Zéro artificialisation nette (ZAN) : les nouveaux grands projets industriels français y échapperont

« Aucun projet industriel n'a été refusé sur la liste, aucun projet industriel n'est bloqué par la mise en œuvre du ZAN », a expliqué ce jeudi le cabinet du ministre de la Transition écologique Christophe Béchu. La future autoroute A69 Castres-Toulouse ou encore les sites de construction des futurs EPR2 pourront donc être menés à bien sans restrictions liées à cette loi.
Mathieu Viviani
Pour rappel, plus de 20.000 hectares sont artificialisés chaque année en France, soit près de cinq terrains de football par heure.
Pour rappel, plus de 20.000 hectares sont artificialisés chaque année en France, soit près de cinq terrains de football par heure. (Crédits : Reuters)

Une nouvelle qui viendra sûrement rassurer les acteurs français de l'industrie... mais pas les écologistes. Le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, s'apprête à publier un arrêté concernant une liste de 424 projets qui pourront être exclus du dispositif « zéro artificialisation nette des sols » (ZAN). Transmise aux élus locaux mercredi, la liste sera publiée ce jeudi et fera l'objet d'une consultation publique durant un mois, précise le cabinet de Christophe Béchu.

« Aucun projet industriel n'a été refusé sur la liste, aucun projet industriel n'est bloqué par la mise en œuvre du ZAN », a martelé le cabinet du ministre, qui assure que ces projets « permettent de concilier nos objectifs de transition écologique avec le développement économique et territorial ».

Au total, dans sa liste publiée ce jeudi après-midi, 167 projets d'envergure nationale ou européenne qui échapperont au dispositif du zéro artificialisation nette (ZAN). Parmi eux, certains projets industriels stratégiques pour le gouvernement, notamment la future autoroute A69 Castres-Toulouse, les sites de construction des futurs EPR2, ou encore le projet de mine de lithium en Allier, pourront donc être menés à bien sans restriction liées au ZAN. A noter : les nouvelles usines représentent 30 % des 167 projets inclus dans la liste, tandis que les infrastructures (routières ou ferroviaires) en représentent la quasi-moitié.

Fronde anti-ZAN chez les élus, à commencer par Laurent Wauquiez

La loi « Climat et résilience », issue de la Convention citoyenne et voté en 2021 visait initialement le « zéro artificialisation nette des sols » (ZAN) en 2050, avec pour objectif intermédiaire la réduction de moitié de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) d'ici 2031. L'objectif final est, lui, prévu pour 2050. Pour y arriver, la France est censée diviser par deux, tous les dix ans, son rythme de grignotage des espaces naturels par l'étalement des villes.

Mais depuis, le texte de loi n'a cessé d'être contesté par certains élus locaux et chefs d'entreprise. Parmi les voix politiques les plus sonores, figurent celles de l'élu LR Laurent Wauquiez qui, à plusieurs reprises, a jugé le ZAN « ruralicide » et « incarnation d'une technocratie administrative ». En octobre 2023, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpe, parmi les plus dynamiques de France en matière de réindustrialisation, avait même menacé de s'affranchir du dispositif. Ce qui, dans les faits, expose sa région à des sanctions administratives, lui avait sèchement rappelé le gouvernement.

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Si les mois qui ont suivi Laurent Wauquiez n'a pas réitéré cette menace, il n'a pour autant pas cessé de critiquer le ZAN. En décembre dernier, le patron de la région Auvergne-Rhône-Alpes avait adressé une lettre à l'ex-Première ministre Elisabeth Borne, signée par plus de 2.000 élus de sa région, pour dénoncer le caractère « technocratique » de la loi ZAN. Le même mois, le président de région s'était aussi inquiété auprès de l'AFP de l'« explosion mécanique des prix de l'immobilier » que le ZAN pouvait provoquer, et avait assuré que les territoires ruraux ne pourraient plus accueillir de nouvelles populations ou activités.

Autre figure politique à être monté au front contre le « zéro artificialisation nette », le président LR de la région Hauts-de-France Xavier Bertrand. Au journal Les Echos, le LR avait d'ailleurs confié mi-décembre : « (...) le ZAN, tel qu'il est, met une bonne partie de la France sous cloche, surtout au moment où on veut réindustrialiser. Pas de toit, pas d'emplois. » Un argumentaire repris par les maires ruraux, qui ont accusé le ZAN de « mettre sous cloche » les campagnes et dénonce sa méthode « verticale et comptable ».

Le gouvernement tente de répondre à la fronde

Face à cette levée de boucliers, le Sénat a poussé un arsenal de mesures pour apporter davantage de souplesse aux élus locaux dans l'application du ZAN. Leur texte, qui s'est également nourri d'une proposition de loi de députés de la majorité présidentielle, a été ensuite adopté au Parlement à l'été 2023, avec le soutien du gouvernement.

Cette nouvelle mouture législative prévoit notamment d'exclure les « projets d'envergure nationale » du décompte des zones artificialisées, à hauteur de 12.500 hectares. Au total, les 424 projets choisis par le ministère de la Transition écologique s'étalent sur une surface inférieure : 11.870 hectares.

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Fruit « d'échanges » et de « remontées » avec les régions, selon le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, la liste publiée est divisée en deux catégories : une première rassemblant 167 projets « les plus matures et les plus précis »; une seconde contenant des projets « qui manquent à ce stade de maturité » mais qui « vise à donner de la visibilité aux collectivités locales ».

Bruno Le Maire ne veut pas que le ZAN limite l'industrie

En déplacement dans une usine Renault à Sandouville le 29 mars, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire s'est montré de nouveau en faveur de l'implantation d'industries en France. « Nous devons nous interroger sur la mise en œuvre du ZAN », a estimé le ministre.

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Celle-ci exclut déjà les projets industriels verts du ZAN, a rappelé le ministre lors de son allocution. « Demandons-nous si nous ne devons pas faire de même pour tous les projets industriels qui respectent les normes environnementales les plus strictes », a interrogé le ministre.

20.000 hectares artificialisés chaque année

Pour rappel, plus de 20.000 hectares sont artificialisés chaque année en France, soit près de cinq terrains de football par heure, ce qui participe à l'effondrement de la biodiversité, perturbe le cycle de l'eau et réduit le stockage de carbone.

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Par ailleurs, l'artificialisation des sols est due pour près des deux tiers à la construction de logements, qui prennent plus d'espace en France qu'ailleurs du fait d'un modèle d'aménagement du territoire ayant favorisé la maison individuelle.

(Avec AFP)

Mathieu Viviani
Commentaires 15
à écrit le 14/04/2024 à 16:08
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Phénoménal la littérature française .... ZEF , ZAN ..... formidables nos élites issus des mêmes écoles .....heureusement ils ne dirigent pas d'entreprises ....laissons les à la fonction dite publique ....on peut aussi les laisser chez eux , ils nous ...

à écrit le 13/04/2024 à 8:40
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La loi Climat ? Tout un poème ! Point d'orgue du grand débat de la Crise des Gilets jaunes, en lutte contre l'écologie punitive, elle en remet une couche sur l'écologie punitive ! Dekismokton ?!

à écrit le 13/04/2024 à 8:11
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Un bon résumé de la « méthode » Macron : on fait quelque chose parce qu´on l´a entendu, ou pour faire plaisir à un groupe de pression, ou parce qu´on applique bêtement un texte européen. Mais en bon Français, on fait des exceptions, bref : on affirme...

à écrit le 12/04/2024 à 16:00
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Qu'ils cessent leurs élucubrations et leurs tours de passe passe il serait temps compte tenu de l'état de la France qu'ils produisent du concret.

à écrit le 12/04/2024 à 10:29
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Le pouvoir lance les ZAN ... et dans la confusion fait des concessions , des exceptions , sème le trouble dans les esprits .. pour finir par se déjuger et faire perdre toute crédibilité dans sa parole !!

à écrit le 12/04/2024 à 7:56
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Encore un truc pour que les élus captent du pot de vin quoi, comme si le BTP n'était déjà pas assez gangrené par le phénomène... génial.

le 12/04/2024 à 10:02
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C'est bien connu, lorsque les usines s'installent en Chine plutôt qu'en France, elles polluent moins. C'est beau l'écologie.

le 13/04/2024 à 8:49
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Tu n'as pas compris le principe de la ZAN.

à écrit le 12/04/2024 à 1:52
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Partout dans le monde, l'industrie auto electrique est au point mort. Les technologies de batteries evoluent sans cesse au detriment du lithium tres dangereux, mais non, on persiste dans l'Allier a exploiter ce mineral. Ils sont a l'ouest ces micro...

le 12/04/2024 à 3:23
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Ok alors tu préfères qu'on utilise les voitures à DIESEL ET ESSENCE ? qui polluent, qui coutent cher , qui rejettent trop de co2 etc ? Combien le litre d essence à la pompe ? Et quand il augmentera à quelques euros le litre, tu feras comment ? Car...

le 12/04/2024 à 10:04
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Logique, il faut exploiter les ressources minérales uniquement dans les pays étrangers, parce que là-bas ça pollue moins.

à écrit le 11/04/2024 à 21:57
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Verdir la France, laisse béton.

le 12/04/2024 à 10:05
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La forêt a considérablement progressé en France depuis un siècle, par contre les industries sont parties à l'étranger. Est-ce qu'elles émettent moins de CO2 hors de France ?

à écrit le 11/04/2024 à 21:56
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Verdir la France, laisse béton.

à écrit le 11/04/2024 à 19:07
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Encore du dogmatisme : exemple des maisons individuelles. Ceux qui habitent en lotissement le savent très bien. Les jardins sont une source bien plus élevée de diversité que les champs et forêts, Pas de pesticides, pas de produits chimiques, des haie...

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