE (prêt garanti par l'État) est devenu incontournable dans la comptabilité. A date, depuis un an, ce sont 659.000 entreprises qui ont bénéficié d'un PGE, dont 90% sont de très petites entreprises (TPE), selon un relevé lundi 22 mars. Créé en mars 2020 dans l'urgence par le gouvernement pour soutenir l'économie face à la crise, ce dispositif prend la forme d'un prêt garanti à 90% par l'Etat sauf pour les grandes entreprises et pour une durée de six an maximum. Au total, ce sont près de 134 milliards d'euros qui ont été déboursés par les banques pour le financer, révèle le rapport publié conjointement par France Stratégie et l'Inspection générale des finances début mars.
Dans le détail, ces chiffres cachent des différences selon les secteurs d'activité, les régions et les entreprises.
Automobiles et motocycles
Le secteur qui a eu le plus recours au PGE depuis un an est le secteur de commerce et de la réparation d'automobiles et de motocycles, avec 24% des prêts accordés depuis mars 2020, selon les données publiés fin février 2021 par Bpifrance et la Banque de France. Plus largement, quatre secteurs concentrent à eux seuls près de deux tiers des PGE (64%) : le commerce et la réparation d'automobiles et de motocycles, les activités de services spécialisés, scientifiques et techniques, la construction et l'industrie manufacturière.
Le commerce et de la réparation d'automobiles et de motocycles pèsent pour 24% des PGE octroyés depuis le début de la crise, alors que le secteur représente moins de 16% de l'emploi total privé, selon les données de Bpifrance et de la Dares.
De son côté, le secteur de l'hébergement-restauration est « le secteur qui a le recours le plus intense » à cette mesure : alors qu'il compte pour moins de 5% de l'emploi total privé en France, près de 8% des PGE concernent ces activités, fait valoir le rapport.
Par ailleurs, quatre secteurs ont eu largement plus recours à ce dispositif qu'aux autres aides du gouvernement (fonds de solidarité, activité partielle...) : « dans les activités de transports par eau, de la fabrication de boissons, dans les activités des services financiers, hors assurance et caisses de retraite et dans l'industrie automobile », plus de 90% des demandes sont pour des PGE.
Cette mesure a aussi connu des différences territoriales. Souvent, « les répartitions entre régions des demandes(...) de PGE (...) recoupent largement les différences de poids économique relatif », explique France Stratégie. Ainsi, sans grande surprise, 37% des sommes déboursées en PGE se concentrent en Ile-de-France, suivie par l'Auvergne-Rhône-Alpes à 11%. Viennent ensuite la Nouvelle‑Aquitaine, l'Occitanie, PACA, le Grand‑Est et les Hauts‑de‑France qui pèsent respectivement pour 7% de la richesse nationale et qui représentent 5% à 11% des PGE accordés.
Des TPE sous perfusion
Enfin, ce dispositif a particulièrement bénéficié aux entreprises « avec moins de 250 salariés ». En effet, 75% des PGE leur ont été dédiés, note le rapport.
D'ailleurs, la moitié d'entre elles déclarent être prêtes à rembourser, en partie au moins, leur prêt avant la fin 2021, révèle une enquête menée en janvier par Bpifrance. Certains grands groupes ouvrent déjà la voie comme la FNAC qui a annoncé le 16 mars avoir remboursé la totalité des 500 millions d'euros qu'elle avait empruntés grâce à cette mesure. De même, Maisons du Monde, qui comptait fin 2019 un peu plus de 8.500 salariés dont 5.000 en France, prévoit le "remboursement intégral de son prêt garanti par l'Etat", d'un montant de 150 millions d'euros, "avant son échéance début 2021".
Le remboursement et la fin des aides
Enfin, face à des perspectives de reprise encore fragiles, 60% des PME et TPE ayant obtenu un PGE envisagent désormais de l'amortir sur plusieurs années, contre seulement 45% lors de la précédente enquête réalisée du 26 octobre au 1er décembre par Bpifrance et l'institut Rexecode.
De plus, 8% craignent ne pas pouvoir le rembourser, une proportion qui reste faible, mais ne cesse d'augmenter: seules 6% des entreprises étaient dans ce cas lors de la précédente enquête et 4% début septembre. Initialement, Bpifrance prévoyait « 4% à 7% » de PGE qui pourraient ne pas être remboursés.
Reste que beaucoup d'entreprises craignent aujourd'hui la fin des aides gouvernementales en sortie de crise, mais peu prennent des mesures pour prévenir les difficultés, notent les spécialistes. "Nous aurons réellement les effets de la crise lorsque l'activité aura repris et que les mesures gouvernementales auront pris fin", estimait fin janvier Sophie Jonval, présidente du conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, lors d'une conférence de presse.
Les travaux de l'Inspection générale des finances avec France Stratégie répondent au comité mis en place pour évaluer les mesures prises par le gouvernement dans le cadre de la lutte contre l'épidémie. Ces données s'appuient majoritairement sur des travaux de Bpifrance, DARES et la Banque de France.
(Avec AFP)