Au Kirghizstan, le texte original de la Constitution est un journal

Personne ne sait vraiment s'il existe un texte relié et signé par le président kirghize. Un problème pour le pays alors qu'il s'apprête à amender la constitution via un référendum prévu le 11 décembre.
Laszlo Perelstein
"Mais où ai-je bien pu mettre ce document ?", s'est sans doute interrogé le président du Kyrgystan Almazbek Atambaye.

Six ans après avoir signé sa Constitution - la troisième depuis que le pays a obtenu sa complète indépendance en 1991 -, le Kirghizstan ne parvient plus à remettre la main sur le document original, s'il a jamais existé, comme l'a rapporté le mois dernier l'agence de presse russe Rossia Segodnya (article en russe).

Lors d'un débat au parlement kirghize le 19 octobre portant sur le projet de référendum constitutionnel qui doit se tenir le 11 décembre, des députés socialistes du parti Ata Meken ont demandé à ce que les autorités produisent la première copie de la loi fondamentale. Ils se sont aperçus que le ministère de la Justice et le bureau du président Almazbek Atambayev ne disposaient que de copies. Chacun supposant en fait que l'original signé par le président était aux mains de l'autre, personne n'a donc la moindre idée d'où il pouvait bien se trouver.

Pour le directeur du cabinet présidentiel Farid Niyazov, le problème n'en en fait est pas un, comme il l'a expliqué au site kirghize BNews.kz. Selon lui, il existe en effet deux brouillons de la Constitution, parus à une semaine d'intervalle le 19 mai et le 26 mai dans le journal Erkin-Too, et un texte final... également paru dans ce même journal le 6 juillet, soit après la tenue du référendum, permettant à la loi de faire effet puisque cela nécessite une publication officielle.

"Ainsi, dans notre cas nous avons un texte sous la forme du journal Erkin-Too, comme dans la loi. Il a été déclaré adopté par référendum en 2010 et la Constitution ne nécessite pas la signature du président. Par conséquent, nous ne possédons pas un seul document formel signé par le président."

Moqueries et inquiétudes

À défaut de bloquer le référendum à venir, qui prévoit notamment d'accorder plus de pouvoirs au Premier ministre, la nouvelle a en tout cas beaucoup fait rire les réseaux sociaux, comme le rapporte l'antenne locale de la BBC, qui cite un internaute :

"J'étais triste d'avoir perdu mon notebook. Maintenant que je sais que nous avons perdu notre constitution, la perte de mon [ordinateur] ne semble pas si terrible."

Adopté le 27 juin 2010 par référendum avec 90% de "oui" après une révolution qui a forcé le président Kurmanbek Bakiyev à quitter le pouvoir, le texte soutenu par l'ONU, les États-Unis et la Russie, est considérée comme une avancée démocratique, limitant les pouvoirs présidentiels. Cette constitution ne met néanmoins pas un place un régime parlementaire mais essaie de contre-balancer pouvoir législatif et présidentiel en créant deux positions fortes : président et Premier ministre. Pour limiter la concentration des pouvoirs, le nombre de sièges au parlement est passé de 90 à 120 et un seul et même parti ne peut compter au maximum que 65 parlementaires.

Pour certains, comme le souligne The Independant, cette "disparition" pourrait être une tactique de l'actuel président pour préparer son entourage à garder le pouvoir, alors que son seul et unique mandat se termine en 2017, l'actuelle constitution l'empêchant de se représenter après six ans de mandat.

Laszlo Perelstein
Commentaire 1
à écrit le 25/11/2016 à 9:11
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C'est le moment pour les citoyens kirguizes de perdre leurs feuilles d'impôt.

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