L'accès au canal de Panama va être restreint pendant un an. L'accès à la voie de passage des navires de marchandises entre l'Atlantique et le Pacifique, sera réduit pendant douze mois. La cause de ces restrictions : un manque de pluies, conséquence du changement climatique et du phénomène climatique El Niño. Long de 80 kilomètres, le canal de Panama offre un accès direct entre la mer des Caraïbes et l'océan Pacifique, ce qui permet de gagner du temps en évitant de contourner le continent sud-américain.
Des restrictions ont déjà été mises en place depuis la fin du mois de juillet. Le nombre de navires autorisés chaque jour a diminué de 40 à 32, et leur tirant d'eau (la hauteur de la partie immergée du bateau) a été réduit à 44 pieds (13,4 mètres).
« Aujourd'hui, nous prévoyons (de prolonger ces mesures) pour un an, à moins qu'en septembre, octobre et novembre de fortes pluies ne tombent dans le bassin versant du canal et remplissent les lacs », a déclaré Ilya Espino, administratrice adjointe du canal. Cette annonce doit permettre aux clients du canal de mieux « planifier » leurs futurs passages, a-t-elle ajouté.
Embouteillages de navires
Conséquences de ces restrictions : des embouteillages spectaculaires de navires, patientant, de part et d'autre du canal, pour pouvoir traverser. Jeudi 24 août, ce sont 130 bateaux qui attendaient de pouvoir emprunter le canal. Et ce nombre est monté jusqu'à 160 courant août.
« Nous gérons facilement une file d'attente de 90 navires », mais « 130 ou 140, cela nous pose des problèmes et entraîne des retards », admet Ilya Espino.
Le temps d'attente a quant à lui grimpé en flèche. Auparavant de trois à cinq jours, il a atteint jusqu'à 19 jours pour revenir à 11 ce vendredi 25 août. La crise a même poussé le président colombien, Gustavo Petro, à estimer que le canal était fermé, ce que son homologue panaméen a réfuté.
« Nous avons des restrictions au Panama comme nous en avons déjà eues, mais le canal n'est pas fermé, ce n'est pas vrai », a rétorqué mercredi 23 août Laurentino Cortizo.
Un risque pour le commerce mondial
Or, l'allongement du temps d'attente des navires peut avoir un impact majeur sur le commerce mondial. Pas moins de 6% du commerce maritime mondial passe par le Canal de Panama : les principaux pays l'utilisant sont les États-Unis, la Chine et le Japon.
Actuellement, la diminution du tirant d'eau se traduit par une baisse de la capacité de chargement de chaque navire. L'Autorité du canal prévoit que le nombre de tonnes de marchandises transitant par l'isthme sera « inférieur à 500 millions » pour 2024. En comparaison, 518 millions de tonnes de marchandise étaient passées par le canal en 2022.
Cette réduction du passage de marchandises entraîne une réduction des revenus que le Panama retire du paiement des péages par les porte-conteneurs. Les autorités en charge du canal anticipent une baisse de revenus d'environ 200 millions de dollars, sur un total de chiffres d'affaires des péages qui avait atteint l'an dernier plus de 3 milliards de dollars.
Ilya Espino a toutefois voulu être rassurante. « C'est une situation qui va durer un an, donc je ne pense pas que ça puisse être pire que ce que nous avons connu lors de la pandémie de Covid-19 », a-t-elle tenu à tempérer.
Trouver de l'eau pour plus de 2 millions d'habitants
Au-delà de l'aspect économique, un enjeu humanitaire se pose. En effet, l'eau utilisée pour permettre le passage des bateaux est nécessaire à la survie de plus de 2 millions d'habitants. De l'eau de pluie est actuellement indispensable pour déplacer les navires dans les écluses (jusqu'à 26 mètres au-dessus du niveau de la mer), afin qu'ils puissent traverser la chaîne de montagnes continentale de l'isthme. Pour chaque bateau, il est nécessaire de déverser environ 200 millions de litres d'eau douce, que le canal obtient d'un bassin hydrographique formé par les lacs Gatún et Alajuela.
Or, non seulement ce bassin pâtit en ce moment du manque de pluies, mais en plus il doit continuer à pouvoir approvisionner en eau potable la moitié des 4,2 millions d'habitants du pays. Pour trouver une solution viable, les responsables du canal mènent en ce moment des études pour trouver de nouvelles sources d'eau.
« Nous devons trouver des solutions pour pouvoir continuer à être une voie de première importance du commerce international. Si nous ne nous adaptons pas, nous allons mourir », a récemment déclaré l'administrateur du canal, Ricaurte Vásquez.
(Avec AFP)
