L'investissement dans le solaire va dépasser celui dans le pétrole en 2023 (AIE)

Cette année, sur les 2.800 milliards de dollars investis dans l'énergie à l'échelle mondiale, 1.700 milliards de dollars seront consacrés au développement des technologies énergétiques propres, affirme l'Agence internationale de l'énergie (AIE) dans son rapport annuel sur l'investissement mondial dans le secteur énergétique. Depuis 2021, ils ont augmenté de 24% contre 15% pour les énergies fossiles. Mais, alerte l'AIE, ils sont surtout le fait des pays développés et de la Chine.
Robert Jules
(Crédits : Reuters)

Plus qu'un symbole, l'année 2023 verra pour la première fois, avec plus de 350 milliards de dollars (voir graphique), l'investissement dans l'énergie solaire dépasser celui dans le secteur pétrolier, annonce dans son rapport annuel, « World Energy Investment 2023 », publié ce jeudi par l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Sur les 2.800 milliards de dollars investis dans l'énergie, 1.700 milliards seront consacrés au développement des technologies énergétiques propres : énergies renouvelables, véhicules électriques, énergie nucléaire, les réseaux et stockage d'électricité, carburants à faibles émissions, pompes à chaleur et plus grande efficacité. Le reste, un peu plus de 1.000 milliards de dollars, va au charbon, au gaz et au pétrole.

-

energies vertes

-

La crise énergétique a favorisé les investissements

Si la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) pour lutter contre le dérèglement climatique est une priorité affichée des gouvernements, la crise énergétique mondiale - qui a fait bondir les prix des hydrocarbures et de l'électricité en 2021 et 2022 -, ainsi que la guerre en Ukraine qui a montré la dépendance de l'Europe au gaz naturel russe, a conduit à une prise de conscience sur la souveraineté énergétique « renforçant l'élan en faveur d'options plus durables ».

Ces dernières années, les investissements dans les énergies propres ont été stimulés durant « les périodes de forte croissance économique et de volatilité des prix des combustibles fossiles qui ont suscité des inquiétudes quant à la sécurité énergétique », remarque l'AIE qui souligne également le rôle joué par « le soutien politique accru par le biais d'actions majeures telles que la loi américaine sur la réduction de l'inflation (IRA) et des initiatives en Europe, au Japon, en Chine et ailleurs ».

Cela se traduit par un rythme plus élevé. Les investissements annuels dans les énergies propres devraient augmenter de 24 % entre 2021 et 2023, grâce notamment aux énergies renouvelables et aux véhicules électriques, contre une augmentation de 15 % pour les investissements dans les combustibles fossiles.

-

AIE clean energy

-

Toutefois, « plus de 90 % de cette augmentation proviennent des économies avancées et de la Chine, ce qui présente un risque sérieux de nouvelles lignes de partage dans l'énergie mondiale si les transitions énergétiques propres ne s'accélèrent pas ailleurs », alerte l'agence.

Une évolution plus rapide que ceux que l'on pense

« L'énergie propre évolue rapidement, plus rapidement que beaucoup de gens ne le pensent. C'est clair dans les tendances d'investissement, où les technologies propres distancent les combustibles fossiles », a déclaré Fatih Birol, directeur exécutif de l'AIE. « Pour chaque dollar investi dans les combustibles fossiles, environ 1,7 dollar est désormais consacré à l'énergie propre. Il y a cinq ans, ce ratio était de un pour un », précise-t-il.

Énergie solaire en tête, les technologies électriques à faibles émissions devraient représenter près de 90 % des investissements dans la production d'électricité. Le choix des consommateurs va également dans le même sens. Ainsi, les ventes mondiales de pompes à chaleur ont connu une croissance annuelle à deux chiffres depuis 2021. Celles de véhicules électriques devraient bondir d'un tiers cette année après avoir déjà fortement progressé en 2022.

Les compagnies pétrolières préfèrent verser des dividendes

Quant aux dépenses dans la prospection et l'extraction du pétrole et du gaz, elles devraient n'augmenter que de 7 % en 2023, pour atteindre 950 milliards de dollars, revenant à leurs niveaux de 2019, à la lumière des plans de dépenses annoncés par toutes les grandes et moyennes entreprises pétrolières, gazières et charbonnières.

La plus grande part de ce total va au pétrole et au gaz en amont, où les investissements devraient augmenter de 7 % en 2023 pour atteindre plus de 500 milliards de dollars, ramenant cet indicateur global aux niveaux de 2019. Environ la moitié de cette augmentation sera probablement absorbée par l'inflation des coûts.

Grâce à la hausse des prix du carburant, de nombreux producteurs d'hydrocarbures ont engrangé des bénéfices records en 2022. Malgré cela, ils ont consacré la majeure part de cette trésorerie au versement de dividendes, aux rachats d'actions et au remboursement de la dette - plutôt qu'à l'approvisionnement traditionnel. « Entre 2010 et 2019, trois-quarts des flux des revenus étaient habituellement investis dans une nouvelle production. C'est maintenant moins de la moitié, la plus grande part allant aux dividendes, aux rachats d'actions et au remboursement de la dette », indique le rapport.

Les quelques compagnies pétrolières qui investissent plus qu'avant la pandémie de Covid-19 sont pour la plupart de grandes compagnies pétrolières nationales du Moyen-Orient. Par ailleurs, la demande mondiale de charbon a atteint un niveau record en 2022, souligne le rapport. Même un pays comme l'Allemagne a dû augmenter son usage pour produire de l'électricité, avec la chute des livraisons de gaz naturel en provenance de Russie.

Enfin, souligne le rapport, les investissements dans les technologies propres sont d'abord réalisés dans les économies développées et en Chine. « Les plus grands déficits d'investissement dans les énergies propres se situent dans les économies émergentes et en développement », souligne le rapport.

Un frein, les taux d'intérêt élevés

Mais il existe des points positifs, à l'exemple « des investissements dans le solaire en Inde et dans les énergies renouvelables au Brésil et dans certaines parties du Moyen-Orient ». Parmi les freins à l'investissement, l'Agence pointe des taux d'intérêt plus élevés, des cadres politiques et des conceptions de marché qui manquent de transparence, la faiblesse des infrastructures de réseaux, des services publics en difficulté financière et un coût élevé du capital. « La communauté internationale doit faire beaucoup plus, en particulier pour stimuler les investissements dans les économies à faible revenu, où le secteur privé hésite à s'aventurer », recommande l'agence, qui publiera le 22 juin un rapport spécial sur le financement privé en faveur de l'énergie propre dans les économies émergentes et en développement.

Robert Jules

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 3
à écrit le 25/05/2023 à 13:59
Signaler
Mieux faudrait attendre la fin de la guerre avant d'investir. Attendons l'arrivée des avions de combats en Ukraine et la riposte russe. Le solaire a été essayé à l'époque où EDF payé à un bon prix les watts envoyés sur leur reseau. Une fois les subve...

à écrit le 25/05/2023 à 9:14
Signaler
D'où la fébrilité des producteurs de pétrole ! Ce sont surtout les capacités de raffinage qui vont souffrir de non investissements.

à écrit le 25/05/2023 à 7:33
Signaler
Ban ensuite pour pomper faut pas beaucoup d'investissement.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.