Biden, 100 jours au pas de charge

Relance économique massive, vaccination qui l'est tout autant, retour dans l'Accord de Paris sur le climat, action diplomatique active : Joe Biden, qui prononce mercredi prochain son premier discours de politique générale devant le Congrès pour ses Cent Jours, a étonné l'Amérique et le monde par son dynamisme discret mais efficace. Mais le plus dur reste à venir pour le successeur de Trump : réconcilier l'Amérique.
(Crédits : JONATHAN ERNST)

Il a vu grand. Il a bougé vite. Il a surpris ses détracteurs et certains de ses partisans. En 100 jours, Joe Biden, 46e président des Etats-Unis, a imprimé sa marque. Sans effets de manche, fidèle au ton empathique et volontiers familier qu'il affectionne, celui qui avait d'abord été élu sur une promesse de calme après la tempête Trump avance à grandes enjambées. Moqué pour ses hésitations et ses gaffes ? Il se montre discipliné, communication soigneusement calibrée à l'appui. Il tient tête à Vladimir Poutine et Xi Jinping avec des formules qui font mouche ("Il n'a pas une once de démocratie en lui", lâche-t-il à propos de son homologue chinois).

Accusé de manquer de coffre? Le plus vieux président de l'histoire met en avant records après records sur la vaccination (plus de 200 millions de doses administrées). Il fait adopter en quelques semaines un plan de soutien de l'économie de 1.900 milliards de dollars et en propose dans la foulée un autre sur les infrastructures d'un montant équivalent.

"Il a été sous-estimé, mais cela s'explique en partie par son parcours. Durant sa carrière de sénateur, il a toujours privilégié le pragmatisme et les changements par petites touches", explique à l'AFP Julian Zelizer, professeur d'histoire à l'université de Princeton. "Même durant sa campagne, il faisait l'éloge de la modération et de la normalité. D'une certaine manière, il a changé de stratégie en optant pour plus d'audace. C'est une stratégie qui, d'un point de vue politique, a payé".

Présidence sans drames


Symbole d'un style simple qu'il revendique, il sort régulièrement de sa poche de costume une petite fiche sur laquelle sont inscrits les principaux indicateurs de la pandémie, dont le nombre de morts. Entouré d'une équipe jusqu'ici unie, il offre le spectacle d'une présidence sans drames ni scandales. Le déchirement annoncé du Parti démocrate n'a pas eu lieu. L'aile gauche a montré quelques signes d'impatience mais a jusqu'ici soutenu "Joe".

Au quotidien, la Maison Blanche donne l'image d'une "machine bien huilée", pour reprendre la formule utilisée par Donald Trump pour décrire, dans une étrange pirouette, le chaos qui régnait dans les couloirs de la prestigieuse West Wing durant son mandat.

Sur le front international aussi, Joseph Robinette Biden Jr s'est rapidement positionné. Son "sommet climat" - virtuel mais bien orchestré - a marqué de façon spectaculaire le retour des Etats-Unis ("America is back") dans ce jeu diplomatique dont son prédécesseur s'était retiré avec fracas.

Cette grand-messe à peine achevée, il a tenu samedi une promesse de campagne emblématique: il a prononcé le mot "génocide" pour parler de la mort d'un million et demi d'Arméniens massacrés par l'Empire ottoman en 1915. Aucun de ses prédécesseurs n'avait osé, craignant la vive réaction de la Turquie: Barack Obama s'était, lui aussi, engagé à le faire, mais avait reculé une fois installé dans le Bureau ovale.

Majorité étriquée au Congrès


En vieux routier de Washington, il sait cependant que le plus dur est à venir. Sa majorité étriquée au Congrès est une vulnérabilité: elle place une poignée de sénateurs démocrates - tel Joe Manchin - en position d'arbitres surpuissants. Son plan d'investissement dans les infrastructures n'est à ce jour qu'un projet. Les discussions s'annoncent âpres, l'issue du combat législatif est incertaine.

Sur les armes à feu, comme sur les lois électorales, son impuissance pourrait bientôt apparaître de manière flagrante. Sur l'épineux dossier de l'immigration enfin, Joe Biden est, depuis son arrivée au pouvoir sur la défensive. Tâtonnements, rétropédalages: tiraillée entre la promesse d'une politique migratoire plus "humaine" et la crise à la frontière mexicaine, avec des arrivées par milliers de migrants, la Maison Blanche est à la peine.

Mercredi, à la veille de l'anniversaire symbolique des 100 jours, il prononcera son premier discours de politique générale devant le Congrès, en prime-time. Sa porte-parole Jen Psaki a promis une allocution centrée sur l'enfance, l'éducation, la santé, "les priorités de la classe moyenne". Avec, au coeur du dispositif, une hausse des impôts pour les Américains plus riches.

Dans le camp démocrate, la machine s'emballe, les comparaisons flatteuses - parfois hâtives - pleuvent. Certains évoquent Franklin D. Roosevelt ("FDR") et l'audace du New Deal pour relever le pays englué dans la Grande Dépression. D'autres citent Lyndon B. Johnson, qui avait mis à profit sa fine connaissance des rouages du Congrès pour faire bouger les lignes dans la société américaine.

Joe Biden rejoindra-t-il le petit groupe - prestigieux - des présidents qui ont laissé leur empreinte dans l'histoire américaine ? "C'est possible, mais il est beaucoup trop tôt pour le dire", tempère Julian Zelizer.

En face, privé de son compte Twitter mais surtout du puissant mégaphone de la présidence, Donald Trump est pour l'heure inaudible. Ses communiqués rageurs, presque quotidiens, tombent dans le vide. Comme pour mieux dire que la page est tournée, Joe Biden n'évoque presque jamais son bouillonnant prédécesseur.

Mais "l'ancien gars", comme il l'avait qualifié il y a quelques semaines, reste extrêmement populaire dans le camp républicain. Et pourrait donner de la voix à l'approche des élections de mi-mandat, fin 2022, où Joe Biden jouera gros. D'où la volonté de ce dernier de frapper fort ("go big") en début de mandat, tant qu'il a tous les leviers du pouvoir.

Commentaires 16
à écrit le 26/04/2021 à 14:17
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Trump a passé 4 ans à créer des polémiques, à mentir sans vergogne. Biden est à l'opposé. Un seul mot: bravo

à écrit le 26/04/2021 à 9:19
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Quelle différence entre les différents présidents de notre pays qui au bout de 100 jours en dehors de discours pompeux sans grand réalismes n'ont pas porté ni de grandes réformes encore moins de relance économique. En fait la jeunesse n'est pas synon...

le 26/04/2021 à 16:01
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est un vieillard dans sa tête. Il a été élevé par sa grand-mère et a épousé une femme qui a l'âge de sa mère. Il s'en est longuement vanté pendant la campagne. Toutes ses références littéraires, philosophiques, artistiques (et Dieu sait qu'il n...

à écrit le 26/04/2021 à 9:10
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Deuxième président américain de suite à détoner par rapport aux précédents, il est évident qu'une page s'est tournée en ce qui concerne la politique américaine.

à écrit le 26/04/2021 à 8:44
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Merveilleuse efficacité qui résulte d'un grand courage politique et d'une grande clarté dans les objectifs et dans le discours. Nous aimerions avoir quelqu'un comme cela en Europe. Les États-Unis, eux, vont vers une renaissance.

le 26/04/2021 à 17:27
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La renaissance politique aux USA ne reviendra vraiment qu'avec une modification du mode de scrutin aux présidentielles et une modernisation. La plupart des modalités du vote sont liées à des contraintes remontant au temps ou les candidats et les vota...

à écrit le 25/04/2021 à 23:08
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100 jours ? C'est ça la démocratie ? Tous les deux ans voter pour du court terme ? Ridicule

à écrit le 25/04/2021 à 23:00
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Au pas de charge ? Vous l' avez vu se casser la fiole trois fois en montant dans son avion?..

à écrit le 25/04/2021 à 21:02
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il vote des plans pas ficelles qui seront payes par les generations futures ( quand les arabes se defereont de leurs dollars, que les bitcoins emis par les banques centrales feront perdre au dollar l'obligation d'en avoir pour commercer) jeter l'arg...

le 26/04/2021 à 9:15
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Pour l'instant et encore demain le dollar reste la monnaie la plus internationale . Une entreprise comme Air France mais aussi Lufthansa ou autre européennes achètent leurs avions dans la monnaie de l'oncle Sam. Pour votre info les pays du Moyen Orie...

à écrit le 25/04/2021 à 20:16
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Quelle complaisance ! On est plus dans le journalisme là mais dans le marketing politique. Biden fait n'importe quoi: relance des tensions avec la Russie, reprise de la déstabilisation en Syrie, complaisance avec l'ultra gauche qui cherche à créer ...

le 26/04/2021 à 9:22
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Amusant votre commentaire sur l'ultra gauche , vous voyez un M. Mélenchon aux US? Avez vous connaissance de l'esprit des américains?????

à écrit le 25/04/2021 à 12:48
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M. Biden est dangereux pour les USA et pour le Monde , En pleine pandémie mondiale, en pleins traumatismes collectifs mondiaux ; il attise les ressentiments collectifs et il est un danger pour la paix dans le monde.il fait passer le monde financier a...

le 26/04/2021 à 9:30
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dans un monde individualiste parler de collectif c'est vivre dans un autre monde. Sans aller aux Etats unis la France est un pays de nombriliste bien loin de l'individu. C'est quoi la stabilité mentale un nouveau truc de philosophe à deux euros? La ...

le 26/04/2021 à 11:35
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dans un monde individualiste parler de collectif c'est vivre dans un autre monde. —— Si ce monde est individualiste, pourquoi les ogn existent , ou pourquoi les pays s’entraident ? Sans aller aux Etats unis la France est un pays de nombrili...

le 26/04/2021 à 13:07
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Tout le monde sait que Trump méritait les prix Nobels de la Paix, de médecine et de littérature et que c'est par injustice et pure jalousie qu'il ne les aura pas... Avant de crier haro sur Biden, laissez le bosser. Six mois après son élection T...

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