« Le pic de la demande mondiale de pétrole est en vue avant la fin de la décennie », assure Fatih Birol, le directeur exécutif de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), à l'occasion de la publication ce mercredi du rapport sur les perspectives du marché pétrolier à moyen terme.
Concrètement, les besoins mondiaux d'or noir devraient augmenter de 6% entre 2022 et 2028 pour atteindre 105,7 millions de barils par jour (mb/j) « soutenue par une demande robuste des secteurs aérien et pétrochimique ». La croissance de la demande mondiale devrait ainsi passer d'une hausse annuelle de 2,5 mb/j cette année à 0,4 mb/j en 2028, année où elle devrait atteindre un pic de consommation (voir graphique).
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C'est dans le domaine du transport que la baisse devrait être la plus prononcée à cause de la croissance du parc mondial de véhicules électriques et le recours aux biocarburants. Un mouvement qui s'explique par « les prix élevés et les problèmes de sécurité d'approvisionnement mis en évidence par la crise énergétique mondiale (qui) ont accéléré la transition vers des technologies énergétiques plus propres », explique l'agence. La pandémie du Covid-19 et la guerre en Ukraine ont en effet modifié considérablement les flux commerciaux mondiaux et perturbé le marché mondial de l'or noir.
Besoins croissants de la pétrochimie
La composition des besoins est aussi en train d'évoluer. Ainsi « la demande en plein essor de la pétrochimie et la forte croissance de la consommation dans les économies émergentes et en développement vont plus que compenser la contraction de la demande dans les économies développées », souligne l'AIE.
Ce qui nécessite de maintenir les investissements dans l'activité en amont (exploration et extraction) qui devraient atteindre en 2023 leur plus haut niveau depuis 2015 en culminant à 528 milliards de dollars, soit une hausse de 11% sur un an. « Les producteurs de pétrole doivent faire attention au changement de rythme et calibrer leurs décisions d'investissement pour assurer une transition ordonnée », avertit l'agence, qui considère que le niveau d'investissement, s'il reste soutenu, devrait être adéquat d'ici 2028.
Les pays producteurs hors de l'alliance de l'Opep+ ont des plans pour augmenter la capacité de l'offre mondiale à moyen terme, avec une hausse prévue de 5,1 mb/j d'ici 2028 menée par les Etats-Unis, le Brésil et le Guyana. De leur côté, l'Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et l'Irak envisagent de construire des capacités de production au sein de l'Opep+, tandis que les pays membres asiatiques et africains doivent lutter contre la poursuite du déclin de leurs productions, alors que celle de la Russie chute à cause des sanctions. Cela se traduira par un gain net de capacités de 0,8 mb/j des 23 membres de l'Opep+ d'ici 5 ans.
Tensions sur le raffinage
Dans le secteur du raffinage, la capacité mondiale a été réduite par des fermetures, la conversion à la production de biocarburants et le retard pris par des projets depuis la pandémie. Une situation qui, combinée avec la forte baisse des exportations de produits raffinés de la Chine et le bouleversement des flux commerciaux russes, a permis aux raffineurs d'engranger des profits records l'année dernière. Pourtant, si les capacités additionnelles de raffinage devraient dépasser la croissance de la demande de produits raffinés, des tensions sur les marchés des distillats moyens (fuel et gazole) ne sont pas à exclure cette année.
Même si l'AIE considère que le marché pétrolier peut connaître des tensions au deuxième semestre, elles « devraient s'atténuer au cours des prochaines années », notamment parce que la croissance de la demande de la Chine, le premier importateur mondial de brut, « est prévue de ralentir nettement à partir de 2024 ».
C'est ce qui explique que la récente annonce par l'Arabie saoudite de réduire son offre de 1 million de barils par jour (mb/j), après les coupes de l'Opep+ ces derniers mois n'a non seulement pas permis une reprise de la hausse des cours, mais n'arrive pas à enrayer leur baisse.
Ce mercredi matin, le prix du baril de Brent évoluait au-dessus de 73,4 dollars, celui du baril de WTI autour de 67,7 dollars. En un an, la valeur du baril s'est dépréciée de quelque 35% (voir graphique).
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