Elections au Royaume-Uni : l’embellie de l’économie peut-elle sauver les conservateurs de la défaite ?

Le Premier ministre Rishi Sunak a annoncé hier que l’élection du prochain Parlement britannique aurait lieu le 4 juillet prochain. Une décision en partie liée aux derniers chiffres de l’économie britannique, qui s’avèrent meilleurs que prévu et ont permis au pays de sortir de la récession. Peu probable toutefois qu’ils suffisent à sauver le Parti conservateur, que les sondages donnent très largement perdant face aux travaillistes.
Le Premier ministre britannique Rishi Sunak.
Le Premier ministre britannique Rishi Sunak. (Crédits : HANNAH MCKAY)

Rishi Sunak a pris tout le monde de court en annonçant hier la prochaine élection générale pour le 4 juillet prochain. La dernière s'étant déroulée en décembre 2019, et celle-ci devant avoir lieu tous les cinq ans, le Premier ministre britannique aurait pu attendre jusqu'à la fin de l'année pour appeler les électeurs aux urnes. C'était du reste ce à quoi s'attendaient la plupart des commentateurs : le Parti conservateur, au pouvoir depuis 14 ans, est actuellement donné tellement perdant que le temps ne peut a priori que jouer en sa faveur. Mais Rishi Sunak a finalement opté pour un coup de poker, misant sur la récente embellie économique pour donner un coup de pouce à son parti.

C'est une reprise modeste, mais une reprise tout de même. Au premier trimestre 2024, l'économie britannique est en effet sortie de la récession (généralement définie comme deux trimestres de croissance négative consécutifs) avec une croissance de 0,6 %, selon les chiffres publiés par l'Office for National Statistics le 10 mai dernier. Ce chiffre est légèrement supérieur à la croissance attendue, qui était de 0,4 %.

Pourquoi tous les yeux sont désormais rivés sur la Banque centrale britannique

Le secteur des services, qui a renoué avec la croissance pour la première fois depuis un an, a particulièrement contribué à l'embellie économique outre-Manche, selon l'agence britannique. L'industrie des transports, les services juridiques et la recherche scientifique ont également connu une croissance soutenue, tandis que l'hôtellerie, la restauration et la construction connaissent davantage de difficultés.

Faut-il sabler le champagne pour autant ? Prudence, indique Russ Shaw, fondateur de London Tech Advocates, un réseau local d'acteurs des nouvelles technologies. « Il s'agit naturellement d'une bonne nouvelle, qui vient confirmer un certain nombre de signaux positifs émis récemment, en particulier une confiance retrouvée chez les consommateurs. Mais nous ne somme pas totalement tirés d'affaire pour le moment. La grande question qui occupe tous les esprits de ce côté de la Manche est de savoir quand la Banque d'Angleterre va baisser son taux d'intérêt. Lorsque cela se produira, nous pourrons souffler. »

En plus de soulager les consommateurs qui souhaitent emprunter et ceux qui possèdent déjà un emprunt, les taux aux Royaume-Uni étant variables, la baisse des taux d'intérêt serait bien accueillie par les investisseurs et entrepreneurs britanniques. Les entreprises en phase de maturité peinent actuellement à lever des fonds, et le nombre d'entrées en bourse demeure réduit à peau de chagrin. Il est fort peu probable qu'elles reprennent en l'absence d'une baisse des taux d'intérêt.

Depuis le bank of England Act de 1998, mis en place par le gouvernement travailliste de Tony Blair, alors Premier ministre du Royaume-Uni, la Banque d'Angleterre décide seule de fixer son taux d'intérêt, indépendamment du gouvernement britannique. Son objectif est de parvenir à un niveau d'inflation de 2 %. La Banque d'Angleterre a récemment déclaré qu'une baisse du taux directeur dès le mois de juin était envisageable si l'inflation baissait suffisamment d'ici-là. Or, les derniers chiffres montrent un fort ralentissement de celle-ci : 2,3 % en avril sur un an, son plus bas niveau depuis juillet 2021, et proche de l'objectif de la Banque centrale. Cependant, une baisse du taux n'est malgré tout pas garantie. « La bourse britannique bat actuellement des records, et les taux d'intérêt tendent historiquement plutôt à être abaissés quand l'économie ralentit », note Russ Shaw.

Malgré l'embellie économique, la défaite des conservateurs est quasi certaine

Qu'importe, Rishi Sunak a décidé de jouer son va-tout, misant sur la reprise de l'économie pour renverser la vapeur. Son parti est pour l'heure donné largement perdant : l'hebdomadaire britannique The Economist estime ainsi que les conservateurs vont remporter 192 sièges, contre 371 lors de la précédente élection, et 381 pour le parti travailliste. Pour ne rien arranger, le Parti conservateur a essuyé plusieurs défaites cinglantes lors de récentes élections locales, y compris dans des circonscriptions que les travaillistes n'avaient pas remportées depuis des décennies.

Depuis l'annonce des derniers résultats économiques trimestriels, le gouvernement s'est efforcé de communiquer sur ces derniers, quitte à embellir quelque peu la réalité, afin de vanter les succès de sa politique économique. Dans une conférence de presse donnée vendredi dernier, Jeremy Hunt, le chancelier de l'Échiquier britannique, a ainsi affirmé que la reprise économique était bel et bien là, promis de futures baisses d'impôts et affirmé que la politique travailliste entraînerait à l'inverse une hausse des prélèvements susceptible de casser le redémarrage.

Pas certain que cela suffise à convaincre les électeurs britanniques, tant le Parti conservateur est désormais impopulaire après quatorze années au pouvoir. Le Brexit, qu'une partie des conservateurs, dont Rishi Sunak, ont activement soutenu, constitue un lourd handicap pour le parti, la majorité des Britanniques jugeant désormais qu'il a été une erreur.

Commentaires 5
à écrit le 24/05/2024 à 8:55
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Je me souviens d'une époque où les groupies de Sarkozy présentaient la politique de David Cameron comme l'exemple à suivre... HA! HA! HA!

à écrit le 24/05/2024 à 8:54
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Bon interdit de dire du bien du RU comem d'habitude. C'est payé par l'UE comme pour dire du bien d'elle même ? Bah vosu avez rison hein, ça permet d'arrondir els fins de mois... ^^

à écrit le 23/05/2024 à 23:56
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Les politiques britanniques. Ne regardent que «  l économie » de leurs caste dirigeante mais le britannique moyen souffre bien plus que le Français : 1 britannique que 4 ne se chauffe pas ou peu , 1 britannique sur 5 est sous le seuil de pauvreté c...

le 24/05/2024 à 8:53
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"1 britannique sur 5 est sous le seuil de pauvreté contre 1 Français sur 2…" Fait attention quand même... ^^

à écrit le 23/05/2024 à 18:08
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Mince alors! J'avais cru comprendre que depuis le Brexit le R-U était à la dérive! :):):)

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