Alexandre Mars, l'homme qui murmure à l'oreille des philanthropes

C'est l'un des plus jeunes philanthropes de New York. Ce Français a créé la Fondation Epic pour aider les donateurs à sélectionner une association de confiance, tout en leur permettant de vérifier l'impact de leur don. Une méthode susceptible de faire bouger les lignes de la philanthropie.
Diplômé d'HEC, Alexandre Mars a fondé cinq start-up, dont Phonevalley et ScrOOn dans les solutions mobiles, respectivement revendues à Publicis et Blackberry, avant de créer la Fondation Epic.

Alexandre Mars en est persuadé, "beaucoup de personnes sont prêtes à donner". Mais souvent, elles ne savent pas à quelle association faire confiance et manquent de temps pour rechercher une organisation convaincante. Même les donateurs "aimeraient bien donner plus, mais ne savent pas comment", constate celui qui a passé quatre ans à les interroger avant de créer sa propre œuvre philanthropique. C'est pour répondre à leurs questions que ce "serial entrepreneur", sensible à l'altruisme depuis son enfance, ouvre la Fondation Epic, début 2015. Le quadragénaire savait que sa sixième société aurait pour but d'aider les plus démunis et cette dernière se veut ainsi "une passerelle entre les philanthropes et les organisations sociales".

Concrètement, la Fondation Epic établit un classement des organisations caritatives les plus sérieuses dans le domaine de la santé infantile, de l'éducation et de la protection de l'enfance. Puis, dès le mois de septembre, Alexandre Mars et ses collègues partiront à la rencontre des donateurs pour leur présenter une poignée d'associations triées sur le volet. Ces derniers seront ainsi assurés de donner à des organisations de confiance, bien gérées et efficaces dans leurs actions. Si la Fondation Epic en est encore à sa première année d'activité, c'est sans doute dans cette sélection méticuleuse des associations que réside la clef de son succès.

Choisir où donner et suivre l'impact du don

En effet, l'équipe de la fondation examine les programmes d'aides et les finance des centaines de dossiers qu'elle reçoit, soit 1.400 pour sa première année. Après six mois d'écrémage, seules vingt associations seront présentées aux donateurs.

"J'ai remarqué que pour donner de bon cœur, il faut avoir le choix entre plusieurs options", explique Alexandre Mars.

Son équipe sélectionne donc les meilleures, selon, au total, 45 critères d'organisation, de leadership et d'impact. C'est d'ailleurs là qu'on reconnaît la pâte de ce diplômé d'HEC, ancien capital-risqueur qui n'hésite pas à évoquer "l'efficacité d'un don".

Ce n'est pas tout. "Le donateur veut ensuite s'assurer que son don est utilisé à bon escient", a-t-il encore constaté. La fondation Epic met alors à sa disposition des outils numériques -vidéo, big data- pour suivre à distance l'impact du don. "Il est ainsi possible de savoir combien d'élèves ont été à l'école dans tel village cambodgien et combien de livres ont pu être achetés grâce au don", sur lequel la fondation ne prend aucune commission. Pour encore plus de visibilité, le donateur peut même se rendre lui-même sur le lieu d'activité de l'association qu'il finance.

Nouvelle génération de philanthropes

Après quatre mois d'activité, il est encore trop tôt pour augurer de la réussite de la fondation Epic. Mais le million d'euros déjà donné par l'entreprise de cosmétiques Caudalie représente un premier gage de confiance. Surtout, Alexandre Mars, en homme d'affaires averti, a ciblé ses futurs donateurs. Ce sont des entrepreneurs, comme lui, des personnalités influentes susceptibles de drainer des dons de particuliers -acteurs et chanteurs par exemple- et des entreprises.

"Avec la notion de responsabilité sociale d'entreprise (RSE), ces dernières donnent de plus en plus", s'enthousiasme-t-il en évoquant même une "nouvelle génération de philanthropes". "Les entreprises peuvent donner un certain pourcentage de leurs profits, de leurs produits ou même du temps de leurs salariés".

Une habitude prise par de nombreuses sociétés aux États-Unis, mais qui trouve encore peu d'adeptes de ce côté-ci de l'Atlantique. C'est donc en partie pour mieux conquérir les donateurs européens et français que la Fondation Epic prévoit d'ouvrir un quatrième bureau à Paris, après une implantation à New York, à Londres et à Bangkok.

Diriger l'argent là où les donateurs le souhaitent

La fondation travaille effectivement dans six régions du monde, sur tous les continents, même les plus riches. Et c'est précisément ce qui la différencie de certaines plates-formes américaines dont la mission est également d'aider à mieux donner. Si ces structures ont une méthode de sélection similaire, le critère d'impact est prédominant : elles retiennent uniquement les associations qui vont sauver le maximum de vies possibles avec un don.

Dans cette perspective, "l'efficacité en termes de dollar investit est forcément plus forte dans les pays à faible niveau de vie", reconnaît Alexandre Mars.

"Mais certaines personnes préféreront toujours donner pour aider leur propre communauté ou leur pays. C'est une erreur de penser que l'on peut changer leur façon de voir les choses. Nous n'essayons pas de nager à contre courant", observe-t-il.

Il faut donc diriger l'argent là où les donateurs le souhaitent, une réponse intéressante au concept d'altruisme efficace cher au philosophe australien Peter Singer. Dans tous les cas, "donner du temps ou de l'argent, quelle que soit la cause ou le pays, est déjà très positif et porteur d'espoir pour changer la vie de ces enfants", garantit Alexandre Mars.

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